Si le discours des chancelleries, des gouvernements et des responsables du monde entier tend de plus en plus à affirmer que l'Afrique est désormais le nouveau chantier de la croissance et le futur marché porteur mondial, il ne vient que confirmer l'intérêt que le souverain avait déjà affiché il y a une décennie. C'est un quasi euphémisme que celui de « Mohammed VI l'Africain » ! Peut-être eût-il été plus approprié de dire « un militant » de l'Afrique. Il convient de souligner, en effet, que peu de temps après son accession au Trône, moins de deux ans, et dans la foulée des changements majeurs, Mohammed VI a tenu à se rendre en Afrique, notamment en visite officielle au Sénégal. Il a posé les jalons de la nouvelle politique africaine du Maroc, en même temps qu'il a marqué une rupture avec ce que certains se sont mis à interpréter comme un « splendide isolement du Maroc à l'égard de l'Afrique » ! Plus tard, il s'était rendu à plusieurs reprises au Gabon, de nouveau au Sénégal, en Guinée Equatoriale, au Niger, au CongoBrazzaville, en RDC (République démocratique du Congo)... Coopération multiforme Ces visites différentes et répétées confirment l'orientation personnelle qu'il imprime aux choix diplomatiques du Maroc. Autrement dit, la volonté de mettre en place un axe privilégié entre Rabat et le continent. Mais aussi de renforcer l'édifice du partenariat interafricain et le recentrage Sud-Sud qui en est le pilier. Le Maroc apporte avec lui une expertise – technique et financière – au large spectre, puisqu'elle recouvre des secteurs comme l'habitat, le transport, la santé et notamment l'agriculture. Le Maroc propose une coopération multiforme, au niveau des Etats et des gouvernements comme aussi à celui des secteurs privés. Les banques principales comme BMCE Bank, notamment à travers la Bank Of Africa (BOA), Attijari Wafabank et la BCP se font, c'est le cas de le dire, le coude-à-coude et développent leurs activités dans le continent. Maroc Télécom est présent au Mali, au Gabon, au Burkina Fas et en Mauritanie, avec un chiffre d'affaires qui fait pâmer d'envie plusieurs de ses concurrents internationaux. De leur côté , les sociétés de construction comme Addoha, et autres, participent aux projets nationaux d'habitat, tandis que la Royal Air Maroc, transformée en hub, dessert la quasi-totalité des capitales francophones et joue le rôle de seul transport transnational. Sans doute faudrait rappeler que, autre volet significatif, le groupe OCP lance désormais une véritable politique novatrice en matière de développement agricole qui est aujourd'hui aux pays africains ce que l'indépendance alimentaire est aux peuples en quête d'amélioration alimentaire. Il met à leur disposition les engrais et les technologies de pointe pour leur fructification, de manière à assurer les meilleurs rendements agricoles qui les mettent à l'abri des effets de sécheresse et d'autres aléas. L'interpénétration maroco-africaine Pour les opérateurs économiques notamment, l'Afrique est depuis quelques temps une sorte de niche. Ils reluquent avec intérêt les secteurs à forte valeur ajoutée, comme le transport et la logistique, les investissements notamment des infrastructures, le transfert de technologies. Ils attendent seulement que le cadre juridique et réglementaire soit finalisé pour sauter le ou les pas supplémentaires. Il ne faut guère oublier que les échanges du Maroc avec l'Afrique des dernières a été de l'ordre de plus de 20 %, soit l'équivalent de 1,5 milliard de dollars. Soit, en effet, quelque 2,1 % de nos échanges extérieurs, selon le ministère du Commerce extérieur. La coopération prend aussi sa dimension à travers la décision du roi Mohammed VI d'avoir en 2001 exonéré totalement des droits d'importation les produits de base, en provenance de 34 pays d'Afrique. Conjuguée à une vision solidaire et humaine, cette implication du Maroc en Afrique fait de lui un partenaire privilégié. Au Sommet France-Afrique du Caire, le roi Mohammed VI a annoncé la décision d'annuler officielle la dette de certains Etats africains contractée auprès du Maroc. Ce fut-là non seulement une décision à grande dimension symbolique, mais la preuve que notre pays place sa relation avec l'Afrique comme l'une des priorités de sa politique étrangère et le partenariat avec ses peuples comme un credo... De même, à considérer leur nombre de plus en plus significatif, la présence au Maroc d'une communauté de ressortissants en provenance de plusieurs pays d'Afrique, étudiants inscrits dans les universités et les instituts, employés dans les secteurs des nouvelles technologies, commerçants, vendeurs des produits artisanaux qui accèdent au marché marocain sans payer les droits de douane, donne la mesure réelle de l'interpénétration maroco-africaine. C'est d'une complicité Maroc-Afrique qu'il faut parler, parce qu'elle transcende les politiques officielles, quand bien même le Maroc ne ferait plus partie de l'Union africaine (UA), héritière de la défunte OUA qu'il a quittée en novembre 1984.