Depuis lundi dernier, le Maroc a enregistré une nouvelle hausse des prix des carburants. Le litre de diesel s'affiche désormais à plus de 14 DH, tandis que l'essence, bien qu'étant restée stable, se vend à environ 15,50 DH. Cette montée en flèche des prix, en seulement un mois, inquiète grandement les automobilistes qui redoutent une augmentation plus importante encore dans un avenir proche. Une conjonction de facteurs à l'œuvre Selon Houssine El Yamani, secrétaire général de l'Union nationale du pétrole et du gaz (UNPG), la flambée des prix des carburants au Maroc est le résultat d'une conjonction de facteurs, à la fois mondiaux et locaux. Sur le plan local, la situation actuelle découle d'une combinaison de trois éléments cruciaux. « C'est la conséquence de décisions prises par les gouvernements précédents, auxquelles le gouvernement actuel ne peut échapper. Il s'agit de la libéralisation des prix, de la décompensation et de l'arrêt du raffinage. Ces trois facteurs ont un impact majeur sur les prix du marché aujourd'hui », détaille t-il. La flambée actuelle des prix est également le résultat d'une combinaison de facteurs géopolitiques, économiques et énergétiques. « Après la période de la pandémie de COVID-19 et avec l'incitation aux énergies renouvelables, les investissements dans le raffinage ont connu un déclin. Une distorsion entre le marché des produits pétroliers bruts et celui des produits finis est apparue. Ce que nous vivons entre septembre et novembre, en plus du déficit dans le produit fini, est lié à la décision de la Russie de réduire ses exportations, ce qui a des conséquences mondiales », explique El Yamani. En effet, la Russie a récemment annoncé son intention de maintenir la réduction de ses exportations de pétrole de 300 000 barils par jour jusqu'à la fin de 2023, suite à l'annonce de l'Arabie saoudite de maintenir sa baisse de production d'un million de barils par jour. Le résultat de cette situation est une pression à la hausse sur les prix du pétrole, en raison d'une demande mondiale soutenue. Marges de raffinage En plus des éléments mentionnés précédemment, d'autres facteurs ont un impact sur la hausse des prix des carburants au Maroc, comme le souligne El Yamani. Il met particulièrement en avant l'augmentation significative des marges de raffinage, qui représentent les bénéfices réalisés par les raffineries lors de la transformation du pétrole brut en produits pétroliers. Il note, par exemple, que pour le gazole, la différence entre le prix du litre brut et celui du produit fini à l'international était auparavant de 60 centimes. Actuellement, elle est estimée à 3 DH. « Nous achetons le brut à 5,5 DH le litre, tandis que le produit raffiné coûte 8,5 DH le litre », précise-t-il ajoutant que « si le Maroc disposait toujours d'une capacité de raffinerie de 200 000 barils, cela aurait pu compenser le déficit sur le marché mondial et éviter cette hausse des prix au niveau local ». Un autre élément jugé crucial par Houssine El Yamani est l'absence de révision des taxes imposées sur les carburants. Perspectives d'avenir incertaines Houssine El Yamani estime que prévoir la durée de cette tendance est une tâche ardue. Cependant, il estime que les prix des carburants pourraient continuer d'augmenter jusqu'à la fin de l'année et atteindre des records, dépassant ainsi les sommets de l'année dernière. «A 90 dollars le baril l'année dernière, le prix bien au dessous de 14 DH. Il se peut que nous atteignions 123 dollars cette année, ce qui ferait dépasser les 18 DH pour le gasoil », alerte le professionnel. Quelles mesures pour atténuer l'impact ? Face à cette situation préoccupante, se pose la question des mesures que le gouvernement marocain envisage de prendre pour atténuer l'impact de cette augmentation sur le pouvoir d'achat des citoyens. De plus, Houssine El Yamani souligne que la baisse de la consommation de gasoil pourrait atteindre jusqu'à 10% d'ici la fin de l'année, au lieu des 8% actuels. À ce jour, une initiative a été mise en œuvre, impliquant la reconduction du soutien accordé aux acteurs du transport de passagers et de marchandises. Cependant, selon El Yamani, il est impératif de revoir les décisions de libéralisation des prix et de décompensation, qui, selon lui, ont été prises prématurément, dans un contexte où le prix du pétrole ne dépassait pas les 50 dollars.