Entretien avec Sergio Marchionne, CEO de Fiat et Chrysler – L'excédent européen en automobile invite à l'implosion Par : Robert Wright à Detroit Les usines axées sur l'export et les politiques de fermetures sont la stratégie privilégiée, dit Robert Wright. Les constructeurs automobiles européens « sèment les graines d'un ouragan d'enfer», à moins qu'ils prennent des mesures au sujet des 3 millions de voitures que le continent produit chaque année et qui sont excédentaires par rapport à la demande, a mis en garde le directeur général du constructeur Italien Fiat. Sergio Marchionne, qui est également directeur général du groupe Chrysler basé à Detroit, a déclaré que les pertes à l'échelle de l'industrie automobile européenne – avec un excédent de plus de 5 milliards ˇ par an – étaient intenables. « Jusqu'à quand peut-on continuer de subventionner l'Europe à ce taux? » questionne Marchionne. « On va avoir une sorte d'implosion. Je pense que nous sommes en train de semer les graines d'un ouragan d'enfer ». Les immatriculations de voitures en Europe ont diminué de 8,2 % en glissement annuel en 2012 et devraient continuer à baisser cette année. En Italie, le marché domestique de Fiat, les ventes ont chuté à un niveau jamais vu depuis 1979. Cette morosité en Europe contrastait fortement avec la situation aux Etats-Unis, où les ventes de véhicules neufs ont atteint 13,5% en glissement annuel. Néanmoins, M. Marchionne a déclaré que les constructeurs sont réticents à fermer des usines, en partie à cause du «dilemme du prisonnier». Parce que toute fermeture serait en faveur des autres fabricants qui ont gardé toutes leurs usines ouvertes. « Le problème avec la réduction en pleine capacité, c'est que à chaque fois qu'on élimine une once de capacité, on fait bénéficier l'autre », at-il ajouté. M. Marchionne tente de résoudre les problèmes de Fiat au moyen de fermetures d'usines – l'entreprise a fermé une usine en Sicile en 2011 – et par la conversion de deux usines italiennes en unités nouvelles axées sur l'export. L'une commencera la production d'un nouveau véhicule plus petit pour la marque Jeep de Chrysler, basé sur l'empattement d'un modèle existant de Fiat. L'autre produira des véhicules pour la marque de luxe de Fiat, Maserati. M. Marchionne a contrasté sa stratégie avec celle de l'allemand Volkswagen, qui a déclaré ne pas vouloir fermer ses usines. « Que quelqu'un d'autre le fasse », fut l'attitude de VW, a rétorqué M. Marchionne. « Nous sommes assez grands pour prendre des coups et nous allons patienter ». Ce dernier ignora les critiques contre la stratégie, qui reconnaît-il, était risquée : « Vous savez, si vous avez des palpitations cardiaques, vous feriez mieux d'aller vous reposer et faire autre chose ». Il a également souligné l'importance pour Fiat et Chrysler – dont Fiat contrôle 58,5% – d'approfondir leur intégration pour le meilleur usage possible de leurs ressources mutuelles. Fiat a utilisé des concepts de base de Chrysler pour les grosses voitures en tant que fondement de base dans la production de ses véhicules de luxe, at-il expliqué, alors que Jeep s'est servi des petits modèles de Fiat comme base pour son nouveau plus petit véhicule. « Chrysler et Fiat doivent faire un seul constructeur automobile un jour ou l'autre », a déclaré M. Marchionne. Cependant, l'intégration pourrait faire face à des complications graves après que Veba – le fonds de santé contrôlé par le syndicat qui détient le reste de la société – a exercé son droit d'exiger à Chrysler de se préparer à une offre publique initiale. M. Marchionne a laissé entendre qu'il rechercherait une solution alternative avec Veba, puisque les deux devraient consentir des changements considérables à la structure organisationnelle de Chrysler avant de procéder à son introduction en bourse. « Il est possible que toute la question de leur participation résiduelle dans Chrysler sera mise sur la table – mais je pense que cela ne s'est pas produit jusqu'à présent », a-t-il windiqué. Il a insisté, cependant, que Chrysler poursuirait les préparatifs d'une introduction en bourse – même si cela ne mènerait qu'à l'introduction en bourse d'une participation minoritaire peu attrayante de 24,5% de la société. «Le désir de rapprocher les deux sociétés – en plus de l'absence des conditions de référencement idéales pour la situation des actions – ne font que compliquer les choses», a déclaré M. Marchionne. « Mais nous nous conformerons ».