Aujourd'hui, lundi 12 avril, le procès de Belliraj devrait connaître un tournant décisif. Plusieurs facteurs confortent cette thèse. D'abord, le PJD qui pèse de tout son poids dans l'affaire. La présence plus que remarquée de quatre dirigeants du parti islamiste, dont Abdelilah Benkirane, le SG, et son adjoint Abdellah Baha, lors de l'audience du 7 avril dernier, atteste de cette reprise d'intérêt pour l'affaire. Intérêt encore plus accentué par ce communiqué diffusé le lendemain par le secrétariat général. Document dans lequel la direction du PJD réaffirme sa revendication pour la «mise en place des conditions requises pour un jugement équitable». Le parti, lit-on dans le document signé par Abdelilah Benkirane, «estime que cette affaire a connu depuis le début plusieurs irrégularités juridiques et politiques». «C'est l'une des dernières cartes que les détenus politiques, dont Laabadlah Malainine, sont en train de jouer dans cette affaire», explique Saïd Oulzaz, ancien membre de la défense du membre du Conseil national du PJD. Il faut «appeler à la barre les témoins évoqués dans l'affaire. A commencer par l'actuel président du CCDH, Ahmed Herzenni». Cette «présence», intervient en outre quelques jours après que le nouveau ministre, Mohamed Naciri, a reçu les membres des familles et la défense des cinq hommes politiques. D'après les quelques informations qui ont filtré de cette rencontre, le ministre a assuré à ses interlocuteurs «qu'il veillera à mettre en place les conditions nécessaires pour un procès équitable». Et par procès équitable, la défense entend, entre autres, «la nécessité d'appeler à la barre les témoins évoqués dans l'affaire. A commencer par l'actuel président du CCDH, Ahmed Herzenni», assure un membre de la défense. Bref, le PJD tente-t-il de tirer des «dividendes politiques» d'une éventuelle issue favorable de ce dossier ? «Avancer une telle affirmation serait aller vite en besogne», prévient Mohamed Darif, spécialiste des mouvements islamistes. Le politologue estime que «cette présence est normale. Le PJD s'est déjà fait présenter, par le passé, lors des audiences de procès en première instance. Car, depuis le début, cette affaire représente une problématique dans les relations entre le PJD et l'Etat». Qu'est-ce qui change donc aujourd'hui ? «Les deux nouveautés dans l'affaire, c'est que le ministre (un avocat de carrière) a reçu, pour la première fois les membres de la défense et leur a offert les garanties d'un procès équitable. La grève de la faim observée (depuis le 22 mars) par les responsables politiques est également un élément fort à prendre en compte». Pour le politologue, «c'est donc chose normale que le PJD décide de suivre avec un aussi grand intérêt l'évolution, en ces circonstances, de l'affaire. Cet acte de soutien aux hommes politiques, et particulièrement Laabadlah Malainine, ne peut être interprété que comme une confirmation (un peu plus accentuée) de leur position politique». Une position perçue comme une tentative de clarifier ses relations avec l'Etat. «Le parti, qui a toujours prôné une action politique pacifique en toute transparence et dans le respect des institutions et des règles du jeu, se retrouve dans une situation où un membre de son Conseil national est accusé de terrorisme. Ce qui est en soit une problématique pour le PJD». D'où ce discours du parti de la Lampe selon lequel «l'affaire est mue par des considérations politiques». Une thèse que défend également le PSU, dont l'un des membres, Hamid Najibi, vient d'être libéré après avoir purgé une peine prononcée dans le cadre de la même affaire. Sauf que le PSU ne dispose pas des mêmes moyens de pression que le PJD. Autre thèse, celle défendue par l'ancien avocat de Laabadlah Malainine, Saïd Oulzaz : «cette affaire revêt un caractère international. Elle doit donc être résolue dans le cadre aussi bien du droit marocain qu'international». Mais cela, c'est une autre paire de manches. Pendant tout ce temps… Le combat parallèle de Belliraj Abdelkader Belliraj, également en grève de la faim depuis le 22 mars et qui, lui aussi, a renoncé à se (re)faire représenter par un avocat dans le procès d'appel en cours, a engagé un combat parallèle en Belgique. Selon la presse belge, il a introduit une plainte en référé devant la justice bruxelloise, début avril, afin d'avoir accès aux dossiers le concernant en Belgique et d'en obtenir copie. Il s'agit, affirme la même source, de cinq dossiers pénaux concernant 6 assassinats commis en Belgique dans les années 80 -et pour lesquels il est d'ailleurs aussi poursuivi au Maroc- et d'un dossier terrorisme du Parquet fédéral. Selon sa défense, «Belliraj voudrait les utiliser dans le cadre de sa défense au Maroc. Le juge des référés se prononcera dans le mois». Selon son avocat, «Belliraj risque la peine de mort mais dans les dossiers belges, il y a des éléments qui le disculpent. Le Maroc ne dispose que de 1.000 pages de dossier et n'a voulu en traduire que 128». L'avocat, cité par la même source, estime que « la justice belge doit lui fournir les dossiers complets afin que son client puisse assurer valablement sa défense». Les avocats du ministre de la Justice, cités également par la presse, affirment pour leur part que «la Belgique a fait parvenir les dossiers dans leur totalité au Maroc et que c'est à ce niveau que Belliraj doit aller réclamer».