Le Parti de la justice et du développement (PJD) a réuni, jeudi soir à Rabat, des spécialistes pour évaluer l'impact des mutations politiques sur les médias. La loi du Facebook l'emporte au moment où la presse partisane s'enlise dans la crise. L'ébullition a conduit à la révolte. Ceux pour qui le pouvoir devait absolument changer de main ont trouvé dans les réseaux sociaux le moyen de créer un média rapide, facile et à la portée de tous les jeunes. Au débat organisé jeudi soir à Rabat par le PJD autour des «Médias face aux mutations politiques actuelles», le célèbre journaliste politique Abdessamad Bencherif a souligné l'importance que revêt désormais ces réseaux sociaux, surtout le Facebook. «Ces réseaux ont détruit la conception traditionnelle des médias. Plus besoin de créer une entreprise, les jeunes se connectent sur leur page Facebook et y restent parfois près de 13 heures. A croire qu'ils y habitent ! », fait remarquer Bencherif. Et d'ajouter que le rôle de Facebook dépasse de loin un simple moyen de communication pour devenir un exutoire où les jeunes se soulagent communément et s'unissent contre l'abus de pouvoir. «Facebook montre à quel point les acteurs politiques sont absents de la scène, qu'ils ne suivent pas l'évolution. C'est pour cela que la révolution a choisi une autre trajectoire pour se faire entendre», analyse ce spécialiste. Ce vent a fini par souffler sur un Maroc où le processus de révision de la Constitution, l'inertie des partis politiques et le Mouvement du 20 février ont été les vecteurs d'une explosion sociale. «Les télévisions nationales et les sources officielles ont tenté d'avorter le Mouvement du 20 février en faisant croire, à sa veille, qu'il n'y aura pas de marche populaire», affirme Abdessamad Bencherif. Mais la force de Facebook, l'autre média, a donné droit aux jeunes qui «ont perdu confiance en la politique et en les médias nationaux». Ce contexte d'ébullition générale dévoile, par ailleurs, la faiblesse d'une presse partisane dont le rôle est sérieusement compromis. «Une remise en question s'impose pour cette presse. Elle a été créée durant l'occupation en signe de résistance, et de l'acteur qu'elle était, elle est s'est transformée en support des conflits politiques aux mains des syndicats avant d'être reprise par le syndicat national de la presse marocaine dans les années 90 », explique Mustapha El Khalfi, membre du bureau politique du PJD et directeur de publication du quotidien «Attajdid». Selon ce professionnel, sur les 500 supports médiatiques que compte le Maroc à ce jour, 14 édités par 7 entreprises gardent une identité partisane. A leur actif, 198 millions de dirhams contre 878 MDH pour la presse indépendante (2008). Côté distribution, la presse partisane émet, chaque jour, 100.000 journaux, mais n'en vend que la moitié. L'indépendante, elle, distribue 486.000 dont elle écoule quotidiennement 350.000 exemplaires. La crise de la presse partisane ne risque pas de disparaître par enchantement. «Il faut relever le défi de la qualité, se rapprocher de la société, trouver une alternative online et motiver l'interaction», insiste Mustapha El Khalfi. Suivre le mouvement, il serait temps que la presse partisane en fasse une priorité. Une page sur Facebook, cela s'impose à la presse comme aux partis politiques. Le PJD a pris le train en marche…