Le ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi, dévoile les détails de la crise de Soread 2M et son parti appelle à l'ouverture d'une enquête sur la mauvaise gestion financière de la deuxième chaîne. Mustapha El Khalfi a exprimé son inquiétude quant à la situation financière de la chaîne de Aïn Sebaâ. C'est un homme convaincu et convainquant qui réitère son militantisme pour la réforme du champ audiovisuel coûte que coûte. Le débat autour des cahiers des charges, qui a fait couler beaucoup d'encre ces derniers jours, n'a pas laissé insensible les parlementaires en ayant fait l'objet central de leurs questions orales, lundi après-midi au Parlement. A l'occasion, le ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi, a exposé en chiffres les détails d'une crise intestine d'où peine à sortir 2M. La grosse faillite Interpellé par son parti, le PJD, sur la situation actuelle de Soread 2M, El Khalfi décrit une véritable débandade. « Soread 2M a vu le jour en 1989 et en 1996, elle est devenue la propriété de l'Etat qui en détient 71,7 % du capital. Le problème, c'est que ses recettes proviennent uniquement de la publicité », indique le ministre avant de souligner son inquiétude quant à la situation financière de la chaîne d'Aïn Sebaa. « Le capital de la société de 302 millions de dirhams n'est plus que de 21,7 MDH, soit une baisse de 93%. N'importe quel actionnaire, aujourd'hui, pourrait revendiquer la faillite judiciaire, d'autant que les dettes ont atteint 229 MDH et ceux de la trésorerie 144 MDH », reconnaît le ministre. Une faillite face à laquelle le soutien de l'Etat semble être insuffisant. « En 2010, le gouvernement avait signé un contrat-programme avec Soread 2M dans lequel il s'est engagé à lui octroyer 250 MDH par la voie d'un compte courant. A ce jour, nous avons transféré 215 MDH étant donné qu'à partir de 2011, la société a commencé à réaliser des recettes dont le montant serait, selon nos prévisions, de 6 MDH. Mais ce qui s'est produit, c'est le contraire : le déficit s'est creusé encore plus en 2011 atteignant 121 MDH. Le chiffre d'affaires a connu une baisse de plus de 9 % », regrette El Khalfi. Et de préciser que le gouvernement actuel a injecté 215 MDH à la société avec laquelle il a signé un contrat-programme dont « elle n'a pas respecté les engagements ». Les banques ne veulent plus de 2M Pour le ministre, cette situation de faillite nécessite un effort exceptionnel. « Les dépenses ont augmenté de 10 %, tandis que les recettes des publicités ont reculé. Nous avons perdu, entre 2010 et 2011, environ 70 MDH de ces recettes. Si rien ne change, durant cette année, le déficit devra se chiffrer à 37 MDH », tient à souligner le ministre légitimant la contrainte du gouvernement de retirer les 215 MDH du compte courant pour les injecter au capital de la société afin de lui permettre de verser les salaires de ses employés. Mustapha El Khalfi tient aussi à préciser que les banques ne veulent plus accorder de crédit à Soread 2M dont la crise s'aggrave malgré le soutien de l'Etat tout au long ces dernières années. « En partie, cette situation est héritée de la période précédente. A mon arrivée, j'ai trouvé le rapport de la Cour des comptes et celui de l'Inspection générale des finances sur la gestion financière. Je les ai soumis à l'étude pour trouver des solutions », déclare-t-il. Pour le groupe parlementaire du PJD, toutes ces données ne peuvent que légitimer une revendication, celle d'ouvrir une enquête sur l'éventuelle mauvaise gestion financière. Plus que cela, le groupe Pjdiste appelle son ministre à agir pour mettre un terme au « scandale des cahiers des charges » et de dévoiler la liste des sociétés bénéficiaires des marchés de la publicité et de la production. Le député de l'Istiqlal, Abdellah Bekkali, estime aussi que certains responsables de la chaîne ont commis des dérives, leur conseillant de démissionner au lieu de demander le départ du ministre. Bekkali a même loué la valorisation de la religion au sein des chaînes « sans que cela ne soit lié à une idéologie politique », tient-il à préciser soulignant la liberté du culte. Un débat et une concession Au Soir échos, Mustapha El Khalfi déclare que le débat suscité au sein du Parlement, que ce soit du côté de la majorité ou de l'opposition, reste « constructif et productif ». Et à la demande quasi générale d'élargir ce débat auprès des groupes parlementaires, le ministre annonce qu'une commission réunissant députés et société civile devra bientôt procéder à « l'examen du sujet d'une façon positive ». « C'est la première fois que les médias publics font l'objet d'un débat de société. Je suis d'accord avec les critiques de l'opposition qui ont porté, pour la plupart, sur les ressources humaines, les contrats-programmes et les besoins financiers. Quant à d'autres, elles sont, pour moi, alimentées seulement par l'ignorance du contenu des cahiers des charges et c'est pourquoi je ne cesserai d'inviter à leur lecture avant d'en discuter », indique le ministre pour qui l'approche participative reste la ligne de conduite à laquelle il reste fidèle.