Transparency Maroc a rendu public le dernier rapport du CAJAC, son Centre d'assistance juridique anti-corruption. Lors d'une conférence de presse, jeudi dernier à Rabat, les représentants de l'association ont dévoilé les limites de leurs interventions, engendrées par la rareté des réponses reçues de la part des autorités administratives. Michèle Zirari (SG adjointe deTransparency Maroc) et Abdessamad Saddouq, SG de Transparency Maroc. L'ONG Transparency Maroc a dévoilé, lors d'une conférence de presse tenue jeudi dernier à Rabat, le dernier bilan de son Centre d'assistance juridique anti-corruption (CAJAC). Pour rappel, ce centre, dont le premier a été créé en janvier 2009 à Rabat, vise à écouter les victimes ou témoins de corruption, et de leur apporter, si besoin est, un conseil juridique. Après un lancement dans la capitale, avec un premier centre, deux autres CAJAC se sont ouverts à Fès (en septembre 2011), et à Nador (en février 2012). À en juger par les chiffres fournis par l'ONG, les citoyens ont peu à peu eu vent de l'existence de tels centres. Les spots de sensibilisation transmis sur les ondes radiophoniques en sont les principaux vecteurs. « Depuis le 1er janvier 2012 et jusqu'au 30 avril, le CAJAC de Rabat a enregistré 306 plaintes, dont 54 dossiers ouverts », a annoncé Mohammed Ali Lahlou, directeur du CAJAC. Un total de 1 946 plaintes sur trois villes Côté régions, les chiffres ne sont pas aussi éloquents, du fait principalement de leur ouverture récente. « Durant la même période, le CAJAC de Fès a enregistré 33 plaintes dont 9 dossiers ouverts. Entre février 2012 et le 30 avril, le CAJAC de Nador a, quant à lui, comptabilisé 42 plaintes dont 6 dossiers ouverts ». Au total, le nombre de plaintes depuis le démarrage des CAJAC s'élève ainsi à 1 946, tous centres confondus. Parmi eux, 791 dossiers sont en lien avec des affaires de corruption. (manque de transparence, trafic d'influence, abus de pouvoir,…) « Ce sont généralement les services courants, où le citoyen est en contact direct avec l'administration, que Transparency Maroc a enregistré le plus de plaintes. Durant l'année 2011, 15 % des cas ont ainsi concerné les autorités locales et les communes », a indiqué le directeur du CAJAC. Des demandes restées sans réponses Le CAJAC apporte ainsi un conseil juridique aux plaignants, conseil qui se doit d'être complété, le cas échéant, par une enquête effectuée par l'autorité concernée. Par exemple, dans le cas d'une affaire de corruption impliquant un gendarme, c'est l'inspection générale de la gendarmerie royale qui est contactée. « On s'adresse en tant qu'association, à des autorités locales pour leur demander d'apporter quelques éclaircissements. On leur demande d'ouvrir des enquêtes ou de s'assurer de la véracité des faits », détaille le directeur du CAJAC. Ces derniers mois, les correspondances se sont multipliées. La liste détaillée des différentes entités contactées a d'ailleurs été dévoilée hier par Transparency Maroc. Y figurent notamment le Haut commissariat aux eaux et forêts, la Fondation Hassan II des œuvres sociales des agents d'autorité, l'Inspection générale du ministère de la Justice, ou encore l'Inspection générale de la gendarmerie royale. « Entre 2009 et 2010, sur les 10 correspondances envoyées à ces administrations, nous n'avons reçu que 2 réponses. En 2011, 13 réponses ont été données à 31 correspondances. Et entre janvier 2012 et aujourd'hui, les 32 correspondances envoyées n'ont reçu que 6 réponses », a détaillé Mohammed Ali Lahlou. Transparency Maroc ne reçoit au final, des réponses que dans « moins de la moitié des cas », comme l'a déclaré Michèle Zirari, secrétaire générale adjointe à l'ONG. Or pour que l'affaire puisse suivre son cours, il est essentiel de posséder des indices suffisants qu'il existe une corruption ou un comportement qui puisse se rattacher à la corruption. « Nous ne sommes pas chargés de vérifier la véracité des informations données par la personne », insiste Michèle Zirari. La lutte contre la corruption ne pourra donc prendre l'ampleur souhaitée que si les autorités de tutelle jouent le jeu de la transparence. Le citoyen attend des réponses. Un article incomplet Le droit à l'information, comme prôné par Transparency Maroc ainsi que par d'autres associations, a été mis en valeur dans l'article 27 de la nouvelle Constitution. Un article qui commence comme suit. « Les citoyennes et les citoyens ont le droit d'accéder à l'information détenue par l'administration publique, les institutions élues et les organismes investis d'une mission de service public ». Selon l'expert juridique Hafsi, engagé aux côtés de Transparency Maroc, ce texte de loi a été rédigé à la va-vite, et n'a pas englobé l'ensemble des personnes concernées par le droit de l'information. « Nous n'avons parlé que de citoyens, et pas des personnalités morales. De plus, les étrangers sont également exclus de cet article de la Constitution, alors qu'ils ont également droit à cette information ».