Le dernier rapport de Social Watch est peu amène pour le Maroc. Comme le sont d'ailleurs nombreux d'autres rapports d'organismes internationaux dont la crédibilité est incontestable. Social Watch international, un réseau d'organisations de citoyens engagés dans la lutte pour éradiquer la pauvreté et ses causes, revient dans ce rapport sur les effets de la récente crise financière et économique. Son verdict est sans appel : «le gouvernement (marocain) continue à être plus enclin à protéger le capital qu'à défendre les droits économiques et sociaux des couches sociales les plus défavorisées». Une conclusion qui découle d'une analyse, à travers la lucarne sociale, des mesures prises par le gouvernement pour contrer la crise et faire face à ses effets à moyen et long termes. le faible succès des politiques «anti-crise», encouragées par le gouvernement, aggrave la situation et augmente l'instabilité sociale D'abord, «la dimension sociale du plan contre la crise a favorisé les exportateurs du secteur textile et du vêtement, sans que cela évite des réductions de salaires des travailleurs ou de leurs horaires de travail». Ensuite, «les mesures financières et commerciales n'ont pas eu un grand retentissement en raison de la réticence des banques et du manque de dynamisme des entreprises exportatrices». Et pour finir, «Les mesures censées avoir un caractère social ont à peine empêché la hausse des prix des denrées de base, dont la plupart sont libéralisés, alors que l'augmentation du salaire minimum a difficilement compensé l'augmentation du coût de la vie». Ce qui fait dire aux rédacteurs de ce rapport que «le faible succès des politiques «anti-crise» encouragées par le gouvernement aggrave la situation et augmente l'instabilité sociale». En conséquence, le pouvoir d'achat des salariés et d'une large couche sociale continue à se dégrader. Et cela à mesure que les mouvements de contestation continue de prendre de l'ampleur. «Les syndicats et la société civile formulent de nouvelles propositions pour créer les conditions favorisant un modèle économique et social plus juste», observent-ils. La dernière grève générale dans la fonction publique, observée le 3 mars n'en est qu'une des multiples manifestations. Une réaction de la société qui ne surprend point. «Dans ces conditions, il n'est pas surprenant de voir une recrudescence des luttes syndicales et sociales», explique le rapport. Des mouvements de contestation conduits par «les syndicats, par certaines associations de la société civile et par des coalitions des deux groupes, auxquelles s'ajoutent des membres de partis politiques de la gauche, etc.», note le document. «La combativité renouvelée des syndicats s'explique par la détérioration des droits économiques et sociaux et par l'échec du dialogue social à partir du refus du gouvernement de satisfaire les revendications syndicales de revalorisation des salaires et des allocations familiales, des promotions des fonctionnaires publics et de respect des libertés syndicales ainsi que du droit à la grève, de développement et de protection sociale», observent les rédacteurs du rapport. En ce sens, le document souligne que le Maroc n'a toujours pas ratifié la convention de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Instrument international considéré comme «fondamental» par l'OIT (Organisation internationale du travail). Plusieurs stratégies d'actions collectives ont été déployées. Cela va de la grève, de plus en plus à caractère sectoriel et régional plutôt que national, aux manifestations populaires spontanées en passant par des journées de mobilisation nationale contre la pauvreté et les sit-in initiés pars les fameuses Tansikiates. Le rapport note d'ailleurs la dynamique particulière, par le passé, de ces derniers réseaux. Cependant, «ces mouvements commencent à manifester de l'épuisement et des désaccords internes. Ils poursuivent peu d'actions de proximité face aux populations vulnérables et ils manquent de perspectives politiques». La réaction des forces de l'ordre y est certainement pour beaucoup. «Le gouvernement a réprimé violemment certaines manifestations, par exemple dans les villes de Sefrou et Sidi Ifni», observe Social Watch. Des manifestations des Tansikiates continuent à subir le même sort un peu partout dans le pays. Les objectifs du MCC compromis ? La crise environnementale, engendrée par la pression démographique et par un modèle de développement orienté vers la croissance et l'urbanisation, risque de se traduire en un épuisement des ressources et en la dégradation des moyens de subsistance et des conditions d'hygiène. Un exemple frappant, les récentes inondations, les fortes pluies et les chutes de neige qui se sont produites dans plusieurs régions du pays, provoquant la mort de plus de 40 personnes (bilan incluant l'année 2008 et des six premiers mois de 2009, période couverte par le rapport) et exposant des milliers de personnes à l'indigence et à la pauvreté. En bref, l'impact de la crise multilatérale du capitalisme néolibéral met en danger la réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à l'alimentation, le travail, la santé et l'accès à l'eau, ainsi que le droit à la mobilité. D'autre part, de nouvelles franges de la population risquent de tomber dans la pauvreté. C'est-à-dire qu'au Maroc la réalisation des objectifs du millénaire peut se voire compromise si la crise actuelle persiste et s'aggrave.