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Welcome to Bendir Land !
Publié dans Le temps le 13 - 09 - 2011

La bourgeoisie huppée opère un étonnant «back to the roots» et plonge dans le chaudron des cabarets.
En arpentant les «bonnes adresses» de la capitale économique du royaume, nous nous lançons dans une quête nonchalante, insouciante à la recherche de quelques divertissements d'une nuit d'été.
Une tournée des «grands ducs» à travers les endroits plus ou moins fréquentés ou franchement bondés nous renseignera sur ces oiseaux de nuit, amateurs d'évasion et autres récréations estivales se défaussant de celles diurnes et vacancières. La montre indique qu'il est plus de minuit. Destination la corniche, abritant une forte concentration de cabarets et discothèques pleins à ras-bord. Depuis le Mégarama, on entend déjà l'appel de la musique. Une cacophonie à tous les étages. Immanquablement du chaabi, histoire de faire plaisir au puriste quadragénaire ou quinquagénaire. Au balcon 33, un cabaret qui d'ordinaire fait salle comble, est terriblement vide ! Une voix haut perchée, écorchée et vive emplit à elle seule ce lieu. C'est le beau grain... de toute beauté d'une «chikha». Une chanteuse populaire plantureuse interprétant des morceaux célébrant l'amour vache et autres textes paillards. R'kia, malgré le peu de tables occupées par les clients, se donne à fond (à formes) en présentant son showcase comme si elle se produisait devant des centaines de personnes. Elle s'emporte et exhibe des tics et tocs d'une bête de scène, toute en sueurs. Trépignant et ne pouvant plus tenir en place, son petit mais bon public (exclusivement masculin) s'extirpera de sa torpeur pour danser sur les tubes de la Aâyta marsaouia aux relents un tantinet charnels et propices aux gloussements et démonstration de bedaine dansante. Ainsi, les danseurs ont-ils réagi à l'appel de l'amour et à sa flèche de Cupidon. Aussi, l'assistance lui rendra la pareille en ovations frénétiques et en offrandes imbibées (In vino Veritas). Abordant le serveur sur la «désertion des lieux», il nous confiera : «D'habitude, l'endroit est plein à craquer les jeudis et vendredi. Mais, je crois que les gens sont partis du coté du Manhattan et du Loubnane.»
Arabian nights
C'est donc pour le Mahnattan que nous optons. En poussant la porte, nous découvrons une boîte de nuit peuplée et chaude bouillon. L'ambiance est foncièrement conviviale, mixte et enjouée emmenée par le Dj de la place. Là, c'est une ambiance beaucoup plus festive, voire fiévreuse marquée par la traditionnelle, incontournable et imposée figure de style «lyrique et théâtral». On est loin des extravagances des «bankable» de la ville ocre demandant des chansons à coups de dizaines de billets bleus, mais l'esprit y est. Ceux qui n'ont pas de scorpion dans le portefeuille peuvent imposer leur playlist à l'auditoire et s'acheter un statut, une réputation, un rang... le temps d'un soir. Des heures de gloire... du m'as-tu-vu(e) des signes ostentatoires et exhibitionnistes des nouveaux richissimes se voulant des narcisses.
Le monde des couche-tard
D'autres noctambules anonymes jurant d'avec les épicuriens consomment à la fortune du pot des mousses à 50 dh la chopine. Ils savent compter, car cela chiffre ! Au chapitre de la bagatelle, les entraineuses «tapent la discussion» dans une atmosphère de pub londonien au comptoir tout en encourageant la gent masculine à réclamer la tournée générale, il ne s'agit pas de faire le tapin, mais d'offrir une ambiance conviviale tout en encourageant le débit de boisson.
Toujours dans cette virée nocturne, nous nous retrouvons devant l'entrée du Carré. Mais le vigile nous signifiera que nous ne pouvons pas entrer vu que «c'est la fin de la soirée». Il est environ 3h. Les clubbers diront que c'est à cette heure-ci que cela commence à chauffer... à blanc. On aura été victime d'un «physionomiste» plutôt regardant sur le bling-bling de la clientèle. Un demi-tour plus tard, les vigiles de l'Armstrong auront été plus accueillants. Aussitôt, nous pénétrons dans une ambiance feutrée, cosy et joviale animée par un groupe passé maître dans les «covers» rock et pop. Il est 5h, il fait déjà jour ! Casablanca s'éveille ! Les oiseaux de nuit se cachent pour entamer une grasse et grosse matinée ! Le dimanche soir, nous refîmes cap sur la côte pour nous joindre à ceux qui auraient raté le coche de la Saturday night «skhana». Le téléphone arabe aidant nous mettons cap sur la destination de notre soirée : le VIP Club. Vers 2h, nous frappons à la lourde porte de la discothèque. Après un passage obligé sous le portique «alarmeur» et par le «péage», nous sommes enfin les bienvenus dans le secret des rois (de la fête). Les proprios alternent entre DJ's et musiques orientales interprétées par des locaux pour satisfaire une foule hétéroclite. Une clientèle jeune, âgée, décalée et celle de la haute ou basse société. Ici, il n'y a pas de complexe. Le jeunisme côtoie la gérontologie dans une bonne intelligence. L'amour de la musique n'a pas d'âge. Ça discute, ça téléphone, ça drague, ça frime, ça sirote des sodas et des Scotchs et ça esquisse des chorégraphies lascives au grand bonheur de la gent masculine. Vers 4h, c'est le rêve qui s'achève, il est temps de quitter le paradis des décibels et de passer à la caisse. La tête étourdie et une question qui ne cesse de nous turlupiner, comment avoir l'air frais pour aller au bureau dans moins de 4 heures… peu importe on essaiera de trouver la réponse le weekend prochain.
Yassine Ahrar
Cabareter n'est pas débaucher
Pour bon nombre de personnes, le cabaret à une image très négative. On le dit fréquenté par les beaufs, par des personnes à la culture ou la moralité discutable. Cette image, pas entièrement fausse, est largement préfabriquée et véhiculée par les clichés auxquels nous habituent les petits et grands écrans. Un cabaret n'est autre qu'une autre manière de fêter la nuit. Certains aiment sautiller au rythme des derniers DJ d'Ibiza, mais d'autres, jeunes ou moins jeunes, préfèrent des couleurs plus locales et le cabaret et là pour leur offrir ce divertissement nocturne.


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