La Conférence a été l'occasion de présenter un premier rapport sur la gouvernance au féminin. Un groupe de travail à l'IMA composé de représentants du ministère de l'Economie et des finances, d'organismes chargés de promouvoir la bonne gouvernance ainsi que d'entreprises publiques et privées de premier plan et d'experts indépendants a mené une étude analytique sur la représentativité des femmes dans les organes de gouvernance des grandes entreprises publiques et privées nationales. Un processus «parsemé de défis» «Le rapport n'est pas une fin en soi, mais représente le lancement d'un processus exaltant et parsemé de défis», a déclaré Leila Rhiwi, représentante de l'ONU Femmes au Maghreb. «L'existence d'un plafond de verre est au Maroc perçue et constatée mais, avant ce rapport, il n'y avait pas de données chiffrées le démontrant», a-t-elle ajouté. Cette étude a confirmé des taux de présence des femmes sur l'ensemble des administrateurs des grandes entreprises publiques et privées globalement très bas, avec une légère avance pour les entreprises cotées en bourse. L'étude a également permis de mieux comprendre les zones et les facteurs de blocage de l'accès des femmes aux organes de gouvernance des entreprises, relevant à la fois de contraintes internes liées à la culture d'entreprise et aux femmes elles-mêmes et de facteurs exogènes relatifs à l'environnement sociétal et culturel. «Il faut augmenter le nombre de femmes dans les postes décisionnels à travers des mesures institutionnelles», déclare Najib Boulif. Concrètement, «la commission qui a travaillé sur le sujet doit être institutionnalisée de manière à ce que le travail se poursuive. Deuxièmement, nous devons préparer une base de données des femmes compétentes pour pouvoir les présenter à chaque fois qu'il y a des postes de responsabilité», indique le ministre. Cinq axes de recommandations Le groupe de travail «Gouvernance au féminin», créé au sein de l'Institut marocain des administrateurs et présidé par le ministère des Affaires générales et de la Gouvernance, a établi une série de recommandations dans son rapport. Ces recommandations s'articulent autour de cinq axes. Il s'agit tout en premier lieu de préciser et compléter le cadre légal et réglementaire tout en incitant les dirigeants à s'inscrire dans ce cadre, à travers la veille à la conformité de la législation en vigueur par rapport à l'objectif d'égalité des genres en entreprise. Il est nécessaire pour cela d'inciter les entreprises à appliquer la réglementation existante et à s'inscrire dans les référentiels législatifs en vigueur : il s'agit entre autres de la Constitution (et notamment de l'article 19) et du code marocain de bonnes pratiques de gouvernance des entreprises et établissements publics. Mais la législation en vigueur n'est pas suffisante. Il faudrait «la compléter ou la mettre en conformité avec la Constitution», indique le rapport. Le second axe de recommandations concerne la possibilité d'envisager un système contraignant pour impulser le changement «La plupart des femmes interrogées sont convaincues qu'un objectif de parité est beaucoup trop ambitieux et donc irréalisable et peu crédible et qu'il faut davantage se situer dans un objectif de mixité ‘significative'», indique le rapport, précisant que les femmes interrogées estiment qu'un «quota imposé de 15 à 30 % (assorti de sanctions) permettrait aux femmes de faire passer leurs idées, tout en soutenant d'autres hauts potentiels féminins et en jouant leur rôle de relais pour renforcer naturellement la présence des femmes dans les instances de gouvernance». Le troisième axe de recommandations concerne l'accompagnement des femmes dans le processus d'accès aux instances de gouvernance. La lutte contre les représentations sociétales et culturelles discriminantes représente le quatrième axe de recommandations proposé par le rapport. «Il est essentiel d'intégrer la notion d'égalité des genres dans toutes les politiques publiques quel que soit le champ où elles s'inscrivent pour favoriser l'efficacité des mesures visant strictement l'augmentation du taux de participation des femmes aux instances de gouvernance. La non-discrimination en raison du sexe doit se traduire dans le quotidien de tous et devenir une réalité tangible», explique le rapport. Cela doit se faire à différentes échelles, de l'école à l'entreprise, en passant par les médias. Enfin, la cinquième recommandation consiste a'inscrire la politique de promotion de l'accès des femmes aux organes de gouvernance dans la durée.