Le fonds Leon Energy a annoncé, lundi, qu'il va développer un projet-test concernant le schiste bitumineux à Tarfaya. Ce projet fait partie de la phase de développement que Leon Energy réalisera dans les 18 prochains mois et qui comprend, outre ce projet-test, le début des forages de gaz et de pétrole sur les sites de Zag et de Tarfaya. Les travaux de construction de l'usine pilote ont pu démarrer. Le partenariat avec le brésilien Petrobas emprunte également le même cap. Côté ONHYM (office national des hydrocarbures au Maroc), l'heure est au changement. L'office est en train de se doter de son propre laboratoire d'essais selon le procédé Fischer, qui permet de déterminer les quantités d'huile, d'eau et de résidus contenus dans le schiste bitumineux. De même, l'office procède en ce moment à une réorganisation stratégique sur le plan juridique. L'étude commanditée par l'ONHYM devra établir la part entre les activités à conserver en interne dans une logique de service public, celles qu'il faudra filialiser du fait de sa viabilité économique ainsi que celles devant être externalisées. Peut-on parler dès lors d'une nouvelle étape ? Dès que l'on parle de schiste bitumineux en particulier, deux défis apparaissent. Le premier concerne les coûts de production, dont la baisse serait synonyme d'une industrialisation plus rapide de cette ressource non conventionnelle. L'autre défi se situe au niveau d'une maîtrise des émissions de carbone associées au traitement thermique ainsi qu'au niveau des risques de contamination des nappes phréatiques. Sur ces deux points, il semblerait que des solutions ont été trouvées. Situation qui a remis au goût du jour l'exploitation au Maroc du schiste bitumineux qui, en théorie, a déjà établi le fait qu'il pourrait représenter une part non négligeable dans le bouquet énergétique national. Notamment parce que le Maroc est classé au 6e rang des réserves de schistes après les Etats-Unis, la Russie, le Brésil, le Zaïre et l'Italie. La 8e édition de la conférence sur l'Energie, tenue en novembre, a été instructive pour saisir le degré d'avancement du Maroc sur ces deux points et mettre en relief les avancées en matière de process industriels. Actuellement, deux sites font l'objet de sondages : le gisement de Timahdit situé au Moyen Atlas et celui de Tarfaya. Les deux gisements totalisent 122 milliards de tonnes de schistes bitumineux. Si pour Tarfaya, la géodésie des lieux fait peu de cas de l'impact du milieu environnant -désert et rareté des nappes phréatiques-, le gisement de Timahdit ainsi que les zones prometteuses identifiées par l'ONHYM, à l'exemple des bassins d'Aït Oufella El Kbab, du Haouz-Tadla ou encore d'Essaouira et de Ouarzazate, catapultent l'impact environnemental au rang de souci crucial. Risques pour l'environnement, intoxications des nappes d'eau et malaises de santé pour les populations locales figurent en bonne place des craintes logiques citées un peu partout dans le microcosme scientifique. Les industriels se veulent rassurants au même titre que le canal officiel marocain, aidés en cela par le resserrement des règles de forage dont le triple coffrage d'acier cimenté et l'obligation d'effectuer des forages très profonds sont devenus des standards dans l'industrie. Il n'en reste pas moins que l'enjeu est capital. Et pour cause, plusieurs études scientifiques sur cette question ont évoqué la possibilité de pollution des nappes phréatiques. Sans oublier que les eaux de rejet ou les fluides de fracturation (procédé industriel pour l'extraction de l'huile contenue dans le schiste bitumineux) sont considérés, suite aux tests effectués, comme étant toxiques. Le schiste bitumineux produit de l'énergie électrique en Estonie, et dans d'autres pays, à l'exemple du Brésil et des Etats-Unis, les procédés opérationnels sur le plan industriel sont de mieux en mieux maîtrisés. Son adoption au Maroc devra apporter son lot en termes de création d'emplois. «Le principal enjeu sera donc dans l'ingénierie de traitement des eaux de rejets qui nécessite un encadrement réglementaire strict, voire castrateur», conclut un expert marocain en énergie.