Comment l'idée de ce festival est-elle née ? La manifestation existe depuis 26 ans, mais pas sous cette forme. Nous avons décidé cette année de bousculer cet événement qui s'appelait auparavant L'Eté du Livre. Cette manifestation, aux origines, a été fondée par Marguerite Puhl-Demange, directrice du Républicain Lorrain et femme passionnée d'écriture. Elle avait, dès le départ, cette envie de réunir écrivains et journalistes. Cet esprit initial s'est perdu au fil des ans et, peu à peu, L'Eté du Livre est devenu un salon plus généraliste. Il y a quatre ans, une nouvelle équipe est arrivée et a décidé de retrouver cet esprit initial de littérature et de journalisme. Le rendez-vous s'appelait toujours L'Eté du Livre. La réflexion que nous avons menée est partie du constat qu'il y a énormément de manifestations littéraires en France, les auteurs sont très sollicités, les éditeurs aussi. Nous avions envie de nous démarquer, de trouver une formule originale et surtout, de privilégier les temps de rencontres. En 2011, nous avons avancé les dates de la manifestation au mois d'avril et avons réduit le nombre d'auteurs accueillis pour mieux les valoriser. Cette année, nous avons franchi le cap du changement de nom, et naturellement, c'est devenu le Festival Littérature et Journalisme, puisque c'était notre sous-titre depuis quatre ans. Nous programmons près de 70 événements thématiques autour de la littérature et du journalisme et avons réfléchi aussi à des propositions variées pour que tous les publics puissent s'y retrouver. Grands entretiens, tables rondes et débats, mais aussi petits déjeuners et apéros littéraires, lectures-spectacles et performances, pour ménager des espaces plus intimes. Pourquoi avoir choisi de réunir les thématiques littéraires et journalistiques cette année ? C'est en réalité plus qu'une thématique, c'est notre identité. Notre envie de revenir à cette réunion part du constat que la frontière entre l'écriture journalistique et l'écriture de fiction s'efface de plus en plus. Beaucoup de journalistes passent à l'écriture romanesque, et s'autorisent la subjectivité, ou une autre façon d'écrire que dans leurs articles. Beaucoup de romanciers mènent un travail d'enquête pour nourrir leurs textes, ou s'inspirent du réel. Par ailleurs, on constate aussi le succès des revues à la frontière des genres comme Feuilleton, XXI, L'Impossible, Desports... Il est important pour nous de croiser les regards et les expériences. De se demander aussi si certains romans ne sont pas une autre manière de décrypter le monde d'aujourd'hui et l'actualité. Ce qui est certain, c'est qu'il y a une complémentarité entre les deux domaines. Amin Maalouf, journaliste et écrivain de renom international, aujourd'hui entré à la Coupole, est le parrain de cette 26e édition, dévolue à la littérature et au journalisme. S'agit-il selon vous d'un parrain inspiré, puisqu'il a tour à tour été grand reporter à Jeune Afrique, puis romancier au succès jamais démenti ? Nous sommes honorés qu'Amin Maalouf ait accepté de parrainer le festival Littérature et Journalisme. En effet, par son parcours, il représente parfaitement l'esprit du festival, c'est un humaniste qui jette des ponts entre les frontières réelles et imaginaires, il a très bien compris notre identité, une « connivence qui a eu ses titres de gloire en diverses langues et sous tous les cieux », comme il l'a écrit pour préfacer notre programme. Comment a-t-il accueilli cette idée ? Nous lui avons d'abord envoyé un courrier pour lui proposer ce parrainage, puis nous l'avons rencontré. Notre envie était de pouvoir l'impliquer dans la programmation pour qu'il puisse venir parler de son dernier roman, Les Désorientés (Grasset, 2012) mais pas seulement. Cet événement célèbre également la musique, incarnée par les talentueux Kader Fahem et Salim Beltitane ainsi que la bande dessinée, avec l'auteur Joël Alessandra. Il était important de réunir différents arts ? C'est une manière de donner vie aux textes, d'appréhender différemment la littérature, de faire du livre un objet vivant. L'appellation « festival » indique que nous sommes dans un temps festif, d'échanges. Kader Fahem est guitariste et compositeur, Salim Beltitane est percussionniste. Les compositions de Kader Fahem illustrent parfaitement Le Périple de Baldassare, d'Amin Maalouf. Il se trouve que Joël Alessandra – qui a illustré notre affiche – a aussi adapté ce texte en bande dessinée. Là encore, c'est une manière d'aborder différemment la littérature. Metz est située près de Strasbourg, qui abrite le Parlement européen, il s'agit d'un prétexte bien senti pour mettre en lumière la littérature de vos voisins italiens écrivains-journalistes... Metz est située dans un espace que l'on nomme la Grande Région, à proximité des frontières belges, luxembourgeoises et allemandes. La dimension européenne, voire internationale est pour nous importante. Cette année, nous invitons quelques auteurs italiens, dont Claudio Magris, Valerio Magrelli et Antonio Pennacchi, en partenariat avec l'institut culturel italien de Strasbourg qui fait un formidable travail et qui nous a accompagnés dans cette partie de la programmation. La littérature italienne contemporaine est très vivante, nous avions envie de la mettre en lumière dans une région où l'immigration italienne a été particulièrement importante. Du côté journalistique également, les dernières élections en Italie posent beaucoup de questions qui dépassent le cadre de ce pays, des journalistes seront donc présents pour évoquer notamment cette actualité. Avez-vous un coup de cœur littéraire parmi les œuvres des romanciers qui ont été invités durant ces quatre jours ? Difficile de n'en retenir qu'un seul, élaborer un programme de festival est le résultat d'une succession de coups de cœur. Je vais citer notamment Mathias Enard, qui a publié à la rentrée dernière Rue des Voleurs chez Actes Sud, et qui a reçu le prix des lecteurs du festival. Il vient de publier un premier roman graphique, Tout sera oublié, avec l'artiste Pierre Marquès. Ils viendront tous deux de Barcelone présenter cet ouvrage au cours d'un Grand entretien le samedi 13 avril. Des manifestions destinées à la jeunesse se tiennent aussi en marge de ce festival... Le programme jeunesse est conçu comme un programme dans le programme. Cette année, nous mettons à l'honneur l'auteur et illustrateur jeunesse, Christian Voltz, et proposons une exposition, des spectacles pour le jeune public. ◆