La question de l'investissement domine, en tant qu'un indicateur significatif, toutes les réflexions en matière de développement socio-économique. Depuis quelques années, le Maroc en a fait une de ses grandes priorités, non seulement en ce qui concerne l'attraction des investissements directs étrangers (IDE) mais aussi la mobilisation de l'investissement domestique. La création des différentes instances de captage et de canalisation des investissements (CRI, AMDI, commission nationale des investissements) a contribué de façon non négligeable à l'atteinte des objectifs que le Maroc s'est fixés sur ce volet. Selon l'Office des changes, jusqu'en 2007, les investissements directs étrangers (IDE), qui constituent la principale composante du poste «investissements et prêts privés étrangers au Maroc», ont connu une forte augmentation, passant à 37.959 MDH contre 26.070,2 MDH en 2006, soit +45,6%. Mais en 2008 déjà, la donne commence à changer, du fait notamment de la crise internationale. En 2009, le montant des IDE captés par le Maroc serait selon certaines estimations de 25,6 milliards de DH, soit une chute de 46% par rapport à 2007. L'analyse des bilans émis par les différents CRI fait ressortir les effets de cette chute. Les volumes des investissements ont reculé dans presque toutes les régions. Parmi les 11 CRI dont les bilans nous été fournis, seuls ceux de Rabat et Tanger ont pu maintenir une croissance positive grâce aux projets structurants lancés au cours de l'année. Mais le contexte international n'est pas forcément le seul facteur explicatif de cette baisse de performance en matière de captage des investissements. Des lacunes internes aux CRI seraient aussi probablement parmi les causes. Car, selon certains témoignages, nombreux sont les CRI ayant des difficultés de management, ce qui réduit leur efficacité. C'est le cas par exemple de Marrakech qui jusqu'à ce jour, n'a pu publier son bilan d'activité de 2009. Toutefois, de matière générale, l'état de l'investissement en 2009 révèle également des situations assez paradoxales. Alors que les capitaux investis se sont amincis, la création d'emploi et la création d'entreprise, elles, ont enregistré une augmentation significative. Casablanca : À bout de souffle ? La région du Grand Casablanca commence à perdre de ce dynamisme qu'on lui connaissait. En 2009, le poumon économique du Maroc n'a totalisé que 19 milliards de dirhams en volume d'investissements. En 2008, ce montant s'élevait à un peu plus de 30 milliards. Le logement et le BTP tirent l'investissement avec 36%, suivis du tourisme (28%). Les services, censés être la grande spécialité de la région, ne représentent que 12% de l'investissement global. Mais selon le CRI de Casablanca, cette baisse s'explique essentiellement du fait du caractère exceptionnel des années 2007 et 2008, qui ont vu le lancement de projets structurants tels que Casablanca Nearshore Park, Marina de Casablanca, Morocco Mall, Maghreb Steel... Ce qui fait que 2009 n'a accueilli que bien peu de grands projets. Mais si l'investissement a diminué, la création d'entreprises et celle d'emplois continuent quant à elles de connaître une croissance positive. En 2009, 51.282 emplois ont été créés dans la région du Grand Casablanca, soit 29% de plus qu'en 2008. Rabat et Tanger En pleine forme En 2008, la région de Rabat enregistrait à peine 8 milliards de dirhams d'investissement, une année plus tard (en 2009), c'est plus du double qu'elle réalise. Cette performance assez exceptionnelle est en grande partie liée à l'essor que connaît le secteur du BTP vers lequel sont dirigés 87% des investissements. En effet, outre les grands chantiers structurants initiés dans la région, 9 autres projets relevant du secteur des BTP ont été retenus au cours de l'année 2009. Parmi ces projets, et à titre d'exemple, le projet Firdaous d'une valeur 14.250 MDH, initié par le Groupe Addoha et visant la création d'un nouveau pôle urbain à Aïn Aouda, sur un terrain de 650 hectares. Il y a également le projet immobilier du groupe Ashghal Investment, filiale du groupe Gulf Finance House, d'une enveloppe de 1.260 MDH. Mais l'évolution des investissements dans la région de Tanger-Tétouan est encore plus impressionnante. Au cours de l'année 2009, 118 projets d'investissement ont été approuvés dans la région, ce qui porte le volume du capital investi à 42,9 milliards de DH. Cependant, là aussi, c'est le BTP qui s'accapare le gros morceau des investissements, avec 27,3 milliards de DH, soit 64% du volume global. Le tourisme vient en deuxième position, 10,7 milliards de DH et 59% du total des emplois créés au cours de l'année. Selon le CRI de Tanger-Tétouan, cette embellie continuera tout au long de l'année 2010, car d'importants projets sont en gestation, notamment Tanger Med II, Tanger Automotive City et Tétouan Shore. Oujda : La ruée des Russes La région a totalisé un montant global d'investissement d'un peu plus de 3 milliards de dirhams au titre de l'année 2009. Celui-ci est essentiellement drainé vers les BTP (49%), avec 198 certificats négatifs délivrés pour la création de nouvelles entreprises dans le secteur. À côté du BTP, le secteur des services et des loisirs commence également à prendre de l'ampleur dans la région ; en 2009, il a représenté 23%. Parmi les investisseurs étrangers, ce sont les Russes qui jouent le rôle le plus important, actifs principalement dans le secteur des mines et de l'énergie, puis viennent en deuxième position les Français et les Espagnols, en troisième position. Toutefois, l'investissement accueilli par la région de l'Oriental est en grande partie d'origine nationale. L'investissement étranger reste pour l'instant très faible (à peine 2%). Fès : On investit à contre-courant Curieuse situation pour une région qui abrite la capitale culturelle du Maroc. Dans l'axe Fès-Boulemane, ce ne sont pas les activités culturelles ni le tourisme qui drainent l'investissement, mais l'énergie et les mines. Sur le plan quantitatif, souligne le rapport 2009 du CRI de la région, le secteur des Mines et Energies occupe la 1ère place avec 57 projets approuvés, soit 39% du total de ses projets. Il est suivi du secteur de l'industrie qui représente 23% avec 34 projets. Toutefois, en termes de flux financiers générés par les investissements, comme dans le reste du Maroc, le BTP prédomine avec un montant évalué à 6.369,3 MDH soit 59% du total des investissements. Il est suivi des secteurs du tourisme et de l'industrie avec respectivement un montant d'investissement de 2.076 MDH (20%) et de 1.497,7 MDH (14%). En termes d'emplois, contrairement à l'année 2008, où il a été enregistré une dominance du secteur de l'industrie, en 2009, c'est le secteur du BTP qui vient en tête avec 4.268 emplois, ce qui représente 38% du total, talonné par le tourisme avec 3.343 emplois, soit 30% de l'ensemble. Agadir : En repli momentané Au niveau de la région Souss-Massa-Drâa, 249 projets d'investissement ont reçu un avis favorable en 2009, dont 55% liés au BTP et 22% au tourisme. Cependant, en termes d'emplois, le BTP ne génère que 07% du total des emplois créés dans la région. Le secteur minier n'a représenté que 05% des investissements mais 308 autorisations minières on été accordées en 2009 dans la région. Ce qui, théoriquement, laisser présager à moyen terme une redirection éventuelle des investissements dans ce secteur. L'année 2009 a été également marquée par la validation de deux grands projets immobiliers au niveau des provinces de Ouarzazate et de Chtouka Aït Baha. Ces derniers concernent deux nouveaux pôles urbains initiés par le groupe Al Omrane. Le premier projet, d'une enveloppe de 940 millions de DH, s'étendra sur un terrain collectif de près de 318 ha. Quant au second, il sera réalisé sur un terrain de 240 ha, pour un coût global de 898 millions de DH. Plusieurs autres grands projets sont également en cours, notamment dans le secteur touristique, la pêche (Haliopolis) et l'énergie (solaire avec un budget de 9 milliards de dollars US). Cet ensemble de chantiers structurants va permettre à la région de renouer avec le dynamisme qu'elle a connu les autres années en matière d'investissement. Guelmim-Laayoûne-Tadla-Azilal ...se réveillent Ces régions font peu parler d'elles en matière de dynamisme de l'investissement. Cependant, ces dernières années, les CRI de ces régions commencent à faire preuve de performance en matière de mobilisation de capitaux. Guelmim Es-Smara, a clôturé l'année 2009 avec 8 nouveaux projets pour un montant de 102,35 millions de dirhams, même si par ailleurs l'investissement global a baissé de 39%. Le nombre de certificats négatifs délivrés par le CRI a connu certes une régression en 2009, mais celle-ci est timide (-1%), soit 309 contre 313 pendant l'année précédente. La région de Laâyoune, elle, a satisfait 04 dossiers d'investissement durant le premier semestre de l'année 2009, dont 01 d'un montant supérieur à 200 MDH dans le secteur de l'énergie et des mines. Le montant global des investissements s'est établi à 776,20 MDH avec 229 emplois attendus. Au niveau de Tadla-Azilal, le nombre d'entreprises créées par l'intermédiaire du CRI durant cette année a évolué de +7,23%. Ce qui fait 771 entreprises créées avec 1.617 nouveaux emplois déclarés, soit une augmentation de +9,4% par rapport à 2008. Meknès : Tafilalet-Doukkala-Abda Les services et le tourisme gagnent du terrain En 2008, le CRI de la région de Doukkala-Abda a réussi à décrocher une certification ISO 9001 de son système de management. Ce qui, selon le CRI a eu un impact positif sur l'investissement au cours de l'année 2009. En effet, 94 projets ont reçu l'avis favorable durant l'année 2009 dans la région Doukkala-Abda pour un montant d'investissement total de plus de 4068,98 millions de dh. Quatre de ces projets ont été enregistrés dans le cadre des investissements de plus de 200 millions de dh (trois dans le secteur des BTP et un projet dans celui du tourisme). La concrétisation de ces projets, estime le CRI permettrait la création de 2.895 emplois permanents. Mais si, à l'instar des autres régions c'est toujours le BTP qui engrange les investissements, il n'en reste pas moins que dans la région de Doukkala, le secteur des services réalise une bonne percée. Il vient en deuxième position, avec 21,27% des projets ayant reçu un avis favorable et 5,97% des montants d'investissement. Au niveau de Meknès Tafilalet, la répartition sectorielle des investissements classe le secteur du BTP en tête au niveau des montants investis avec 9.414 Mdh, soit 87,9% du total de l'investissement prévu. Mais le tourisme fait également bonne figure et se positionne au deuxième rang avec plus de 427 Mdh. L'Energie et les mines arrive en troisième position avec un montant de 359 Mdh.