Même si le Parlement marocain a brillé par son absence lors des négociations avec le Parlement européen dans le cadre de la nouvelle mouture de l'accord agricole, le Maroc a eu gain de cause. Ceci a été réalisé grâce aux efforts du ministère de tutelle et des associations marocaines. Le point avec le président de l'un de ces groupements influents, à savoir, Ahmed Ouayach, Président de la Comader (Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural), qui nous éclaire sur les avantages d'un tel accord et les nouveautés de cette mouture. Quelle est votre réaction par rapport à ce vote favorable du Parlement européen ? C'est avec une grande satisfaction et joie que nous avons appris cette nouvelle. Tout d'abord, il y a une lecture politique de ce vote. Le vote est sans appel. Il y a eu une grande majorité qui a voté pour. C'est un signal fort envers le Maroc. Les Européens ont ainsi montré leur volonté de lui apporter leur soutien pour son développement et son rayonnement dans le pourtour méditerranéen. C'est une pierre à l'édifice de l'UPM (Union pour la Méditerranée). De ce fait, on peut ainsi envisager, avec sérénité, l'avenir du statut avancé avec l'UE. Ça ne peut qu'être rassurant ! Deuxièmement, il faut savoir que l'agriculture est un secteur très névralgique dans l'économie marocaine. C'est le pétrole du Maroc, et nous avons consenti des investissements colossaux ces dernières années, dans le cadre du plan Maroc Vert. Cet investissement a abouti à des volumes supplémentaires, puisque la production a augmenté. Alors, on devait avoir des débouchés pour cette production additionnelle. Je voudrais également souligner que ce vote positif aura un impact très positif sur la création de l'emploi. Il y a eu quand même 175 votes négatifs, ce qui n'est pas négligeable… Globalement, le vote du jeudi dénote d'un signal de confiance fort. Toutefois, et j'en conviens, il ne faut négliger les 175 votes négatifs. Vous savez, il y a plusieurs hypothèses mal fondées qui circulent en Europe concernant cet accord. Elles sont lancés par des détracteurs pour provoquer et pour nuire à l'image du Maroc. Egalement, il existe des hypothèses qui sont discutables et le Maroc doit apporter les réponses par rapport à ces points. Comme pour les sujets relatifs au dumping social au non-respect des normes phytosanitaires. Un déficit de communication existe alors… Je ne dirai pas un déficit de communication, mais il faut faire une mise à niveau de notre communication politique et de notre diplomatie. Ce vote a été une épreuve pour notre diplomatie, et c'est celle parlementaire qui a fait défaut. Nous avons passé toutes les étapes avec succès, mais ça coinçait toujours au niveau du parlement. Ceci est une première leçon pour le lobbying marocain. Il n'y a pas de diplomatie sans lobbying ! Comment a été le lobbying marocain ces derniers mois ? Nous avons été très actifs. Nous nous sommes rendus à maintes reprises à Bruxelles. Nous avons rencontré plusieurs hauts responsables et partenaires du public et du privé pour leur étaler nos arguments et communiquer avec eux. Nous nous sommes même rendu chez José Bové 2 fois. Résultat, nous sommes soutenus par plusieurs parlementaires dont plusieurs Français, qui ont défendu notre position. Ceci, sans oublier les efforts considérables de Aziz Akhannouch, ministre de l'Agriculture et de la pêche. Concrètement, qu'apportera la nouvelle mouture en termes de nouveautés ? Parmi les principales nouveautés, nous avons eu une hausse de plus de 50 000 tonnes pour les exportations de la tomate sur 2 ou 3 ans. C'est très important pour notre secteur. Il y aura également une ouverture des frontières quasi-totale pour l'agro-industrie, ce qui favorisera le développement de l'industrie des conserves, par exemple. Globalement, le nouvel accord aura des impacts très positifs en termes de débouchés à l'international pour le secteur et pour la création d'emplois. Même au niveau de nos importations, notre industrie locale sera protégée. La formule gagnante Si l'accord agricole a été retardé à cause des nouvelles clauses du traité de Lisbonne, il l'a été également à cause du Maroc. En effet, le partie marocaine, soucieuse de défendre son industrie locale, a imposé sont point de vue dès le début des négociations. « Il faut protéger les populations locales et notre agriculture. Nous n'avons pas fait de concessions dès le début. Si c'était le cas, l'accord aurait été approuvé il y a 3 ans », nous confie Ouayach. C'est dire que la partie marocaine n'a pas lésiné sur ses méthodes pression pour faire entendre sa voix. Petit bémol, la non-participation des parlementaires marocains à ces tractations. Quoi qu'il en soit, lorsque le Maroc s'est inquiété l'année dernière lorsque certains députés espagnols, français et italiens ont multiplié leurs pressions pour bloquer cet accord; les 13 fédérations les plus imposantes du pays ont multiplié, de leur côté, les sorties médiatiques. Younès Zrikem, président de l'Association marocaine des exportateurs, était même parti loin, lors d'un point de presse, en mettant en otage les autres accords en négociation avec l'UE.