La scène se passe dans une banque de la place. Un jeune entrepreneur, tiré à quatre épingles, vient d'essuyer un énième refus de prêt de la part de son banquier. Ce dernier lui a refusé sa demande de crédit pour les besoins de financement de sa petite entreprise. Raison invoquée : son dossier n'est pas «assez solide». Comprenez que sa structure a besoin de plus de garantie. Selon plusieurs témoignages de patrons de PME, un banquier se méfie toujours des petites structures. «Il y a toujours cette appréhension que le demandeur du crédit cache des éléments-clés sur la situation réelle de sa PME», explique ce jeune entrepreneur.Des scènes comme celle-ci, on peut en dénombrer des centaines par jour. Aujourd'hui, au Maroc, si l'on crée sa propre PME, les chances de trouver de l'argent pour soutenir la phase délicate de l'installation et pour, plus tard, la développer, sont minimes. En cause, l'accès au financement, malgré la panoplie de mesures qui existent pour justement développer ces PME. Les banques, encore et toujours À un moment de son évolution, la PME aura certainement besoin de financement. Premier réflexe : les bénéfices (s'il y en a). Ils seront réinjectés dans son activité. Mais au final, ils ne sont pas suffisants, car ses plans de développement dépassent le niveau de son épargne propre. Solution : contracter un crédit. En général, la PME fait souvent appel aux banques, bien qu'il existe d'autres canaux de financement. On pourrait les regrouper en deux grandes catégories : d'une part, les outils de financement de l'investissement (développement de la structure), et d'autre part, les outils de financement de l'exploitation (pour les besoins de trésorerie, le financement des actifs immobilisés...). Pour ce qui est du «Capital développement», plusieurs types d'outils existent, tels le crédit amorçage et le capital risque. On parle également du leasing (pour financer l'achat de biens immobiliers). Il ne faut pas oublier également les subventions étatiques selon le secteur d'activités. L'Agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (ANPME) finance aussi, en partie, des projets de développement de la PME marocaine. Aux côtés du Capital développement, les spécialistes parlent aussi des canaux de financement de l'exploitation. Entendez par là, les outils mis à la disposition des PME marocaines pour trouver du cash, afin de satisfaire leurs besoin de trésorerie (remplir un déficit recettes/dépenses, payer les salaires...). En général, les entrepreneurs font appel aux banques pour régler leurs besoins de trésorerie (les fameuses facilités de caisse). Selon cet expert, on ne recense pas moins de 30 produits bancaires dédiés au financement d'exploitation. D'autres facilités de caisse sont dédiées à un certain nombre de besoins spécifiques (exemple : stockage de la matière première pour les activités saisonnières, achats divers pour un professionnel de l'électroménager...). Blocage sur le plan opérationnel Une panoplie de canaux de financement existe donc sur la place. Sur le plan quantitatif, il existe une soixantaine de produits de financement dédiés aux entreprises. Les jeunes entrepreneurs n'auraient que l'embarras du choix. Mais c'est sur le plan opérationnel que les choses se compliquent. Car tenez-vous bien, seulement 2,5% de ces outils recensés sont utilisés par les entrepreneurs.«Nous avons d'excellents outils de financement pour la PME», indique Rachid Amrani, directeur général d'Original Invest, cabinet spécialisé dans l'entrepreneuriat, l'investissement et la compétitivité des entreprises. Mais toujours est-il que pour avoir accès à ces «excellents outils de financement» il y a souvent des blocages. «Je préfère plutôt parler de méfiance», estime Rachid Amrani. Selon ce dernier, un banquier est souvent méfiant quand il a affaire à des PME qui ne communiquent pas d'une façon permanente et qui «débarquent un jour pour demander des montants importants de crédits». Les jeunes entrepreneurs ne sont pas au courant non plus des outils d'aide qui existent sur la place. Car l'Etat met aussi à la disposition des jeunes structures deux fonds dédiés. L'Etat s'y met également L'Etat avait lancé au début de la décennie, une première réforme de l'aide aux PME. Une réforme dont les résultats ne se sont pas fait sentir. On recense toujours peu de sociétés créées, une maigre croissance des PME (95% du tissu économique) et un nombre important d'entreprises en situation difficile. À cela s'ajoute la dégradation de leurs fondamentaux : faible capacité d'investissement et de financement, un taux d'endettement minime et une petite ouverture sur le marché extérieur. Récemment, deux nouveaux programmes d'aide aux PME «plus ramassés et plus ciblés» ont vu le jour : Imtiaz et Moussanada. Le premier a pour objectif d'accompagner chaque année 50 PME à fort potentiel. L'aide de l'Etat porte sur une prime de 20% du montant global de l'investissement, le tout étant plafonné à 5 millions de DH. Le second quant à lui cible environ 500 PME par an via trois types d'intervention : des programmes fonctionnels transverses, des programmes spécifiques aux différents secteurs et des programmes dédiés à l'informatisation des PME. Pour les deux premiers types de prestations, l'Etat intervient à hauteur de 60% du coût TTC, avec un plafond de 600.000 DH. Quant à l'acquisition de systèmes d'information, son financement peut aller jusqu'à 60% du coût TTC, avec un plafond de 400.000 DH. Moussanada, Imtiaz : 550 entreprises ciblées Le programme Imtiaz (50 PME) ambitionne de booster le financement des projets des PME qui n'auraient pu voir le jour parce qu'elles ont atteint leur limite d'endettement. Pour bénéficier de ces programmes, les entreprises candidates doivent être à jour avec la CNSS, le fisc, inscrites au registre de commerce, avoir le rating qui ouvre le droit à Imtiaz... et présenter un chiffre d'affaires inférieur à 100 millions de DH. Il faut également passer par les plateformes de rating des banques. Celles-ci intègrent les critères quantitatifs en termes de bilan, mais aussi qualitatifs tels le mode de management, l'organisation, la position dans le secteur, le comportement antérieur de l'entreprise. À en croire l'ANPME, tous les secteurs sont éligibles. Pour Moussanada Transverse (500 PME), qui porte sur les fonctions transversales (l'organisation, la stratégie, le développement commercial), il est opérationnel et ouvert à tous les secteurs. Pour ce qui est sectoriel et qui porte sur le cœur de métier, seule l'offre sur le textile-habillement est lancée. Les autres offres, relatives au cuir, à l'automobile et à l'agroalimentaire, seront lancées avant la fin de l'année, selon l'ANPME, en charge des deux programmes. «Il n'y a pas que les banques pour financer les PME» Les échos. Certains disent que la PME marocaine est condamnée à rester petite. Qu'en pensez-vous ? Rachid Amrani : Je ne suis pas de cet avis. Elle le restera, si elle n'a pas de vision, ne communique pas et ne fait pas appel aux experts pour l'accompagner. Un entrepreneur qui s'entête à vouloir tout faire lui-même n'aboutira à rien au final. Il faut adopter un management performant, en faisant appel aux experts et savoir déléguer. Les patrons de PME devraient aussi s'informer des opportunités qu'offre la politique d'ouverture qu'a adoptée le Maroc. Les différents accords de libre-échange offrent d'énormes opportunités à saisir. Pour financer un besoin urgent en cash, les PME font souvent appel aux banques. Pourtant, il existe d'autres outils de financement dédiés aux PME... Nombre d'entrepreneurs continuent à croire, à tort, qu'il n'y pas que les banques pour financer leurs besoins de trésorerie ou de développement. Il faut savoir que les facilités de caisse sont le produit le plus cher proposé par les banques. Ces dernières le proposent en premier à leurs clients, car il est le plus rentable. Pourtant, d'autres produits spécifiques existent bel et bien. D'où l'intérêt de se faire accompagner par un expert pour monter son dossier de financement. Malheureusement, nombre de patrons d'entreprise continuent à croire que les services d'un expert signifient plus de charges. Combien coûterait une telle prestation pour une PME ? Il est difficile de parler d'une moyenne. Les prestations diffèrent selon le nombre de jours et la taille de l'entreprise. Mais en général, les tarifs moyens varient entre 3.000 et 10.000 DH/jour pour un expert.