Le ministre socialiste Ahmed Reda Chami vient de faire adopter son plan « Maroc Numeric 2013 ». Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ? Après la désastreuse stratégie «E-Maroc» avec ses objectifs irréalistes de 10 millions d'internautes à l'horizon 2010, les actions éparses comme les classes multimédias et autres, les pouvoirs publics ont décidé de reprendre les grandes lignes du dossier de «la société d'information et l'économie numérique» en adoptant une nouvelle vision baptisée : «Maroc Numeric 2013». Baptême royal La nouvelle feuille de route consolide l'existant et lui donne une cohérence globale et une logique de fonctionnement qui manquaient jusqu'à aujourd'hui au pays. Le coup d'envoi officiel de «Maroc Numeric» a été donné le 10 octobre dernier à Rabat en présence du roi et de la fine fleur des élites du royaume. Ahmed Reda Chami, ministre de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, en charge du dossier, semble d'ailleurs l'homme idoine pour mener à bien le dossier. Centralien de formation, ancien de Microsoft, fondateur de deux entreprises dans les NTI (Omnidata et Distrisoft), Ahmed Reda Chami est un féru de nouvelles technologies (il est un des rares ministres à utiliser Twitter…). Devant le roi, le ministre socialiste a donc décliné les objectifs ambitieux de la vision Maroc Numeric : créer 26.000 emplois nouveaux, un PIB additionnel direct de 7 milliards de DH et indirect de 20 milliards de DH, connecter un foyer sur trois, équiper les écoles en outils pédagogiques multimédias et accès internet et enfin mettre en route quelque 90 projets e-gov orientés citoyens & entreprises. L'atteinte de ces objectifs devra permettre au pays d'améliorer sa position dans le classement mondial. En 2008, un foyer sur 10 est à peine connecté à Internet et le Maroc occupe la 140ème position sur 192 au classement e-gouvernement des Nations-Unis. Pour atteindre ces objectifs, le ministre a arrêté une stratégie déclinée en quatre priorités, deux mesures d'accompagnement et deux modalités d'implémentation. Conscient du scepticisme qui entoure souvent ce genre de programmes, le ministre insiste sur l'aspect «concret» de la nouvelle stratégie. «Maroc Numeric est constitué de 18 initiatives déclinées en 51 mesures concrètes et budgétisées dont la planification et les responsables sont définis», précise-t-il. Pour mesurer le progrès des NTI dans un pays, il faut que la technologie soit une réalité vivante dans le quotidien de ses habitants. C'est la raison pour laquelle le ministre place en tête de ses priorités «la transformation sociale». Autrement dit, rendre accessible aux citoyens l'Internet haut débit pour pouvoir échanger, télécharger et partager connaissances et richesses. Pour cela, Maroc Numeric compte agir sur deux leviers. D'une part, l'univers de l'enseignement (9.260 établissements à équiper, 200 000 enseignants à former et 80 000 élèves ingénieurs à équiper en portables). D'autre part, multiplier les espaces publics de connexion (400 centres communautaires dans les zones reculées et 100 foyers de jeunes filles et maisons de jeunes dans une première phase). Deuxième priorité stratégique chez le ministre : le e-gov. Autrement dit, faciliter la vie aux citoyens et aux entreprises en mettant en ligne des services à distance comme les déclarations d'impôts, douanes, création d'entreprises, état civil, collectivités locales... A l'horizon 2013, le ministre veut mettre en ligne 90 projets et services à distance opérationnels. Troisième priorité stratégique : utiliser les NTI pour améliorer la productivité des entreprises, notamment les PME/PMI. Le ministre veut inciter les entreprises à adopter les solutions métiers prêtes à l'emploi dans des secteurs comme le textile, cuir, agro-alimentaire, tournés vers l'export et pousser les grandes entreprises à accompagner le tissu des PME dans la dématérialisation des échanges… Enfin, dernière priorité, mettre en place un train de mesures pour développer l'industrie des IT au Maroc en encourageant les jeunes talents et les entrepreneurs débutants à lancer leurs projets. Pour cela, le ministre compte créer des technoparks régionaux pour l'accueil et l'incubation, mettre en place un cluster dédié aux IT autour de quatre métiers : services mobiles (applications sur les portables), monétique (cartes bancaires…), web design (les sites web) et progiciels locaux (applicatifs de gestion…). Pour cela, un fonds dédié de 100 MDH sera mis en place. Le ministre vise la création de 100 start-up et 6 milliards de DH de chiffre d'affaires additionnel dans l'offshoring. Pour accompagner ces quatre priorités qui vont transformer le Maroc, le ministre est conscient des moyens à mobilier. Le premier est l'élément humain. En effet, cela ne sert à rien d'afficher des ambitions aussi importantes si les cerveaux et les bras manquent. Or, au Maroc, le point faible dans le secteur des IT reste les hommes. Le ministre ne désespère pas et compte former d'ici 2013 quelque 26 000 profils à travers la mise en place des «IT academy». Second axe : le cadre juridique. Ce dernier englobe une série de préalables nécessaires pour installer la confiance numérique : certificat électronique, protection des données, cryptage, sécurité des échanges... Un budget de 5,2 Mrdh a été mobilisé pour «Maroc Numeric» dont la gouvernance a été confiée à un comité de pilotage. Rendez-vous en 2013 ! Abdelkhalek Zyne