Inaugurée jeudi, La Berlinale continue ses festivités dans la capitale allemande. Bien que relégué derrière Cannes, Toronto et Venise, le festival ne manque pas de belles surprises. Des réalisateurs de la trempe d'Ang Lee, Jafar Panahi, Bruno Dumont, Gus Van Sant et Hong Sangsoo concourent dans la sélection officielle. Dix-neuf long-métrages seront en lice pour l'Ours d'or, dont le prix sera remis samedi prochain. Avec vingt-quatre longs-métrages en provenance de vingt-deux pays, la Berlinale traite des thèmes brûlants dont la question controversée du gaz de schiste avec Promised land de Gus Van Sant, porté par le même casting du magistral Good Will Hunting: Matt Damon et Frances Mc Dormand. Le film de Steven Soderberg « Side effects » sonde les dessous de l'industrie pharmaceutique, avec Jude Law, Channing Tatum et Catherine Zeta-Jones (probablement le dernier long-métrage du réalisateur oscarisé de Traffic). De l'Iran au monde arabe Le film le plus politisé reste sans doute Closed Curtain du réalisateur iranien Jafar Panahi, un des cinéastes les plus influents du mouvement de la nouvelle vague iranienne. Assigné à résidence dans son pays et accusé de propagande anti-régime, le réalisateur a réussi à tourner deux films depuis sa mise en quarantaine en 2010 dont Ceci n'est pas un film. Un film sorti d'Iran par l'entremise d'une clé USB cachée dans un gâteau. Close curtain tourné sans doute pour défier les autorités iraniennes, se déroule dans une villa près de la Mer Caspienne où un homme (Kambozia Partovi) et une femme (Maryam Moghadam) y sont reclus, les rideaux tirés. Chacun se protège des autorités. L'homme se cache car il possède un chien, un animal jugé impur, et la femme pour avoir participé à une fête clandestine. Une poignée de co-productions arabes et de films traitant de thèmes liés au monde arabe sont projetés hors-compétition. L'Egypte est représentée par la réalisatrice Hala Lotfy qui projette son premier film Coming forth by day (Vivre au quotidien), qui a décroché le Wihr d'Or du festival d'Oran du film arabe. Un film esthétique qui sonde la soumission des femmes, et décrit l'histoire d'une mère et de sa fille contraintes de s'occuper d'un père ravagé par la maladie. La Palestine défend ses couleurs avec le film d'Anne-Marie Jacir When I saw you (Quand je t'ai vu), qui raconte le plongeon dans la résistance des années 60s à travers les yeux d'un enfant autiste, et le documentaire de Marcus Vetter « Cinema Jenin – l'histoire d'un rêve », un long-métrage sur la réhabilitation d'une salle de cinéma en Cisjordanie. Dans la section Panorama, Inch'Allah de la réalisatrice franco-canadienne Anaïs Barbeau-Labalette, sera projeté cette semaine. Il s'agit d'un drame sur le conflit israélo-palestinien dépeint par un médecin canadien. Autre œuvre probante, la production israélo-américaine State 194 réalisé par Dan Setton, qui fait référence à la requête de la Palestine, pour être reconnue par les Nations unies en tant qu'Etat indépendant. Le Liban officie dans la section Panorama documentaire avec la co-production libano-danoise de Mehdi Fleifel « Un monde qui ne nous appartient pas », journal intime d'une famille qui a été témoin de trois générations de réfugiés palestiniens au sud du Liban. Honneurs aux dames La France est présente en force à la Berlinale avec trois films portés par trois coqueluches féminines du cinéma de l'Hexagone : Juliette Binoche, Isabelle Hupper et Catherine Deneuve. Le réalisateur Bruno Dumont, primé à Cannes pour son film L'humanité , entre en lice pour la première fois dans la Berlinale avec son biopic Camille Claudel, 1915. Après Isabelle Adjani qui a interprété la célèbre sculptrice française en 1988, c'est une Juliette Binoche très sobre qui reprend le flambeau. Les deux autres opus en compétition sont : Elle s'en va de la comédienne et réalisatrice Emmanuelle Bercot qui offre à Catherine Deneuve un rôle atypique, celle d'une femme en quête de réinvention personnelle, et La religieuse de Guillaume Nicloux inspiré du roman de Diderot, avec Isabelle Huppert en mère supérieure. Le film décrypte l'hypocrisie religieuse en déroulant l'histoire d'une jeune fille forcée à devenir bonne sœur. Le cinéma américain indépendant se taille une grande part dans cette édition. A part les six films en compétition officielle, le festival permet de découvrir des films d'auteur hors compétition, dont la plupart sont sortis victorieux du festival de Sundance. Prince avalanche de David Gordon Green, Don John's addiction de Joseph Gordon-Levitt avec Scarlett Johanson et Julianne Moore, Upstream color du réalisateur Shane Carruth, Frances ha , une belle ode à New York de Noah Baumbach, et Night train to Lisbon, long-métrage percutant avec Jeremy Irons et Charlotte Rampling et la star française Mélanie Laurent, du réalisateur Bille August nominé à deux reprises pour la palme d'Or. La projection de « Before midnight », une romance qui vient parachever le très acclamé « Before sunrise » avec Julie Delpy et Ethan Hawke, est également très attendue. En attendant le verdict du jury samedi soir, place aux étincelles du cinéma mondial.