«Jack goes boating», titre anglais traduit en français par «Rendez-vous l'été prochain», est une délicieuse romantic lead qui dépasse les banalités de la rencontre entre un homme et une femme, mettant à nu les failles et les craintes de deux individus, projetant leur espoir face à l'objet amoureux. Jack (Philip Seymour Hoffman, acteur du remarquable «Magnolia», ici réalisateur) est un chauffeur d'une limousine ni fortuné ni beau, mais qui conduit les touristes venus découvrir New York, ses luxueuses boutiques et ses restaurants chics. Passionné des tubes de Bob Marley, qu'il écoute en boucle comme une litanie, car «c'est une musique qui véhicule un message positif», il n'a que son job et un couple d'amis dans la vie, Clyde et sa femme Lucy. Grâce à eux, il rencontre la douce et fragile Conny, sur un air de mort et non pas d'amour et de vie. Elle évoque la disparition de son père, c'est ainsi que débute la scène entre Jack et cette femme dont il est d'emblée séduit. Le cinéaste Philip Seymour Hoffman réunit le triangle d'amis autour d'un dîner, dénué de dimension glamour ou romantique, pour laisser place à la force du réalisme. L'échange filmé en plan rapproché enserre tour à tour Jack , Clyde et Conny qui révèle que le croque-mort a tenté de la draguer alors qu'elle enterrait son père… La veine du cinéaste, oscillant entre sentiment tragi-comiques est posée, la valse du rire et des larmes mènera dès lors cette joyeuse comédie, toujours à fleur de vérité. Au fil des séquences intimistes, Jack, le solitaire, l'inconsolable, s'illumine en tombant amoureux de Conny. Elle lui propose de faire une balade en bateau sur un lac à Central Park «un de ces jours». Afin de la séduire, il se fait la promesse d'apprendre à nager et même à cuisiner avec la ferme décision de l'inviter avant six mois, car on est au beau milieu de l'hiver new-yorkais. C'est ici que le génie du titre prend son sens, la version anglaise initiale «Jack goes boating» étant plus forte que la traduction française. Combien de fois, lors d'une nouvelle rencontre, avons-nous rêvé d'un week-end à Florence, Prague, ou Séville ? De se promettre de dîner au Dôme à Paris, de s'embrasser à Venise sur la place San Marco, et de se réveiller avec le murmure des vagues à Saint-Barthélémy ? Loin de considérer la proposition de Conny comme une phrase en l'air, Jack, animé de ténacité, va apprendre à nager plusieurs fois par semaine aux côtés de Clyde. Il va surmonter sa peur de l'eau, et même prendre des cours de cuisine dans l'espoir d'inviter la femme d'âge mûr à dîner. Il rompt ainsi avec sa solitude et ses habitudes de vieux garçon célibataire. Le drame accompagnant la joie, alors que le couple de Jack et Conny prend son envol, celui de Clyde et Lucy bat de l'aile, un profond délitement s'est lentement installé entre eux. La métaphore de ce film prend enfin effet à la dernière séquence : Jack rame sur une barque au fil de l'eau, face à lui se tient Conny…