Le 1er février 1958, est née la République Arabe Unie (R.A.U), sous la houlette de Nasser et du Syrien Michel Aflak, fondateur du parti Baas. L'idée était de créer un axe fort contre le « péril communiste », d'une part, et la coalition jordano-irakienne, pro-américaine, d'autre part. L'expérience ne durera pas trois ans. L'Egypte, accusée d'avoir voulu annexer les pays associés, en leur imposant une vision plus proche de l'hégémonie que du panarabisme, fait échouer ce projet et, par ricochet, détruit toute velléité de rapprochement entre les pays du monde arabe, pendant plus d'un demi-siècle.51 ans plus tard, la première commémoration de la chute du lâche tyran Ben Ali a été l'occasion, pour les principaux dirigeants arabes réunis à Tunis, de réaffirmer leur volonté de voir émerger ce fameux Maghreb arabe. Simple déclaration ou réelle volonté politique ? Le proche avenir nous le dira. Quel parallèle peut-on établir entre ces deux projets ? La vision et les hommes. Nasser avait le poids pour imposer ses desseins à ses interlocuteurs qui, même s'ils n'étaient pas complètement convaincus qu'il fût le meilleur pour incarner un tel projet, acceptaient, par nécessité, de lui confier les clés de la maison.Aujourd'hui, entre un Marzouki, enthousiaste Maghrébin, convaincu et volontaire, une Libye en recomposition et un projet de fusion entre les deux pays qui se profile ; entre une Algérie qui s'inquiète de voir le centre de gravité de la région glisser vers l'Est, sans pouvoir stopper le processus, et un intervenant-joker, l'émirat du Qatar, qui essaie de peser de toute la force de ses dollars, le risque qu'il faut mesurer est celui de la motivation et des instruments de gouvernance mis en œuvre, pour éviter qu'un projet aussi noble soit détourné de sa portée initiale.Dans cette équation, le Maroc, pays de forte tradition diplomatique, qui a réalisé un parcours sans faute, depuis le début du Printemps arabe, a un rôle important à jouer dans le choix du socle et des objectifs. Ils ne doivent pas être sacrifiés à des considérations de court terme, dictées par des flux financiers ou une volonté politique aux desseins extérieurs à la région.