Le paysage médiatique en Algérie demeure confronté à de nombreux obstacles. Selon la dernière évaluation du Baromètre africain des médias de la fondation Friedrich-Ebert Stiftung, rendue publique en début de semaine, l'absence d'organes de régulation et la caducité de certaines lois encore en vigueur font partie des maux dont souffrent les médias algériens. L'univers de la presse algérienne laisse à désirer. C'est en tout cas ce qu'on peut retenir de la dernière évaluation locale des médias en Algérie. Une évaluation réalisée dans le cadre du Baromètre africain des médias (BMA), une initiative de la fondation allemande Friedrich-Ebert Stiftung qui vise à mesurer le degré d'évolution des médias et notamment de la liberté d'expression sur le continent africain. Cette étude de l'univers médiatique se base sur des critères bien définis par la commission chargée de sa réalisation. Ainsi, à l'issue de cette évaluation on remarque que la liberté d'expression a connu une nette régression dans le pays. La note donnée par la commission concernant le droit à la liberté d'expression en Algérie est de 1,7 sur 5. Cela se justifie par les nombreuses intimidations dont sont notamment victimes les journalistes de la part du pouvoir, selon ce document. Les membres de la commission rappellent qu'en 2001, une violente répression d'une manifestation publique avait coûté la vie à 130 personnes dont deux journalistes. De même, un journaliste du quotidien privé El Watan a trouvé la mort dans de mystérieuses circonstances après avoir mis en cause le président de la Chambre de commerce et d'industrie des Nememchas, une région située à l'Est du pays, dans une affaire de financement du terrorisme et de blanchiment d'argent des groupes islamistes armés. La commission met également en avant l'assassinat de plus d'une centaine de journalistes pendant les années 90. Elle dénonce également le caractère répressif de certaines lois en vigueur qui entravent le travail des journalistes algériens. Aussi, les participants à cette évaluation ont-ils fustigé les nouvelles dispositions du code pénal adopté en 2001 et l'état d'urgence en vigueur dans le pays depuis 1992 qui limitent les libertés de la presse. Par rapport à l'exercice de la profession de journaliste, de nombreux obstacles restent encore à surmonter. L'accès à l'information n'est pas toujours évident même si cela est normalement garanti par les textes. De même, la loi 90-07 contraint les journalistes algériens à livrer leurs sources dans certains cas. La note attribuée par les membres de la commission est de 1,2 sur 5. Le panel a aussi constaté que la société civile «n'est pas suffisamment organisée» pour se servir des médias en vue de défendre ses droits. Ce secteur «Médias et société civile» récolte donc la note de 2,3 sur 5. Le paysage médiatique algérien s'adjuge 1,2 sur 5. Cela se justifie par la concentration des organes de presse dans les mains de quelques hommes d'affaires proches du pouvoir. Il n'y a donc pas vraiment une diversité d'opinions selon le rapport. De même que l'absence d'organes de régulation des médias, notamment de l'audiovisuel, constitue un frein à l'épanouissement du paysage médiatique en Algérie. C'est d'ailleurs dans cette optique qu'une table ronde a été organisée, jeudi dernier, par les professionnels des médias à Alger. «Il est impératif de mettre en place des instances de régulation de la presse nationale qui demeure dans un état pitoyable du point de vue éthique et organisationnel», a déclaré le journaliste Amar Belhimer en marge de cette rencontre. Il a également suggéré la «restauration des deux autorités de régulation, à savoir le Conseil supérieur de l'information et le Conseil supérieur de l'audiovisuel dissout en 1992». Par ailleurs, la commission met en cause le caractère «caduc» des textes qui concernent l'audiovisuel et l'emprise de l'Etat sur le paysage médiatique algérien en général. «Il n'y a pas de législation spécifique à l'audiovisuel. Il n'y a pas d'administration non plus. Ce secteur est directement sous le contrôle de l'Etat», a dénoncé le panel. La commission précise aussi que le niveau de rémunération des journalistes algériens est bas. Cela encourage donc la corruption dans le milieu des médias et met en doute la crédibilité de l'information. Enfin, les membres du panel ont fustigé la quasi-inexistence de syndicat de journalistes dans le pays.