C'est le festival de toutes les passions. Tanger découvre la production filmique marocaine à travers un volume de longs-métrages et de courts, à quantité égale sur l'art duplice et infini du cinéma. Jamais, de mémoire de journaliste, on a autant ri lors du débat qui succède chaque matin aux films présentés en compétition officielle lors du Festival national du film de Tanger. Car le début de cette 13e édition a mis en lumière la jeune école du cinéma marocain dès le 12 janvier dernier, en projetant, au cinéma Roxy, Comme ils disent, un court-métrage réalisé par Hicham Ayouch (tourné à Akchour dans la région de Chefchaouen), suivi de La Route vers Kaboul, une comédie d'aventures de Brahim Chkiri (dont l'intrigue se déroule en partie à Tata, dans le sud marocain). Ayouch-Chkiri, body movie Est-ce le passage par la case Film Industry — qui a laissé à ces deux poulains un goût prononcé pour l'humour et la dérision —qui a relevé l'efficience de ce traditionnel moment de débat, souvent douloureux pour les réalisateurs et réputé déjanté à Tanger ? Difficile de répondre tant Hicham Ayouch et Brahim Chkiri ont développé un jeu improvisé de joutes verbales qui ont tempéré les esprits emportés de l'auditoire, heurté par le propos de Comme ils disent. à travers ce format court, le cinéaste évoque l'homosexualité avouée d'un jeune homme à son père, rigide colonel, dont le monde et les repères basculent irrémédiablement, suite à cette révélation. La séquence de calme succédant à la tempête, le comédien Abdesslam Bounouacha a été salué par l'assistance pour la composition de son rôle, et le réalisateur a convaincu les plus sceptiques, que « chaque être humain a droit à la différence».De son côté, par répliques interposées avec son homologue, Brahim Chkiri, nous embarque durant près d'une heure cinquante de Casa à Kaboul, dans une galerie de portraits à la fois drôles et attachants — sans homosexuels mais avec de faux terroristes et de vrais G.I.E —, victimes d'un quiproquo, à coup de darija et de kalachnikov ; ce qui n'est pas sans rappeler ce qu'un certain Rabelais disait déjà au XVIe siècle, « pour ce que rire est le propre de l'homme ». Et quelle effusion de rires, de remerciements et d'enthousiasme manifesté à l'unanimité par le public tangérois, réunissant, aussi bien la profession que la critique nationale et internationale ! Brahim Chkiri a, de plus, défendu l'usage de la darija dans son film, à ceux qui auraient souhaité du pachtoune, précisant : « Je rêve de faire un western ou un film de science-fiction entièrement en darija ». à travers Comme ils disent, le réalisateur Hicham Ayouch évoque l'homosexualité avouée d'un jeune homme à son père, rigide colonel, dont le monde et les repères basculent irrémédiablement suite à cette révélation. A l'écoute du philosophe Déjà, vendredi 11 janvier, le sociologue, philosophe et écrivain Edgar Morin, Président du jury long-métrage, a animé une conférence autour de sa passion jamais démentie pour le septième art. C'est le souvenir de Georges Méliès, qu'il a évoqué, sa rencontre avec le cinéma, l'Afrique et Jean Rauch, ethnographe et cinéaste français, inspiré par le continent noir, et la Côte d'Ivoire. Edgar Morin a souligné, au cours de son intervention, qu'en dépit du modèle cinématographique imposé par les studios d'Hollywood, une part de cinéastes indépendants y résistera toujours, enclins à exprimer leur art par la renaissance d'autres formes artistiques, telles que le flamenco, exhumé et popularisé par de jeunes cinéastes dans les années 50 et 60.Quelques heures plus tôt, la cérémonie d'ouverture du 13e Festival national du film de Tanger découvrait Le Voyage dans la lune, en version couleur, signé par le héraut du cinéma muet, Georges Méliès. Ce chef-d'œuvre, qui date de 1902, a été restauré par Lobster Films, la fondation Technicolor pour le patrimoine du cinéma et la Fondation Groupama Gan. Si un hommage a été rendu par Martin Scorsese, au cinématographe et à Georges Méliès, à travers son nouveau film, Hugo Cabret, la projection du Voyage dans la lune, nous a ramené à l'inclination de Méliès pour le 7e art et à l'enfance. Et Tanger, propice à l'imagination, reste une cité directement liée à l'image comme source d'inspiration.