Le ministre de l'Enseignement supérieur a déclaré récemment qu'il faut en finir avec la gratuité de l'enseignement dans le public. Idem pour la notion d'ancienneté pour la promotion des enseignants. Une mesure qui semble ne pas faire l'unanimité. « Nous irons jusqu'au bout, mais en privilégiant la pédagogie et la concertation. », a déclaré Lahcen Daoudi (en médaillon). La déclaration a fait le buzz sur la toile. « Il faut en finir avec l'absurdité du tout-gratuit à l'université ! » Cette déclaration vient en exergue d'un entretien que Lahcen Daoudi, ministre de l'Enseignement supérieur a accordé à nos confrères de L'Economiste. Or, plusieurs interrogations restent sans réponse à ce propos. S'attaquer à la gratuité de l'enseignement dans le public suppose un courage indomptable. Si cette question engendre encore et toujours chez la majorité un niet indiscutable, le ministre de l'Enseignement supérieur compte bien contrer toutes les voix récalcitrantes. « La différence est qu'avant, on disait «on va faire » sans agir, mais nous, nous l'avons fait. Sur la question de la suppression de la gratuité pour tous dans l'enseignement supérieur, nous irons jusqu'au bout, mais en privilégiant la pédagogie et la concertation. », a déclaré le ministre. Une réforme au cas par cas Mais, du côté du défenseur des droits de l'Homme, Abdelhamid Amine, vice-président de l'AMDH et sympathisant de l'UNEM (Union nationale des étudiants marocains), les choses sont vues d'une autre manière. « La gratuité de l'enseignement est une chose indispensable. Elle assure la continuité de l'enseignement aux souches les plus démunies. Cette mesure risque aussi de renforcer le caractère élitiste de l'enseignement supérieur et pousser les personnes à faible revenu de se contenter de la formation professionnelle, chose qui n'est pas très souhaitable. », nous déclare Amine. Or, le ministre qui a une page officielle sur Facebook a tenu à préciser par l'intermédiaire de son cabinet que « Le message de Monsieur Lahcen Daoudi était bien clair : ‘il est temps que les ménages qui ont les moyens puissent apporter une contribution à l'effort de la collectivité.... Merci de cesser la déviation du sens qu'a précisé Monsieur le ministre. », peut-on lire sur le mur de la page. Autre bémol par contre, cette fois concernant les critères qui vont être considérés pour faire la distinction entre un ménage qui a les moyens et un autre qui n'en a pas. Le ministre rétorque dans la même interview : « Vous savez, être riche c'est très relatif. Il ne faut pas uniquement se contenter de critères liés au revenu mais prendre en compte la composition du ménage : le nombre d'enfants, les charges par personne, etc. Les situations seront traitées au cas par cas avec une possibilité de recours pour contester son statut. Il ne faut surtout pas s'enfermer dans des critères rigides. », a-t-il précisé. En tout cas, cette réforme que connaîtra le secteur de l'Enseignement supérieur figurera certainement dans la prochaine loi de Finances. D'après le ministre, cette réforme concernera dans un premier temps les études en médecine et les grandes écoles... L'ancienneté toute seule ne paiera plus Autre dispositif, le ministre compte abolir la notion d'ancienneté. Le ministre annonce qu' « il est indispensable d'augmenter les capacités et en finir avec le système de promotion des enseignants sur le critère de l'ancienneté et le substituer par un système d'avancement basé sur la production de la recherche. Les nouveaux critères vont comprendre le nombre de publications dans les revues spécialisées. Nous allons créer un nouveau statut « D »pour les professeurs dans lequel la progression se fera uniquement sur la base de la recherche. La notion d'ancienneté devra progressivement disparaître. ». Une déclaration qui ne contente point Abdelhamid Amine. Effectivement, rappelons que le Maroc est signataire du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 3 mai 1979. Dans cette convention internationale, la promotion des salariés est ratifiée sur la base de l'ancienneté, des acquis et des compétences. « Nous ne sommes pas d'accord. C'est une mesure impopulaire qui a simplement comme but la restriction des dépenses de l'Etat. Les premiers concernés sont les étudiants et les enseignants et nous sommes avec eux pour la lutte. », conclut Abdelhamid Amine. Le Syndicat nationale de l'enseignement supérieur (SNESUP) qui est censé réagir à cette réformette est resté injoignable... Gratuité totale L'enseignement supérieur public au Maroc est gratuit depuis que le pays a recouvert son indépendance. Les étudiants peuvent en plus bénéficier d'une bourse de l'Etat. Cette bourse est octroyée selon des critères très précis. Les seules formations payantes concernent certains masters spécialisés lancés par des écoles publiques de spécialisation (EHTP, ISCAE, ENCG…). * Tweet * * *