« Boujdour aux mains des indépendantistes », « Les populations envahissent les rues de Boujdour et de Laâyoune», …. A elles seules, ces deux phrases, lancées comme un cri de victoire, en disent long sur l'appareil de propagande du polisario, devenu si efficace que ses échos ont fini par atterrir cette semaine au Quai d'Orsay. Paris a en effet rappelé «son attachement au droit à manifester pacifiquement» dans les villes du Maroc, lors d'un point presse, tenu ce 29 avril au ministère des Affaires étrangères. La sortie de la diplomatie française, plutôt inattendue, aurait convaincu du sérieux des informations relayées auprès des décideurs et des ONG qui suivent de près le dossier du Sahara. Sauf que dans la réalité, il n'en est rien. Une visite à Lâayoune et à Boujdour (2 heures de route au sud de Laâyoune) ces trois derniers jours a permis de confirmer les contradictions et les contenus mensongères des photos, articles et vidéos amateurs aux plans serrés que fabriquent, notamment, Radio Maizirat, un porte-voix des « indépendantistes de l'intérieur ». « Les évènements survenus dans la ville sont l'œuvre de jeunes sans repères, venus d'autres régions et qui opèrent pour le compte de leurs commanditaires». Le wali de la région de Laâyoune-Boujdour Saqia Hamra, Khalil Dkhil, ne cache pas sa déception. Dans une déclaration devant la presse, dimanche dernier à Laâyoune, le haut fonctionnaire explique en quelques mots la situation dans les provinces du sud. Les manifestations répétées depuis vendredi dernier, le lendemain de la décision de l'ONU de ne pas inclure la question des droits de l'Homme dans les prérogatives de la Minurso, n'ont pas de quoi inquiéter. L'homme sait ce qu'il dit. Originaire de la tribu des Rguibates, la plus importante par le nombre, dans les provinces du sud et dans les camps de Tindouf, Khalil Dkhil descend de la faction des Thalates. Cette appartenance, il l'a partage avec le maire de la ville de Laâyoune, l'Istiqlalien Hamdi Ould Errachid. Une vérité voilée Les manifestations qui surviennent de manière sporadique, depuis vendredi, semblent être bien organisées et surtout orchestrées de loin. « De très jeunes personnes prêtent leurs services contre 100 dirhams par jour. Certains peuvent toucher plus. Tout dépend de l'effort demandé», nous assure un responsable dans l'administration locale, originaire de Laâyoune et fin connaisseur des familles de la ville. L'information est confirmée, officiellement par le préfet de police de Laâyoune, Abdelbasset Mehtat. Dans une déclaration mardi, le responsable sécuritaire dresse un bilan provisoire de la situation : 70 blessés parmi les forces de l'ordre (dont 2 opérations chirurgicales) et des dégâts matériels pratiquement sans grande gravité. Les zones préférés des manifestants sont le quartier Maatallah, les avenues Al Mamoun et Smara, et la Place Dchira. « Globalement, ce sont quelque 300 personnes, tous des indépendantistes qui s'occupent de la besogne. Pour les contrer, nous intervenons dans les limites permises par la loi, sous l'autorité du parquet général». En fait, ce que le préfet de police a évité d'avouer, c'est que les forces de l'ordre ont presque les mains liées. On aurait dit qu'elles opèrent dans cette région avec une conduite mesurée au millimètre près. Les services de police connaissent chacun des manifestants puisque ce sont les mêmes qui reviennent dans les rues. Ils connaissent leur modus operandi, leurs bailleurs, et le parrain de leurs bailleurs. Pourtant, les poursuites pénales ne sont pas ordonnées. L'impression générale, après la rencontre avec les autorités locales, les élus, et des citoyens de la ville, est que le dossier est trop politisé, avec des intérêts manifestes que se partagent des familles et des tribus aux dépends d'autres. Ces dernières montent alors au créneau et crient à tout bout de champ qu'il y a complot. «L'Etat n'a finalement pas été juste avec ceux qui ont défendu la marocanité du Sahara pendant ces 30 dernières années, alors que certains tirent des profits inimaginables des largesses de l'Etat. Et ceux qui se sentent les plus lésés basculent facilement dans l'autre camp», nous explique une unioniste, originaire de Laâyoune. Les erreurs d'un récent passé L'attitude des autorités, des gérants du dossier du Sahara, devrait changer, puisque le polisario autant que l'Algérie ne changeront pas, du moins pour l'instant. Le préfet de police nous a avertis que d'autres manifestations sont attendues dans les prochains jours. Les indépendantistes, téléguidés par la soif d'intérêts et par nos voisins de l'est, n'ont apparemment que peu à perdre. Les provocations répétées peuvent dégénérer à tout moment et les Marocains, tous, ne sont pas prêts d'oublier les erreurs de Gdeim Izik. DNES à Laâyoune Mounir El Figuigui