L'assurance maladie obligatoire (AMO) a connu la semaine dernière un véritable tournant dans son histoire. Lundi 16 mars, le conseil d'administration de la CNSS (Caisse nationale de sécurité sociale) a décidé d'étendre ses prestations de couverture maladie aux soins ambulatoires. Autrement dit, ces petits bobos de tous les jours qui ne nécessitent pas une prise en charge médicale lourde. Cette décision, tant attendue par les employés du secteur privé, entend donner un coup de fouet à l'AMO qui, depuis son entrée en vigueur en 2005, ne couvrait que les longues maladies coûteuses dites ALD (affections de longues durée). Seul le régime géré par la CNOPS (Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale) couvrait depuis son lancement les ALD et les soins ambulatoires. Cette extension n'aura aucun impact sur les cotisations salariales et patronales. Les différentes études actuariales menées par les équipes de la CNSS prévoient une hausse de ces cotisations à partir de 2013. Une bonne nouvelle donc pour les 2,3 millions de personnes concernées, affiliés à la CNSS et ayants droit. Le conseil d'administration de cette caisse a par ailleurs entériné la décision d'étendre l'AMO aux soins dentaires, mais cela devrait être pour 2012. Et durant la même semaine, c'est au tour de l'Agence nationale de l'assurance maladie (ANAM) de tenir son conseil d'administration avec, à la clé, «d'importantes décisions prises en faveur du développement, de la consolidation des acquis et de la régulation du régime de l'AMO», comme l'explique un communiqué rendu public par l'agence à cette occasion. Il s'agit, entre autres, de l'entérinement de l'extension du panier de soins du régime de l'AMO géré par la CNSS aux soins ambulatoires. L'AMO de tous les maux Entrée en vigueur en 2005, année de la publication au Bulletin officiel de la loi 65-00 l'instituant, la couverture médicale de base était annoncée comme une grande avancée réalisée par le royaume. Sur le papier uniquement Et pour cause, il a fallu de longs rounds de négociations entre ministère de la Santé, organismes gestionnaires, agence de régulation et prestataires de soins médicaux (médecins, cliniques privées ). La conclusion de différentes conventions liant les partenaires de l'AMO n'avait pas mis fin à la polémique entre représentations syndicales des prestataires de soins quant à leur application. Et durant des mois, le régime de l'AMO est resté otage de ces polémiques. La logique de départ, qui voulait que ce régime de couverture sociale soit étendu à tous les Marocains, a eu du mal à se concrétiser. Prenons l'exemple du régime géré par la CNSS qui, jusque-là, ne remboursait que les longues maladies. La population concernée, de l'ordre de 2,3 millions de salariés et ayants droits, est plutôt demandeuse de soins ambulatoires. En 2008, seules 80.000 personnes en ont bénéficié. Ce décalage entre la demande effective et les véritables bénéficiaires s'est reflété sur les cotisations et les remboursements effectués par la CNSS. Ainsi, et sur les trois premières années de son application, la caisse a réuni 2,6 milliards de DH de cotisations au moment où les prestations n'ont pas dépassé 10 % de ce montant global. Pour rendre compte de ce décalage, il suffit de signaler que pour l'année 2007 par exemple, la CNOPS, qui gère le second régime AMO destiné aux fonctionnaires de l'Etat et leurs familles, a généré 3,1 milliards de DH au titre des cotisations, dont 2,2 milliards de DH émanant de l'Etat. Pour la même année, la CNOPS a remboursé plus de 900 millions de DH rien que pour les les soins ambulatoires. Mais toujours est-il que la mise en place de cette assurance maladie obligatoire a permis à un grand nombre de Marocains d'avoir accès aux soins médicaux les plus coûteux. Les prises en charge proposées actuellement vont, pour de nombreux cas de cancers, jusqu'à 99% des frais d'hospitalisation et de médication.