Un débat sur les cahiers des charges de l'audiovisuel devait avoir lieu vendredi dernier à la Chambre des représentants. Mais une interruption imposée par le calendrier du ministre de la Communication a dérangé les députés. Mustapha El Khalfi, ministre de la Communication Un report inattendu à un débat très attendu. Venus plus nombreux que d'habitude, ce vendredi 27 avril, pour participer à la rencontre organisée par la Commission parlementaire de l'enseignement, de la culture et de la communication sur les cahiers des charges de l'audiovisuel, les députés en sont sortis bien plus tôt que prévu. Que s'est-il passé ? Les députés, dont les groupes parlementaires avaient réclamé par voie d'une demande écrite la tenue de cette rencontre estimant avoir été « écartés » du débat houleux autour de ces cahiers des charges, ont refusé de se soumettre à l'agenda du ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi. La présidente de la Commission parlementaire, Gajmoula Bent Abbi (PPS), a prévenu les parlementaires qu'à la suite de l'exposé du ministre, la séance sera suspendue à 12h15 pour reprendre à 14h30, heure à laquelle les groupes parlementaires prendront la parole pour faire part de leurs remarques et suggestions. Mais, ce qui a dérangé les députés, c'est l'annonce d'une nouvelle interruption vers 16h00 en raison d'un engagement pris par Mustapha El Khalfi devant participer à une conférence de presse. Une absence qui ne devait durer que 45 minutes, d'après la présidente de la Commission proposant aux membres la reprise du débat au retour du ministre vers 17h. Pour les députés, « un programme saccadé ne peut être favorable à un débat de cette importance ». USFP, PAM, RNI, MP, PI, PPS…, les parlementaires de l'opposition comme de la majorité se sont accordés à revendiquer un report de la discussion au mercredi 2 mai. La présidente de la Commission, mettant l'accent sur le retard que pourrait accuser ce débat, a, pourtant, proposé un report au lendemain, samedi 28 avril. Mustapha El Khalfi n'y a pas vu d'inconvénient, mais les députés n'étaient pas du même avis. Ils n'avaient aucune intention de sacrifier leur week-end pour « se plier à l'agenda du ministre ». Bien plus, certains n'ont pas hésité à critiquer ouvertement « le mauvais timing » proposé à ce débat. En réponse, Gajmoula Bent Abbi a précisé que la Commission a bien été prévenue, la veille, par le cabinet du ministre de cet engagement imprévisible dont la durée était limitée. L'impatience des députés ne les a pas empêchés, toutefois, de préférer de retarder encore plus le débat, une manière, pour eux, d'exprimer leur déception et leur colère. C'est donc à l'unanimité que la Commission parlementaire devait se soumettre en déclarant officiellement le report au mercredi matin. « De la provocation » « Pour nous, la programmation de ces rencontres, que ce soit celle du mercredi dernier ou celle d'aujourd'hui, n'a toujours pas réussi à mettre cet événement dans le cadre d'un réel débat entre l'ensemble des parties », regrette Ahmed Zaïdi, président du groupe parlementaire de l'USFP. À son sens, cette rencontre devant être interrompue à deux reprises, pour la prière et pour permettre au ministre de tenir son engagement, « n'est pas sérieuse ». «Avec un programme pareil, les députés ne peuvent s'exprimer comme ils le souhaitent d'autant que le sujet est épineux et que nous ne sommes pas d'accord sur tout ce qui a été dit par le ministre », explique ce parlementaire de l'opposition à la sortie de ce débat écourté. En exemple de ce qui dérange l'USFP, les marchés publics. « Il a été dit que les chaînes de télévision faisaient régner l'anarchie en ce qui concerne les marchés publics, mais ce n'est pas vrai. Il y a une exception permettant au gouvernement d'établir ces contrats qui ne sont jamais signés à la dernière minute», lance Ahmed Zaïdi, précisant que son groupe parlementaire a examiné minutieusement les cahiers des charges précédents et actuels. « Nous avons constaté effectivement une amélioration, mais il ne suffit pas de vouloir améliorer, ce qu'il faut, c'est de savoir ce qu'on veut en faire », estime-t-il. Ce qui dérange également ce parti de l'opposition, c'est le rôle du ministre de la Communication dont les décisions n'ont pas toutes convaincu l'USFP. « Nous devons en connaître les véritables raisons sous-jacentes, parce que le ministre est un homme politique, pas un technicien », indique Ahmed Zaïdi soulignant que son parti réitère sa volonté de soutenir tout effort qui s'inscrit dans la transparence, à l'Etat de droit et aux respects des lois. « Ce débat ne doit aucunement pencher vers une partie ou une autre. Il est celui de toute la société », rappelle-t-il. À chacun ses attributions, les parlementaires veulent que les leurs soient « mieux pris en compte par le gouvernement ». El Khalfi : « Jugez-moi, mais sur la base de la Constitution ! » Durant son exposé aux parlementaires, vendredi 27 avril à la Chambre des représentants, le ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi, a tenu d'abord à mettre un terme à une rumeur. « Je vous rassure, je ne démissionnerai pas et je resterai un défenseur acharné de la mise en œuvre de la Constitution (…) Mon vœu est que le débat sur ces cahiers des charges soit public et exaucé », déclare-t-il aux députés. Considérant que sa mission est accomplie, El Khalfi a déclaré que les cahiers des charges relèvent désormais du ressort du gouvernement qui devra trancher, mais qu'il est toujours possible d'y apporter des modifications « en adéquation avec la Constitution ». Le ministre a également profité de l'occasion pour souligner les efforts consentis par son département, et plus particulièrement la direction des études appelée à concevoir, pour la première fois les nouveaux cahiers des charges. « Nous ne disposions que de deux mois pour y arriver et nous en avons fait notre défi », lance-t-il avant de rappeler que la HACA n'aurait jamais approuvé ce travail s'il manquait aux principes de la Constitution et de la bonne gouvernance. « Notre but n'est pas de menacer les acquis, mais de les renforcer », affirme-t-il, appelant ses adversaires à le juger sur la base d'une seule référence : la Constitution.