Le Conseil national d'appui au Mouvement du 20 février propose de déposer des plaintes au profit des victimes des violences policières. Mais la tâche semble bien difficile. Une dizaine, une vingtaine ou plus. Le nombre des victimes des violences policières n'est toujours pas établi, mais le Conseil national d'appui au Mouvement du 20 février (CNAM 20) affirme préparer en ce moment un rapport sur la situation. « Au cours de notre assemblée générale du 11juin, plusieurs de nos membres ont proposé le dépôt de plaintes auprès de la justice », déclare au Soir échos le coordinateur du CNAM 20, Mohamed El Aouni. « Nous n'avons pas encore cette culture de demander réparation à la justice ». Taoufiq Moussaif, membre du Comité de suivi au sein du CNAM 20 « Notre raison d'être a été dictée, dès le début, par notre volonté de soutenir les jeunes du Mouvement du 20 février, de défendre leur droit de manifester de la manière la plus pacifique et la plus civilisée possible. Et c'est pour répondre à ce souci que nous devons, à présent, activer un suivi légal », souligne Mohamed El Aouni. Le CNAM 20 dispose d'un Comité droits humains et justice qui se voit confier cette lourde mission. Constitué d'avocats sympathisants et militants du Mouvement du 20 février, ces derniers auront pour tâche de lancer des procédures judiciaires. Mais, à l'évidence, des difficultés risquent de leur mettre les bâtons dans les roues. « Nous n'avons pas encore cette culture de demander réparation à la justice. L'Association marocaine des droits humains vient de publier une liste de victimes avec toutes les indications nécessaires sur les dates et lieux de l'agression policière ; mais les victimes ne se manifestent pas », regrette l'avocat Taoufiq Moussaif, membre du Comité de suivi au sein du CNAM 20. Ce dernier a, lui aussi, été victime d'une agression commise par les autorités lors de la marche du 22 mai. L'avocat a saisi différents organismes des droits de l'Homme qui ont émis des communiqués d'indignation relatant son cas. « Il est vrai que nous sommes en période de transition et qu'il est temps pour la Justice de donner une leçon. Pourtant, nous sommes encore loin d'aboutir », estime-t-il. Et pour cause, Me Taoufiq Moussaif explique qu'il reste toujours tout aussi périlleux qu'improbable de déposer plainte contre l'Etat marocain pour des exactions commises contre les manifestants. « Dans le droit international, nous pouvons envisager une jurisprudence dans ce sens. J'ai eu affaire à un cas similaire avec le cas d'Adam Mejjati pour qui j'avais saisi la Cour administrative. Résultat : rien ! », s'indigne cet avocat. Et de rappeler qu'étant donné que l'agression s'apparente au délit, les victimes ont cinq années pour saisir la Justice. En attendant les avocats du CNAM 20 poursuivent leur quête. « Trois de mes collègues, avocats, ont déposé chacun une plainte auprès du procureur de la ville de Rabat. A présent, nous devons constituer des dossiers solides pour entamer les procédures en vigueur au profit des victimes. Nous appelons les jeunes du Mouvement du 20 février à nous contacter afin de nous apporter tous les documents nécessaires », annonce Me Naïma Guellaf. Pour le coordinateur de la Coalition marocaine pour la Cour pénale internationale, Hicham Cherkaoui, pour entamer un tel procès, il faudra disposer d'une force et de données statistiques précis. « En octobre, le Maroc devra présenter son rapport sur ses efforts de lutte contre la torture. Les associations devraient mener leur enquête pour pouvoir présenter leur rapport sur le sujet en parallèle. C'est aux associations que revient la décision de saisir la Justice, en tant que partie civile, en vue d'une réparation pour les victimes », précise ce militant. Leïla Hallaoui