C'est d'une « relation d'intimité » maroco-française dont Alain Juppé a fait l'éloge, ce vendredi, à Rabat. Le chef de la diplomatie française et son homologue marocain, Saâd Dine El Othmani, partagent la même volonté, celle de renforcer les liens bilatéraux à tous les niveaux. « Nous avons des relations exceptionnelles et historiques et cette visite est, pour nous, d'une importance capitale comme le prouve, d'ailleurs, l'accueil réservé à Alain Juppé par le Souverain et par le chef du gouvernement », déclare Dr. Saâd Dine El Othmani, en ouverture de la conférence organisée au sein de son département à l'issue de ses entretiens avec son homologue français. Elargir les horizons Pour El Othmani, il est temps que « l'excellente relation entre les deux pays connaisse un élargissement vers de nouveaux horizons surtout la formation professionnelle et la recherche scientifique ». Elargissement rime avec renforcement des liens antérieurs, les deux pays y sont déterminés économiquement et politiquement. Les deux ministres se sont engagés à améliorer la fréquence des investissements français au Maroc. « Une délégation d'hommes d'affaires français se rendra bientôt dans des entreprises marocaines pour étudier la question », annonce le ministre d'Etat français. Les deux parties devront tracer leurs nouveaux objectifs au cours de la Commission mixte qui aura lieu au deuxième semestre de cette année au Maroc. A ces belles perspectives qui s'annoncent, c'est également la position française vis-à-vis du dossier du Sahara qui conforte le Maroc. Soutien indéfectible Les entretiens bilatéraux y ont accordé le plus grand intérêt, à l'approche de l'ouverture des négociations au Conseil de sécurité en avril. « La position marocaine vis-à-vis du conflit du Sahara me semble être la bonne base réaliste pour sortir du statu quo », estime Alain Juppé se réjouissant de l'apaisement suscité par « le réchauffement des relations entre le Maroc et l'Algérie ». Pour le chef de la diplomatie française, le plan d'autonomie reste la solution la plus « réaliste » pour avancer et briser « le statu quo » stérile pour tout développement dans la région. Mais il affirme qu'en ce qui concerne la concrétisation de ce plan, la France ne peut pas, à elle seule, se substituer aux différentes parties liées au dossier. Le ministre d'Etat exprime, par ailleurs, le souhait de la France de « voir l'UMA se renforcer dans l'intérêt des pays du Maghreb et du nord de la Méditerranée » et « le Maroc relancer le projet de l'Union pour la Méditerranée ». Le soutien de la France au Maroc pèse également lourd au sein de l'Union européenne. Le Maroc lui doit une fière chandelle dans le renouvellement de l'accord agricole et s'attend à un appui comparable pour ce qui est du secteur de la pêche. En tout cas, Alain Juppé promet que la France ne ménagera aucun effort pour permettre au Maroc de profiter d'un « Statut avancé plus avancé ». Mieux organiser l'immigration La question de l'immigration est une priorité dans les relations bilatérales, surtout à un moment où la France aspire à mieux gérer la problématique. « Nous accueillons chaque année 180 000 immigrants légaux supplémentaires. Compte tenu de la situation actuelle en France où le taux de chômage est élevé, nous avons du mal à intégrer les immigrés », reconnaît le chef de la diplomatie française. Et d'ajouter que l'Hexagone est le 3e pays du monde d'accueil des étudiants étrangers, dont 30 000 proviennent du Maroc. « Nous avons amélioré les conditions d'obtention du visa, 90 % des demandes sont acceptées », affirme Alain Juppé, précisant que des facilités seront accordés aux fonctionnaires détenteurs de « passeport de service » qui pourront être dispensés du visa. Pour le ministre français des Affaires étrangères, l'immigration sera dorénavant mieux organisée dans la mesure où les candidats doivent disposer d'un minimum de garanties devant leur assurer une pleine intégration. Le candidat devra ainsi disposer d'un emploi, d'un logement, maitriser la langue française et partager les principes de la république française pour pouvoir immigrer. « Toutes ces informations sur le candidat, nous les obtiendrons par le biais de nos services consulaires et ambassades. C'est une procédure qui est appliquée dans d'autres pays comme la Grande-Bretagne », explique Alain Juppé. En attendant, les deux pays joignent leurs efforts pour la lutte contre l'immigration clandestine. Des opérations de réadmission sont prévues dans ce cadre. Le Maroc compte aussi sur une coopération triangulaire Maroc-France-Afrique pour prévenir l'immigration clandestine. Saâd Dine El Othmani ne prône pas l'approche sécuritaire. « Il faut agir dans les régions émettrices de ces immigrés clandestins. C'est un travail de terrain qu'il faut mener d'une manière bilatérale en créant des projets dans ces pays par des co-financements et des expertises. Nous allons bientôt discuter des modalités de cette coopération », promet le ministre marocain. Les deux pays ont du pain sur la planche.