La vidéo choc de la tentative de viol d'une fillette avortée par une jeune femme courageuse fait le buzz sur les réseaux sociaux. A la fois choquante et rassurante, la vidéo sordide rappelle brutalement la menace pédophile et réconforte grâce au courage de la dame... Par Hayat Kamal Idrissi
La scène s'est déroulée hier, au quartier Al Mâadi en Egypte. A l'entrée d'un immeuble résidentiel, on voit un homme, plutôt jeune, en costard et cravate, entrain d'essayer d'entrainer une petite fille âgé de 4 à 5 ans, sous les escaliers. En quelques secondes, il réussit à l'attirer et se met aussitôt à la toucher en s'apprêtant à abuser d'elle... Une scène sordide qui aurait pu tourner au cauchemar sans l'intervention de cette jeune femme. Habitant au rez- de-chaussée de l'immeuble, elle sort rapidement et interrompe les manœuvres malsaines du pédophile en l'affrontant. Elle a découvert ce qui se passe à travers les caméras de surveillance installées à l'entrée de l'immeuble. Avec beaucoup de courage, elle n'a pas hésité à affronter le violeur et à sauver la fillette. « C'est une belle manière de fêter la journée de la femme. Cette jeune a fait preuve de beaucoup de courage. Elle n'a pas eu peur d'affronter un agresseur d'enfant pour sauver la victime. C'est une véritable héroïne », écrit ce matin Alaa Mansour, grand influenceur égyptien sur son mur facebook.
Provoquant un grand émoi en Egypte ce matin, la vidéo n'a pas tardé à devenir virale. Sur les réseaux sociaux, les réactions se multiplient. Choc, dégoût, mépris, indignation... les images sordides de cette nouvelle affaire de pédophilie rappellent d'une manière brutale, la grande menace représentée par ces prédateurs en liberté. En rage, les internautes ne se sont pas contentés de commenter l'affaire. Certains sont allés plus loin en dénichant le compte facebook et instagram de l'agresseur en dévoilant son identité. Son nom, ses photos personnelles, « ses convictions religieuses »... tout a été déniché et dévoilé au grand jour et offert à voir à tout le monde, en un temps record !!! Une sorte de lynchage publique sur le net. Et ceci avant même qu'il ne soit arrêté plus tard par la police de Al Maâdi, comme l'affirme les premières informations sur le développement de l'affaire. « Ce qui est choquant dans cette affaire, c'est l'aspect insoupçonnable de ce pédophile. Avec ses airs d'homme respectable, il est impossible de le soupçonner », commente, avec étonnement, un internaute égyptien. D'autres internautes sont allés plus loin en publiant les photos de l'agresseur en plein pèlerinage, des captures d'écran de ses publications religieuses... en criant à l'imposture. « Comment peut-on être aussi hypocrite ? Porter un tel masque pour cacher son vrai visage de monstre ?» s'insurge, incrédule, Noha Chafaî, influenceuse. Une énième affaire de pédophilie qui au-delà de son atrocité, a révélé le courage de la femme égyptienne. Une bravoure largement saluée par les internautes en Egypte et ailleurs et une belle manière de fêter la journée de la femme.
Pédophilie, l'omerta
Tout comme dans la plupart des pays arabes, en Egypte, la pédophilie reste un tabou. Pas de chiffres officiels ni de véritables données sur le phénomène et son ampleur. En janvier 2019, un journaliste vedette de la chaîne privée LTC, Mohammed Al Ghiety a été condamné à un an de prison ferme et de travaux forcés pour « promotion de l'homosexualité ». Une fausse accusation, selon les ONG égyptiennes de protection des droits humains et des enfants et qui éloigne le débat du véritable problème. Car l'invité homosexuel du présentateur télé a en fait dénoncé les abus sexuels dont il était victime alors qu'il avait 13 ans. Il a raconté aux téléspectateurs comment un riche du golfe l'a amadoué avec de l'argent et en a fait sa « maîtresse ».
Des déclarations jugées d'ailleurs trop perverses et subversives par la justice égyptienne. Alors que la loi du silence continue de régner, les études sur la pédophilie restent rares en Egypte. Seuls les travaux de Dr Faten Abd Rahman At-Tanbari, de l'Institut d'études supérieures de l'enfance à l'université d'Aïn Shams, apportent quelques éclairages sur le phénomène. Ils remontent à 1995. Selon ses travaux, les cas d'harcèlements sexuels constituent 18 % des violences sur mineurs. Dans 35 % des cas, l'agresseur est un membre de la famille. La chercheuse souligne toutefois qu'en l'absence de statistiques officielles, ces chiffres restent bien loin de représenter la réalité. « Les abus sexuels sur mineur sont monnaie courante en Egypte. Les enfants sont victimes d'attouchements sexuels au club, à l'école, chez l'épicier, dans l'ascenseur... », commente Asser Yasser, une blogueuse égyptienne. Elle raconte comment elle a été victime d'harcèlement alors qu'elle était encore enfant. « Je me rappelle quand j'avais 10 ans. Le gardien de l'immeuble n'hésitait pas à me pincer ou à me caresser de façon explicitement sexuelle. Plus tard, j'ai su que je n'étais pas seule. D'autres fillettes de mon âge subissaient les mêmes attouchements. A 12 ans, ma sœur a également été victime d'une agression sexuelle. Un libraire avait tenté de s'en prendre à elle », raconte la blogueuse. Cette dernière, note toutefois une légère amélioration de l'attitude des familles face au phénomène. « Aujourd'hui, les gens déposent plainte, ce qui était inconcevable il y a encore quelques années. Mais la grande majorité préfère régler le problème sans recourir à la police. Les gens préfèrent taire le scandale dans une société très conservatrice. Un tel scandale peut être tout aussi préjudiciable pour la victime que pour l'agresseur. Pour fillette, ce sont ses chances de trouver un mari qui sont compromises et pour un garçon c'est la stigmatisation : Il est taxé immédiatement d'homosexuel », résume la blogueuse.