Stratégie militaire : le Maroc élargit sa flotte avec les drones TB-001 de Chine    L'Arabie Saoudite considère l'initiative d'autonomie marocaine pour le Sahara comme l'unique solution à ce différend régional    Sahara : De Mistura fait escale en Slovénie    L'Arabie Saoudite exprime son soutien à la marocanité du Sahara    Construction : les patrons anticipent une augmentation de l'activité au T1-2025    CTM améliore son chiffre d'affaires consolidé à plus de 1,25 MMDH en 2024    ITB Berlin 2025 : L'ONMT renforce la présence du Maroc sur le marché allemand    Etude Mastercard: 74% des femmes marocaines aspirent à créer leur propre entreprise    L'Agence Bayt Mal Al-Qods soutient les enfants orphelins et amputés victimes de la guerre à Gaza    Présidentielle au Cameroun. Des sanctions contre les fauteurs de troubles    Le Maroc en discussions avancées avec Starlink pour le déploiement d'Internet par satellite dans les provinces du Sud    Canada: Les tarifs douaniers US mettent en péril des emplois des deux côtés de la frontière    Le Tchad fixe l'installation du Sénat au 7 mars    Classement FIFA : Les Lionnes de l'Atlas gagnent une place et se maintiennent dans le top 3 africain    Foot français: Un entraîneur de Ligue 1 écope d'une suspension de neuf mois !    Futsal : La FRMF organise un tournoi international en avril prochain    Le Germano-croate Tomislav Stipić aux commandes du MAS    Athlétisme. L'Ethiopie en force aux Championnats du monde en salle 2025    PSG/Liverpool : Achraf Hakimi déterminé à renverser la vapeur lors du match retour    Maroc : Neige et averses orageuses ce jeudi (alerte météo)    La Agencia Bayt Mal Al-Qods apoya a los niños huérfanos y amputados víctimas de la guerra en Gaza    Maroc : Arrestation de deux Polonais recherchés par les Etats-Unis pour trafic de fentanyl    Japon: la pluie freine la propagation du pire incendie de forêt en plus d'un demi-siècle    Commerce bilatéral : une nouvelle impulsion à la coopération entre Rabat et Washington    Youth opportunity II : un nouveau souffle pour les jeunes entrepreneurs    Digitalisation de la facturation : Intelcia IT Solutions accompagne Paragon    Défense: Le Maroc acquiert des drones TB-001 auprès de la Chine    Coupe du monde des clubs 2025 : La FIFA dévoile le pactole    Moscou dénonce le discours de Macron, "déconnecté de la réalité"    Xi Jinping préside une réunion de la direction du PCC pour discuter d'un projet de rapport d'activité du gouvernement    Les Nations Unies mettent en garde contre la répression systématique des défenseurs des droits de l'homme en Algérie    Malgré l'annulation du sacrifice, le débat sur les antibiotiques dans la viande ravivé    Les prévisions du jeudi 6 mars    Les températures attendues ce jeudi 6 mars 2025    Irlande : L'exécutif ignore les appels à reconnaitre la «RASD»    FIFA : Une dotation record de 1 milliard de dollars approuvée pour le Mondial des Clubs 2025    Salé : Cérémonie de réception de six hélicoptères de combat Apache AH-64E    Trafic de drogues synthétiques : Deux Polonais interpellés    Guía turística para descubrir Marruecos durante el mes de ramadán    Le président gabonais met en avant la profondeur des relations avec le Maroc et le rôle de la vision royale dans le rayonnement religieux de son pays    El Jadida : L'ancien hôtel de police un patrimoine en ruine, un héritage en sursis !    Casablanca Events & Animations illumine Casablanca avec un programme culturel et spirituel pour le Ramadan    200 artistes à Fès pour la 28e édition du Festival des Musiques Sacrées du monde    Rougeole : -13% de cas en une semaine, la campagne de vaccination prolongée jusqu'au 28 mars    Appels à projets pour la subvention des associations et instances culturelles, syndicats artistiques et festivals au titre de 2025    Jour 1 – Programmation spéciale Ramadan : Les chaînes nationales dominent le prime-time    Mohamed Benaïssa, l'adieu à «un bâtisseur de ponts» : l'hommage de Youssef Amrani    Fès : Le festival des musiques sacrées sous le signe des « Renaissances »    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Dastara
Publié dans Le Soir Echos le 05 - 07 - 2011

Les Constitutions pérennes sont lapidaires, peut-être même laconiques. Elles disent peu mais bien, pour laisser à la vie publique l'occasion de se développer autour de l'ossature des articles.
Le XIXe siècle est connu pour être le siècle des inventions. Moins connu est le problème linguistique qui en découla. Comment appeler ces signes qui se transmettent, ces machines qui parlent, ces cylindres qui enregistrent ? On inventa foison de mots nouveaux : le télégramme, le gramophone, le phonographe.
Les Orientaux connurent le même problème, quand ils importèrent les inventions des autres. Par exemple, la Constitution. Les Arabes empruntèrent à la langue persane le mot dastour, qui signifie «ordre».
De jeunes intellectuels orientaux apprirent à épeler avec sérieux ces deux syllabes, et réclamèrent, dans l'enthousiasme, des dastour qu'ils préféraient prononcer dostour. La Tunisie, province ottomane, établit la première Constitution dans un pays musulman en 1857. Pour la féliciter, la France la colonisa en 1882. Mais cela ne suffit pas à modérer l'engouement pour le dostour. Le Caire trépigna en 1879, Téhéran en 1905, Istanbul en 1908. Partout des peuples piaffaient d'enthousiasme pour les dostour. On leur en donna. Il n'y eut pas jusqu'au lointain empire chérifien qui apprit le mot en 1908, à l'occasion d'un conflit de famille entre Moulay Abdel-Aziz et son frère Moulay Abdel-Hafid. La France le félicita, comme elle avait félicité la Tunisie.
Depuis quelques mois, les officines où se forgent les opinions publiques arabes promeuvent un verbe nouveau, dastara, «constitutionnaliser». Formé sur le mot dostour, c'est un néologisme au carré, autant dire le symptôme d'un profond malaise. Dastara est le procédé qui permet, à coup d'articles et d'amendements, d'introduire dans les Constitutions des réalités sociales (le sport, le développement…) ou des identifications culturelles (les langues, les ethnies…). Vu comme un gage de démocratie, la dastara créera des Constitutions obèses, boulimiques de toutes les réalités sociales et culturelles, obsolètes sitôt installées.
Croire qu'une inflation constitutionnelle fonde la liberté, c'est demander à la quantité de pallier l'absence d'une conception forte et stricte de la chose publique. Une Constitution n'est pas un catalogue culturel, répertoriant la réalité d'une société donnée. Les penseurs politiques du XIXe siècle précisaient souvent constitution «politique», pour la distinguer de la culture et des traditions du pays, qui sont sa constitution «sociale». Vouloir indexer une Constitution politique, qui est une structure, sur la Constitution sociale, mouvante, c'est prendre le risque de changer de Constitution à chaque génération, au moins, et de diminuer sa crédibilité aux yeux des citoyens.
Les Constitutions pérennes sont lapidaires, peut-être même laconiques – lisez la Constitution américaine, qui date de 1787. Elles disent peu mais bien, pour laisser à la vie publique l'occasion de se développer autour de l'ossature des articles. La dastara, la constitutionnalisation, est en train d'installer dans les espaces publiques arabes en devenir trois croyances néfastes : faire de la Constitution un miroir de la société, son résumé encyclopédique là où elle doit lui fournir un cadre où prospérer ; noyer la question du pouvoir et de la souveraineté dans des considérations culturelles et sociales oiseuses, source potentielle de violences civiles ; habituer l'opinion à des Constitutions périodiques, donc peu crédibles, devant la permanence, l'éternité même, de l'ordre social. Pour se féliciter de l'octroi royal du 17 juin dernier, plusieurs observateurs congratulèrent les Marocains qui allaient bientôt disposer de l'une des meilleures Constitutions au monde, fruit d'un assemblage de pièces rares et d'importations derniers cri. On appela dans les années 1970 les «éléphants blancs» ces usines clé en main, ces infrastructures mirobolantes et inutiles, que plusieurs pays du Tiers-monde, forts de l'argent du pétrole ou du cacao, achetèrent pour meubler les jungles et les déserts. Ils y rouillent encore.
Beaucoup de pays arabes s'offriront dans les mois ou les années à venir de tels éléphants blancs politiques, rédigés dans le consensualisme le plus flou, le plus angélique, en espérant en faire un bouclier contre la gestion des inévitables rapports de force politiques.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.