Les assises du tourisme version 2010 cristallisent les attentes des opérateurs privés, et beaucoup y voient un sacerdoce aux multiples défis et éventuels aléas qui se dresseront sur leur chemin pour la période 2010-2020. Point cardinal : comment se traduiront sur le terrain les actions d'une stratégie basée sur l'approche «Bottom-Up» en termes d'orientation environnementale, e-stratégie et le rôle des villes moyennes chacune à son échelle? Un casting attendu : les 10es assises du tourisme qui se tiennent aujourd'hui à Marrakech. Un scénario : dévoiler la nouvelle stratégie en la matière à l'horizon 2020, transversale pour l'essentiel. Parmi les leaks qui ont filtré de celle-ci : un objectif de 18 millions de touristes pour 2020, la création d'une haute autorité dédiée au tourisme, d'un fonds d'investissement ainsi que des déclinaisons régionales qui ne seront complètement définies qu'au mois de février 2011, le temps d'achever ce processus interminable de recensement des sites à potentiel. La stratégie se veut surtout comme une continuité du plan Azur qui, selon les officiels, a été concrétisé à hauteur de 92%. Côté chiffres, le tourisme représente en 2010 le tiers des exportations mondiales de services, d'après la Banque mondiale, et l'OMT (organisation mondiale de tourisme) prévoit le nombre d'emplois à l'horizon 2019 à 296 millions. Pour revenir à la stratégie 2020, le tourisme durable, catapulté au pinacle des défis qui attendent le secteur au niveau mondial, devra en constituer l'épine dorsale. Une première certification, Green Globe, soutenue par l'OMT et le WTTC (world travel and tourism council), est accessible depuis septembre dernier aux opérateurs marocains. A côté, ce sont plus de 40 labels et distinctions vertes qui ont vu le jour ces deux dernières années. Parmi leurs credos : conserver les ressources naturelles, respecter l'authenticité socioculturelle du pays d'accueil et mettre en place des pratiques préservant la biodiversité, entre autres. La stratégie 2020 sensibilisera dans ce sens les professionnels marocains à l'impératif de tenir compte des services de tourisme vert et des principes liés à l'écotourisme. Elle va également tenter de procéder à une harmonisation entre tous ces labels. Si la démarche est devenue incontournable, elle n'en représente pas moins un surcoût de 10 à 20%, selon qu'il s'agisse «du secteur hôtelier, des transports ou de la restauration supplémentaire», précise un professionnel de Marrakech. Se mettre au diapason «vert» implique de facto des investissements conséquents pour les opérateurs du secteur. Ce n'est donc pas une initiative telle que Renovotel 2010, dont le budget est plafonné à 500 millions de DH, qui fera réellement bouger les choses. Aussi, afin de permettre à la stratégie 2020 d'atteindre ses objectifs à ce niveau, ne faut-il pas la doter de fonds d'accompagnement et de mise à niveau à la mesure de la tâche ? Côté infrastructures, les chantiers sont conformes, pour leur majorité, aux agendas fixés. Le secteur du tourisme a concentré pour l'année 2010 plus du tiers des projets indexés par la commission des investissements, avec quelque 12,8 milliards de DH. De plus, la multiplication des fonds de placement immobilier et des fonds de capital-investissement a permis d'entrevoir une augmentation rapide de la capacité litière marocaine. Men Atlas, Sienna, Kudla ou encore Qatari Diar en sont les exemples les plus significatifs. A ce titre, la nomination du ministre Yassir Zenagui, un profil rompu au capital-investissement, devrait permettre aux FPI d'atteindre une taille critique sous nos cieux. En attendant, sur les 200 entreprises réalisant 80 % du chiffre d'affaires du secteur, une grande majorité fonctionnent sans prise de participation. Celles-ci sont soit sous le régime du contrat de gestion ou de location, ou bien opèrent dans le cadre d'une licence de franchise. Les inclure dans l'approche des fonds de capital-investissement pourrait les sortir du stress de liquidités qui les pousse à solliciter un allègement fiscal de l'Etat. m-tourisme : le consommateur reprend la main 79% des Français ont recours à Internet pour choisir leur destination de voyage. Un phénomène si dense qu'il fait son apparition dans les Smartphones. En faisant un tour dans les plateformes Web des CRT (Centres régionaux d'investissements) et dans celui du ministère du Tourisme, on se rend compte de la distance qui nous sépare d'une véritable stratégie e-tourisme. Face à l'orientation affichée par le canal officiel, on a du mal à trouver un quelconque contenu qui reflète cette politique de tourisme responsable, vecteur de développement durable. Et pour preuve, aucune base de données sur les petits opérateurs qui pullulent autour du secteur n'y est disponible. Mutualiser l'image de la région sur le Web A titre de comparaison, les départements du Sud Ouest de la France ont lancé une application i-phone doublée d'un site web mobile. En effet, plusieurs villes se sont regroupées, en juillet 2010, pour développer, ensemble, un outil territorial qui permet de proposer une information actualisée et validée par les offices de tourisme et intégrant l'ensemble des opérateurs liés au secteur : Hôtellerie, restauration et transport. En un clic, l'internaute peut accéder aux coordonnées de l'établissement sélectionné, visiter son site Web et passer commande. Pour en prendre la pleine mesure, les Français, premier marché émetteur en tourisme vers le Maroc, ont été 11 millions en 2010, à passer par Internet pour réserver leurs voyages. Au Royaume-Uni et en Allemagne, des marchés ciblés par l'arsenal promotionnel marocain, le taux des candidats au voyage qui ont recours systématiquement au Web a dépassé les 80%. En se limitant à s'arrimer à des OLTA (Agences de voyages en ligne) à l'exemple d'Expedia, la force de vente marocaine n'est pas visible sur le Net. En effet, cet opérateur n'a vendu pour la destination que 80.000 nuitées en 2009 sur un total de 16 millions de nuitées. Ce qui veut dire que sur ces marchés, le Maroc ne cible que les 20% restants. Ce phénomène -qui n'est pas un effet de mode- ne fera que s'accentuer dans les années à venir. Pour preuve, facebook et myspace réunis, totalisent 2,5 milliards de visiteurs par an. Tout y passe : publicité, fan pages et tweets afin de favoriser le développement d'un marché ciblé.Les Smartphones, outil promotionnel du futur En d'autres termes, le consommateur de la prestation touristique a repris le contrôle. Miroitant de facto la possibilité pour le Maroc de desserrer la contrainte des Tour opérateurs. Grâce à Internet, le touriste est presque complétement « out » des chemins balisés par l'industrie mise en place par les TO . Désormais, il va chercher des informations sur le pays, son image, son infrastructure hôtelière mais également sur les prix du transport, des séjours et des produits locaux, avant de prendre sa décision d'acheter la prestation. Dans ce sens, les smartphones se sont avérés plus adaptés à cette nouvelle donne. A juste titre, le concept e-tourisme est en train de céder sa place au m-tourisme, à décrypter Mobile-tourisme. Et pour cause, les smartphones sont entrés dans la course. Le fameux i-phone dispose désormais d'une application i-Travel. D'autres applications permettent un accès interactif de chaque seconde avec le client : La réservation des billets d'avion, d'hôtels et la location de voitures ainsi que l'accès à ces dossiers se fait sur aujourd'hui sur smartphone. Même le suivi des bagages portant des tags RFID -puces servant à localiser les bagages perdus- est accessible sur ces terminaux. En point de mire se profile déjà le Check-in sans file des passagers, un process sur smartphone, où le client reçoit un code barre lui permettant d'embarquer directement sur le vol sans avoir besoin de montrer le billet. Air France fait partie des quelques précurseurs en la matière. En définitive, nos officiels ne doivent pas se laisser enfermer dans une logique exclusive de mise à niveau et voir dans le Web, le canal de distribution par excellence et un outil déterminant pour atteindre les 20 millions de touristes. Guides touristiques sur smartphones, visites guidées sur GPS, informations par Flashcodes deviennent les nouveaux outils de promotion touristique du futur. Au préalable, il faudra donner aux CRT les moyens de gérer les relations avec les prestataires de services spécialisés et former leur staff sur ces nouvelles techniques dans le but de s'approprier cette approche dans ses portées nationale, régionales et locales. N'est-ce pas là aussi qu'on attendait le ministre Yassir Zenagui ?