La première décision rejette la requête de l'opposition et d'autres formations politiques qui réclamaient une « égalité dans le temps de parole » lors des séances mensuelles de questions orales au parlement. Dans la seconde, le Conseil confirme que le groupe parlementaire du Parti du progrès et du socialisme (PPS) , jugé « non légal », placé quasiment par d'aucuns en position « d'outsider », parce qu'ayant été cannibalisé en nombre de parlementaires au niveau de son groupe à la Chambre des représentants, a désormais droit de cité sur l'échiquier parlementaire. Voilà deux décisions qui font jurisprudence ! Après avoir été soumis au Conseil constitutionnel, les deux cas de figure illustrent d'une part la rigueur et le professionnalisme de cette haute institution et, d'autre part, la maturité politique à laquelle est parvenue l'activité politique. On en veut pour preuve de la diligence de cet organe les décisions qu'il a prises il y a six semaines à l'encontre du PJD et du Mouvement populaire. Il a annulé un siège parlementaire remporté par le PJD lors d'élections partielles organisées en février dernier dans la province de Moulay Yacoub, même si le député Mohammed Youssef a tenu à ne pas démentir la nouvelle, laissant planer le flou total et affirme ne pas avoir encore reçu de notification officielle à ce propos. Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel, a enregistré le recours adressé par certains candidats aux élections législatives partielles de Settat contre Hicham El Herami, vainqueur de ces élections et appartenant au Mouvement Populaire (MP). Le Conseil Constitutionnel a fondé sa décision sur la plainte formulée contre l'exploitation qui a été faite de l'hymne national marocain dans un meeting du Mouvement populaire. Le Conseil constitutionnel ne badine donc pas avec la rigueur et les principes. Pour revenir aux deux décisions récentes, le débat relatif au temps de parole, était orienté sur la base d'un malentendu, que le Conseil constitutionnel a levé : dans une démocratie qui se respecte, le Chef de gouvernement, dont la tâche est d'accomplir son devoir de gestionnaire, est privilégié sur un plan de la légalité par la Constitution. Il est donc normal qu'il bénéficie des moyens et instruments que lui confère la Constitution pour mener à bien sa mission de Chef de l'Exécutif. Et parmi les privilèges légaux, le temps de parole tient une place primordiale, parce que les citoyens ont besoin de comprendre l'élaboration des politiques et les choix du gouvernement et, donc de pédagogie. Banco pour les partis de la majorité Les représentants des formations de l'opposition et ceux qui les suivent dans cette revendication, ont ainsi reçu la réponse constitutionnelle idoine et prosaïque en quelque sorte : ils n'ont pas le même poids, ni la même mission et encore moins la légalité que confère un succès électoral. Le Conseil constitutionnel, en vertu de l'article 69 de la Constitution, qui régit le système de contrôle et de vérification ainsi que le règlement intérieur du parlement, des activités des groupes et des commissions. Compte tenu de ses prérogatives, il a tranché pour une distribution qui est apparue arbitraire aux yeux de l'opposition qui ne recueille que 50 % du temps de parole, et les autres 50 % pour le Chef du gouvernement à lui seul. Exit dont la proposition à trois tranches, l'une pour le Chef de gouvernement, l'autre pour sa majorité qui « accompagnent le PJD », et enfin la dernière pour l'opposition. A lui seul, le Chef de gouvernement bénéficie de 50 % du temps de parole, face à l'opposition qui devrait désormais bénéficier, au niveau des deux chambres, des 50 % restant mais qu'elle partage avec les autres formations y compris celles de la majorité. Le passage du Chef de gouvernement aux séances mensuelles lui permettra désormais d'avoir un temps de parole conséquent et de ne pas être chahuté ou perturbé, comme cela a été le cas lors des dernières séances de questions. C'est le PPS, en effet, qui se fait l'ardent défenseur de la nouvelle mouture, consistant à favoriser le Chef de gouvernement et à réduire à une peau de chagrin le taux accordé à l'opposition. Au total, si l'on prend en compte qu'en plus du PJD, incarné par Abdelilah Benkirane, ce sont le Mouvement populaire, et le PPS qui bénéficient largement de la décision du Conseil constitutionnel, on arrive à plus de 75 % en faveur de la coalition au pouvoir. En adoptant la mesure que le groupe parlementaire du PPS reste « légal », parce qu'il respecte le quota de membres requis pour constituer et faire accepter son groupe, le Conseil constitutionnel a renforcé le parti de Nabil Benabdallah et lui a redonné ses lettres de noblesse. Lui, que l'on disait marginalisé, se voit désormais conforté dans la décision du Conseil constitutionnel qui interdit la transhumance et le vagabondage ! La vie politique marocaine semble en effet réduite cette semaine à cet agenda constitutionnel, à travers quelques mesurettes, liées aux ambitions des partis sur des pinaillages comptant pour des vétilles... alors que les problèmes pendent au nez du pays.