Lors de la rencontre de gala opposant les légendes du Real Madrid face à la sélection nationale du Maroc de 1998, les organisateurs ont rendu un vibrant hommage au sélectionneur légendaire de l'équipe nationale des années 80, Mehdi Faria, qui était accompagné de sa fille. Des cadeaux souvenirs ont été rendus au « brésilo-marocain » qui a emmené l'équipe nationale jusqu'au 8e de finale de la Coupe du Monde 1986, première fois qu'une sélection nationale africaine arrivait à ce stade de la compétition à l'époque. Faria a été également célébré très chaleureusement par le stade de Tanger. Que nous ayons été derrière notre téléviseur ou dans le stade, nous avons pu voir l'émotion dans les yeux Mehdi Faria. Tout était prédestiné pour lui rendre un dernier grand hommage. Incroyable. En 1986, quelques semaines avant le départ de l'équipe nationale de football pour le Mondial, Abdallah Haidamou se blesse à l'entraînement suite à un choc avec Hcina. Le soir, dans son appartement à Rabat, de nombreux joueurs des FAR du Rabat étaient réunis. Les parents de Haidamou et ceux de quelques joueurs y étaient également présents. Hcina, toujours jovial, racontait des blagues, et tout le monde riait à gorge déployée, oubliant la souffrance de Haidamou décidément condamné à ne pas faire le voyage pour le Mondial. Soudain, on entendit des frappes à la porte. «C'est M. Faria», dit le frère cadet de Haidamou. L'entraîneur de l'équipe nationale entre dans le salon, salue tout le monde. Et puis, serre dans ses bras Haidamou plâtré à cause d'une fracture à la clavicule droite, et sanglote. Et c'est tout ce petit monde qui fond en larmes à l'unisson. Aujourd'hui encore, Haidamou se souvient : «Au-delà du fait qu'il était un entraîneur hors-pair, M. Faria a un grand cœur. Il ne nous considérait pas comme des joueurs mais plutôt comme des proches». «Un père affectueux» Bon nombre de footballeurs de l'épopée de 1986, font le même témoignage. Pour Merry Krimau, «c'était un père affectueux». «Que ce soit avec l'ASFAR ou avec l'équipe nationale, les stages de concentration étaient des réunions de famille. Tout se déroulait dans la joie et la bonne humeur», se souvient Haidamou. Symbole d'une période glorieuse du football national, le nom de José Faria, dit Mehdi Faria, est intimement lié à l'histoire du football marocain. Cette histoire écrite en lettres d'or à Guadalajara, par Zaki, Timoumi, Dolmy et consorts. Devenant la première équipe africaine à se qualifier pour le deuxième tour d'une Coupe du monde, les Lions de l'Atlas avaient transcendé tout le Royaume chérifien. Naturellement, à chaque fois que l'épopée de 1986 est évoquée, le nom de Faria revient avec insistance. Né le 26 avril 1933 à Rio de Janeiro, José Faria n'avait pas une brillante carrière quand il débarqué au Maroc. Faria fait partie de cette denrée rare d'entraîneurs qui exercent une magie attirante et attrayante par leur savoir-faire et leur charisme. Mais cela n'est pas le fruit du hasard puisque l'homme a acquis une grande connaissance footballistique grâce à une formation académique importante et surtout sa proximité avec les grands noms du football brésilien tel le légendaire Mario Zagalo. Le début de la reconnaissance. Faria se voit confier les jeunes du Fluminense FC dans les années 70. En presque 20 ans, il a conduit les membres de ce prestigieux club à d'énormes succès, récoltant à plusieurs reprises le titre de «meilleur entraîneur des jeunes». Devenu connu et respecté, il est sollicité par plusieurs pays dont notamment ceux du Golfe. Il opte finalement pour le Qatar. Là aussi, il fait des merveilles. En trois ans, il parvient à qualifier l'équipe nationale juniors à la Coupe du monde. Il entraînait également le club local Al-Sadd avec lequel il remporte plusieurs trophées au niveau national. Le déclic arrive en 1982 lorsque le roi Hassan II charge son conseiller sur les questions sportives au Brésil afin de dénicher un sélectionneur de nationalité brésilienne. Le choix se porte sur Faria, nommé au poste d'entraîneur des FAR de Rabat sur la demande du roi. Le succès ne tardera pas puisque l'équipe nationale se qualifie aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984. «C'est cette participation aux JO qui a permis de jeter les bases d'un onze type presque parfait dans tous les compartiments du jeu», relève un proche de la sélection. Le « sorcier blanc », surnom de Faria, offre par la suite au Maroc sa première Coupe d'Afrique des clubs champions (actuellement Ligue des champions). Au niveau local, il glane avec les FAR un titre de champion (1984) et trois Coupes du trône (1984, 85 et 86). Il conduit l'équipe nationale à deux demi-finales de la Coupe d'Afrique des nations. L'expérience s'achève en 1988 suite à la défaite à Casablanca face au Cameroun de Roger Milla. Un épilogue difficile. Malgré l'exploit mené par les Lions de l'Atlas au Mondial mexicain, Faria entrera petit à petit dans l'oubli. Il fera cependant quelques apparitions, notamment à Khouribga en 1995. Là aussi sa magie prend. Il conduit l'équipe alors en deuxième division à retrouver l'élite et disputer deux finales de la Coupe du trône. Il y a quelques mois, Faria, très malade et ayant des ressources limitées, lançait cet appel depuis son pays d'origine : «Je souhaite être enterré au Maroc. Mis au courant de l'état de leur ancien coach, Krimau promet de «faire quelque chose», un geste envers ce «grand homme». «Il n'est pas admis qu'un entraîneur de l'envergure de Faria devienne clochard», se révolte Merry. Malgré cette vague de soutien, José Mehdi Faria dit le « sorcier blanc » meurt dans l'indifférence et un anonymat important. La scène marocaine et africaine dans sa généralité a perdu l'un de ses meilleurs techniciens. Un proverbe britannique dit : « Le malheur de l'avoir perdu, ne doit pas nous faire oublier, le bonheur de l'avoir connu ». Tout est dit.