Qui sera le prochain président algérien ? Bien malin qui peut le pronostiquer trois mois avant les élections présidentielles du 17 avril. Pour l'Algérie, cette situation est inédite. Elle est aussi source d'inquiétude pour les Algériens, comme l'est ce qui ressemble à un saut dans l'inconnu. Depuis l'indépendance, en 1962, les Algériens vont aux urnes pour entériner le nom du candidat adoubé par le FLN. En fait, les vrais faiseurs de roi ont toujours été l'armée et les puissants services de renseignement. Rien d'étonnant à ce que les Algériens, en particulier les Algérois, soient de moins en moins nombreux, à se rendre aux urnes. Les jeux étaient toujours faits. La situation est différente cette année. La première inconnue consiste à savoir ce que va décider le président sortant, Abdelaziz Bouteflika. Sera-t-il candidat pour un quatrième mandat ? Va-t-il passer la main, comme il le laissait entendre en mai 2012, à Sétif, lors de son dernier discours public. « Notre génération a fait son temps », avouait-il. La sagesse pourrait l'y pousser. Non seulement Bouteflika, 77 ans le 2 mars prochain, occupe la présidence depuis 1999, mais il a été victime d'un AVC (accident vasculaire cérébral) au printemps dernier et ne semble plus en état de diriger le pays comme par le passé. Faute d'informations sérieuses sur son état de santé, les spéculations vont bon train à Alger. Concrètement, il n'a réuni que deux fois le conseil des ministres depuis son retour de Paris, en juillet, (il était soigné au Val de Grâce), mais il le convoquait, il est vrai, fort peu auparavant. En outre, le chef de l'Etat a des difficultés pour se déplacer et parle à voix basse, ce qui expliquerait qu'il n'apparaît plus en public ni à la télévision, mais qu'il continue à recevoir les responsables étrangers qui viennent à Alger et garde la haute main sur la diplomatie, son dossier favori. Mais quant à organiser une campagne électorale toujours éreintante... Concrètement, à l'exception du FLN, divisé entre différents clans, personne ne croit réellement à sa candidature. Ou n'y croyait pas jusqu'à la semaine passée. Les candidats présidents ont jusqu'en mars pour se présenter. Jusqu'à la mi-janvier, les « algérologues » pariait sur Abdelmalek Sellal, l'actuel Premier ministre, pour succéder à Bouteflika. Ancien ministre de l'Hydraulique, bien vu de l'étranger, connaisseur des dossiers, il semblait un futur président sans histoire. D'autant plus qu'il était regardé comme un candidat adoubé par l'actuel président et la « famille », en fait, son frère Saïd, qui occupe le poste de conseiller spécial à la présidence. C'est le véritable numéro 2 du pays. Mais Abdelmalek Sellal aurait un handicap : dans l'armée, certains rechigneraient à sa candidature. Bref, les cartes seraient à rebattre. Parmi ses challengers : Ali Benflis, ancien Premier ministre de Bouteflika jusqu'en 2003 et candidat malheureux à la présidentielle en 2004. Il est dans l'immédiat le seul à avoir annoncé sa candidature. Son handicap : hier proche de Bouteflika, celui-ci en a fait son adversaire numéro 1. « Je pense que le président préférera se représenter plutôt que d'envisager que Benflis lui succède », affirme un journaliste algérien. Un scénario que les services refuseraient. Rien ne semble donc encore joué à Alger. Ce serait la preuve qu'une page de l'histoire algérienne se tourne.