A l'heure où l'habitat insalubre fait parler de lui dans les quatre coins du royaume, les habitants de l'Ancienne médina de Casablanca peuvent exprimer un ouf de soulagement. Dans quelques années, l'Ancienne médina de Casablanca promet de valoir le détour. En effet, le lancement effectif d'un grand projet de réhabilitation est imminent et sera décliné en trois phases. «Il était temps», affirme avec soulagement Abderrahim Kassou, architecte, président de l'association Casamemoire et membre du comité de pilotage qui est chargé du projet. L'état de l'Ancienne médina casablancaise est, effectivement, pour le moins piteux. Omar R., simple citoyen casablancais, nous le confirme : «Comparé aux Anciennes médinas d'autres villes marocaines, comme celle de Fès par exemple, l'Ancienne médina de Casablanca est dans un état catastrophique. On pourrait presque affirmer que ce projet allait de soi». Et c'est peu dire ! La médina est dans un état de délabrement avancé puisque les infrastructures sont dégradées et quasi-inexistantes, que plusieurs habitations menacent ruine, que les autres ne tarderont pas à suivre, que l'anarchie règne dans les marchés et que les gens vivent dans l'insécurité totale avec un grand risque de sombrer dans la délinquance. Voici l'histoire d'une réhabilitation qui n'est forcément pas de trop. C'était en octobre 2009. Le gouverneur de la préfecture de Casablanca-Anfa, Khalid Safir, a réuni au siège de la préfecture, des représentants de l'Agence urbaine, des représentants de la Chambre de Commerce, d'industrie et de services, des représentants d'associations et d'élus, des représentants des autorités locales et, finalement, des représentants de l'arrondissement de Sidi Belyout. A l'ordre du jour, une idée qui germe depuis bien longtemps dans l'esprit de Safir : la réhabilitation de l'Ancienne médina. Rien à dire, l'idée reçoit l'unanimité. Reste donc à ficeler un projet apte à faire renaître l'Ancienne médina de ses cendres. Un comité de pilotage a tout de suite été mis en place. Comprenant une quinzaine de personnes, ce comité est constitué de plusieurs personnalités publiques ou de la société civile, tels Safir lui-même, Bouchaïb Foukar, ancien gouverneur de la préfecture de l'arrondissement de Hay Hassani et actuel conservateur de la Mosquée Hassan II, Nourredine Ayouch, le publicitaire et président fondateur de la fondation Zakoura, des architectes tels Abderrahim Kassou ou Rachid Andaloussi… Mustapha Mellouk, membre du comité et président de l'Association Casablanca Carrières Centrales, nous confie avec une certaine fierté : «Un travail d'équipe gigantesque a été fait pour reprendre en main le cœur de Casablanca, à savoir l'Ancienne médina. Après avoir établi un diagnostic, il s'est avéré urgent de faire le nécessaire pour changer les choses, sécurité et décence obligent. L'Ancienne médina ne doit plus être un point noir sur la carte». Au début d'été 2010, tout était fin prêt pour la com. Le 8 juin précisément, au siège de l'Association Casablanca Carrières Centrales, une présentation du projet a été faite devant un parterre de personnalités dont on peut citer Mohamed Sajid, le maire de Casablanca et Nezha Skalli, notre ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité. Là encore, aucun mécontent ni aucun contestataire. Les choses vont donc bon train pour la réhabilitation de l'Ancienne médina casablancaise. Enfin ! En date du 27 août, une convention portant sur la mise à niveau urbaine de l'Ancienne médina a été signée devant le roi Mohammed VI. Cette dernière a été signée par Taieb Cherkaoui, ministre de l'Intérieur, Salaheddine Mezouar, ministre de l'Economie et des Finances, Mohamed Aouzai, gouverneur - directeur général de l'Agence urbaine de Casablanca, et Abdelouahed Kabbaj, président du directoire du Fonds Hassan II pour le développement économique et social. Il n'est jusqu'ici question que de la première tranche du projet, tranche prévue de 2011 à 2013 et qui nécessitera une enveloppe budgétaire de 300 millions de dirhams, dont les deux tiers seront déboursés par le département de l'Intérieur et le reste par le Fonds Hassan II pour le développement social et économique. Abderrahim Kassou est pour la majeur partie satisfait. Il avoue : «Il est vrai que la somme allouée au projet n'est pas suffisante mais il faut admettre qu'elle est conséquente. Maintenant, il faut travailler sérieusement et utiliser au mieux les moyens dont nous disposons». Mustapha Mellouk renchérit : « Les intéressés peuvent être sûrs que les fonds seront gérés avec une gouvernance exemplaire et que toutes les dispositions ont été prises en ce sens. Notre ambition et notre détermination sont très grandes et nous ferons tout pour rebâtir Casablanca ». Aujourd'hui, les objectifs du projet sont clairs, à savoir : la réhabilitation de l'Ancienne Médina de Casablanca et la mise en œuvre d'un plan d'actions prioritaires portant essentiellement sur la réhabilitation de l'habitat et l'amélioration des conditions de vie de la population ainsi que la mise à niveau et la sauvegarde des monuments historiques de l'Ancienne Médina afin de mettre en évidence ses attraits patrimoniaux et touristiques. Les fonds ont été alloués à l'Agence urbaine de Casablanca chargée de la réalisation du projet. Au boulot ! Faissal Cherradi, président du comité de pilotage et directeur régional du ministère de la Culture à Casablanca, nous dit : «Nous avons jusqu'au 22 septembre pour décortiquer le plan et mettre chaque chose à sa place en théorie. Nous avons là un très beau projet et nous ne tarirons pas d'effort pour le mener à bon terme». Puis de continuer « les priorités sont le renforcement des équipements et des infrastructures, l'aménagement et les travaux, l'hygiène et la propreté, la communication et la sensibilisation, la requalification, les activités culturelles et le renforcement du dispositif de sécurité ». Pour être plus clair, l'Agence urbaine s'occupera avant tout du traitement des immeubles menaçant ruine. Ceux qui ont été identifiés et recensés, bien entendu. Puis viendra la mise à niveau des ouvrages et infrastructures publics (voirie, assainissement, eau potable et éclairage public…). Ensuite, l'aménagement des places et des espaces verts. Les équipements publics (écoles, lieux de culte et centres socio-éducatifs) seront soit crées, soit mis à niveau. La réfection de la muraille et des portes de la médina est aussi prévue. Le relogement de 200 ménages des bidonvilles adopte aussi un caractère prioritaire dans le projet. A titre d'information, la deuxième tranche prévoit aussi la réalisation d'une enquête sur le statut du foncier et les problèmes d'immatriculation, de diagnostic et d'études techniques de tous les bâtiments menaçant ruine, alors que la troisième tranche concerne aussi l'identification, la réhabilitation et la valorisation des édifices ayant une valeur architecturale et patrimoniale. Amerhoun Amine (Le Temps)