Polémique La polémique enfle autour de la loi 57-12 qui apporte des modifications en matière d'immatriculation foncière. Ce texte n'est pas au goût des ingénieurs topographes. Alors que le gouvernement semble faire la sourde oreille, la profession a décidé de réagir. Le nouveau projet de loi visant à introduire une modification en matière d'immatriculation foncière, en particulier en ce qui concerne l'opération de bornage, enrage l'Ordre national des ingénieurs géomètres topographes (ONIGT). Ce dernier craint que cette modification ne bouleverse un fondement essentiel de la sécurité juridique liée à la responsabilité des intervenants et d'ouvrir la porte à des pratiques incontrôlables. « Le projet de loi en question, qualifié du majeur, a été adopté par le gouvernement sans nous avoir consulté au préalable, comme la loi le stipule surtout qu'en élargissant une prérogative essentielle à un corps qui travaille sous la responsabilité et le contrôle de l'ingénieur (ndlr : les techniciens), ce texte n'introduit pas un simple aménagement réglementaire », lance d'emblée Mohamed Chrourou, président de l'ONIGT. Rappelons que l'activité de bornage est gelée depuis 2011 à cause des modifications apportées par l'article 19 de la loi n° 14-07 modifiant et complétant le Dahir du 12 août 1913 stipulant que le conservateur de la propriété foncière dirige les opérations de bornage dont l'exécution est déléguée à un ingénieur géomètre topographe assermenté du cadastre, inscrit au tableau de l'Ordre national des ingénieurs géomètres topographes au lieu d'un technicien topographe. Un préjudice que les techniciens voulaient voir réparé par le projet de loi 57.12 qui prévoit la délégation des opérations du bornage à un technicien topographe assermenté relevant du cadastre. De l'avis du président de l'ONIGT, cette modification a été apportée pour servir de solution devant calmer les techniciens et au cas où le projet de loi est maintenu voire adopté, l'immatriculation foncière sera appelée à connaître un bouleversement et une dérégulation en termes de responsabilité et d'expertise. « Ce texte ouvre la porte à de mauvaises pratiques que nous ne pouvons accepter », alerte Chrourou. En effet, les topographes estiment qu'en vidant les lois 14.07 et 30.93 de leur essence en matière de responsabilité liée au bornage, ce projet favoriserait la dilution de celles-ci et créerait un flou favorisant la mise en place de nouvelles pratiques non réglementées. L'ONIGT en colère Ayant alerté les responsables concernés notamment le ministre de l'Agriculture et le chef de gouvernement, l'ONIGT s'est trouvée dans l'obligation de tirer la sonnette d'alarme et d'affirmer que si cet amendement est adopté dans sa mouture gouvernementale, c'est toute la sécurité juridique liée à la responsabilité de l'acte de bornage qui sera remise en cause. Ainsi, d'après l'ONIGT, ce projet n'engendra aucune valeur ajoutée à l'immatriculation foncière en termes d'efficacité et de rythme de réalisations et n'apporte aucune solution à la problématique réelle que connait le secteur, notamment la lenteur des procédures, l'hyper-parcellisation des opérations d'ingénierie et la multiplicité des intervenants. De plus, « ce sera sans aucun impact positif sur la physionomie de l'économie nationale, ni sur le Budget de l'Etat et encore moins sur la rationalisation des opérations d'immatriculation foncière », conclut le président de l'ONIGT. A noter qu'en 2012, les ingénieurs géomètres topographes ont pris en charge 43.000 opérations de bornage et 188.000 opérations sur titre foncier (Mises à jour, morcellements, copropriétés, lotissements) avec la création de 3.5 millions de titres fonciers. L'IGT participe aux recettes avec une enveloppe financière de 2 milliards de DH à travers la conservation foncière. Une cagnotte salvatrice pour le budget de l'Etat. En apportant ces précisions, l'ONIGT espère s'asseoir autour de la même table que le gouvernement pour discuter le projet et trouver un arrangement. En cas de non réponse à leurs doléances, les ingénieurs topographes menacent de passer à une autre forme d'actes via le conseil national de la profession pour faire entendre leur voix. Une chose est sûre aujourd'hui, le débat parlementaire relatif à ce projet de loi 57.12 sera chaud et animé