Bienvenue à Tokyo, également surnommée «The Big Orange». Si on y débarque à fin février-début mars, on constate d'emblée que le pays du Soleil Levant ne l'est pas forcément toute l'année. En effet, en cette période, l'archipel ne bénéficie guère des faveurs d'Amaterasu, déesse du soleil dans la religion shintoïste. Qu'à cela ne tienne, puisque, après 14 heures de vol (du moins depuis Casablanca), le dépaysement est bien sûr au rendez-vous. Ceux qui auront atterri dans l'archipel pour raisons professionnelles préféreront se remettre du décalage dans leur douillette chambre d'hôtel. Ceux qui se trouveraient au Japon par intérêt pour le pays feront fi de la fatigue, l'exaltation de la découverte étant suffisante pour dissiper -momentanément- l'exténuation due au voyage. Et autant le dire tout de suite : tous ceux qui estiment que l'anglais est suffisant pour communiquer vont vite déchanter. En effet, la langue de Shakespeare est très peu parlée au Japon. La jeune génération est en train de s'y mettre de plus en plus, mais il n'est pas rare de croiser des passants à l'allure de cadres dynamiques, et totalement ignorants de la langue anglaise, ou eigo ga comme on l'appelle localement. Décalage culturel à foison Ce qui en soi n'est pas si grave. En apprenant quelques phrases introductives, on arrive à suffisamment capter l'attention de son interlocuteur, qui se «pliera en quatre» pour vous fournir le renseignement dont vous pouvez avoir besoin. Car si les Tokyoïtes paraissent renfermés sur eux-mêmes de prime abord, ils n'en demeurent pas moins aimables et serviables, pour peu qu'on ose les accoster. «C'est la même chose à Osaka. Sauf que là-bas, si les gens voient que vous êtes empêtrés dans un problème, ils viendront d'eux-mêmes vous proposer leur aide», commente Yuriko, étudiante originaire d'Osaka. Il est vrai qu'à Tokyo, vous avez beau être un gaijin (étranger), vous aurez l'impression de passer totalement inaperçu. Et aussi que l'on n'a pas de temps à vous consacrer. Mais si le stress urbain est palpable, il n'en demeure pas moins très différent de celui que l'on peut ressentir à Casablanca ou à Paris. Et pour cause, le comportement de la population est totalement différent. On a beau l'avoir entendu ou lu, le découvrir de visu n'en est pas moins saisissant. La discipline au niveau de la circulation est tout simplement sidérante. Tout le monde s'arrête au rouge, et passe au vert, que ce soit les automobilistes ou les piétons. Chaque conducteur suit scrupuleusement son couloir, avec un alignement quasi-millimétré. Et certains modèles des véhicules circulant ici et là n'ont jamais été aperçus en dehors du Japon. Une sécurité omniprésente Au fur et à mesure que l'on arpente les rues de Tokyo, une foule de petits détails vous assaillent, et l'on se rend compte que le décalage culturel dépasse de loin le décalage horaire. Vous ne verrez jamais, ô grand jamais, une personne qui déambule avec une cigarette ou un sandwich à la main. Les fumeurs se regroupent tous autour de bornes dédiées, disséminées tout au long des avenues, et ce afin que la fumée reste cantonnée en un seul endroit. Et les Tokyoïtes n'ont pas attendu la pandémie H1N1 pour s'équiper de masques de protection. Toute personne atteinte ne serait-ce que d'un rhume en porte, et ce afin de ne pas contaminer son prochain. La vision de passants masqués a de quoi surprendre le premier jour, à croire qu'ils protègent leur anonymat en vue d'une agression. Mais jamais impression n'aura été aussi fausse. «Se faire agresser au Japon ? Il faudrait vraiment l'avoir cherché. Depuis 14 ans que je vis ici, je n'y ai jamais été confronté, et tous mes proches vous diront la même chose», explique J.J, Nigérien marié à une Japonaise. Il est vrai qu'il se dégage de ce pays une incroyable impression de sécurité. Même les rapports entre la police et la population sont très chaleureux. Cela est probablement dû au fait que pendant un certain temps, la police nippone était axée sur la proximité. Ainsi, le poste de police d'un quartier donné était composé d'agents originaires de ce même quartier. Des villes dans la ville Si Tokyo est comparée à une énorme orange, ce n'est pas sans raison. Chaque «quartier» de ce fruit recèle une saveur bien particulière. Les amateurs de grandes franchises et marques internationales se retrouveront dans la zone huppée de Ginza. Les passionnés d'électronique ainsi que de jeux vidéo et de mangas arpenteront sans relâche les rues d'Akihabara. Quant au quartier d'Asakusa, c'est l'endroit idéal pour le visiteur en quête d'articles bien typiques du pays. L'endroit abrite également l'un des plus beaux monuments de Tokyo, le temple de Kannon, qui existe depuis la fondation de la cité. Les férus de mode japonaise déjantée trouveront leur bonheur à Harajuku, haut rassemblement de la jeunesse. Un autre détail qui assaille le visiteur : si les Japonais sont de grands travailleurs, ils mettent également un point d'honneur à évacuer le stress après le boulot. Il suffit de déambuler le soir dans le quartier de Roppongi pour s'en rendre compte. Ce dernier est également l'endroit ou l'on croise le plus d'étrangers, et pour cause : les rues regorgent de rabatteurs pour attirer les touristes en quête d'exotisme, ainsi que les cadres nippons en mal de bien-être. Le karaoké est également très prisé. En y pénétrant, des cris ressemblant plus à des vociférations qu'à des vocalises se font entendre de l'intérieur des boxes privés, afin que le client puisse pousser la chansonnette aussi fort que possible. Et du moment que ça évacue le stress, ce n'est pas grave si ça sonne faux.