Des engagements et des promesses. Tel a été le menu de la tant attendue rencontre d'information autour du dernier Plan d'aménagement pour les pêcheries pélagiques. Si l'ensemble des directeurs de départements au sein du ministère de tutelle ont répondu présent, le ministre, lui, a brillé par son absence. Même le fraîchement nommé secrétaire général d'Aziz Akhannouch était de la partie. En tout cas, les cadres présents ont bien détaillé la première déclinaison de la stratégie «Halieutis», pour le développement du secteur des produits de la mer. Celle du plan de gestion des petits pélagiques qui, d'ailleurs, le lendemain de sa publication, n'a pas réussi à faire l'unanimité autour de lui. Comme cela a été le cas pour la stratégie elle- même. En tout cas, ce jour-là, l'équipe du département de la Pêche, venue expliquer les axes du nouveau plan d'aménagement affichait la mine des grands jours. Pour elle, la nouvelle copie est plus affinée et plus complète que l'ancienne (celle élaborée en 2007 par l'ex-ministre des Pêches maritimes, Mohand Laenser). «Le nouveau plan est une continuité de l'ancienne version», indique Zakia Drouich, directrice des Industries de la Pêche maritime et de l'aquaculture. Cette dernière a réfuté l'idée selon laquelle le plan se limite à la zone sud. Selon elle, il n'y a pas lieu de parler de «favoritisme régional». D'où l'appel d'offres d'appoint lancé par le ministère. «Chaque région sera servie par les pêcheries du stock C, en fonction de ses besoins», dit-elle. En effet, c'est la zone C (située entre Boujdour et le sud de Dakhla) et la zone Atlantique B (située entre Sidi Ifni et Boujdour) qui ont eu les quotas de pêche les plus importants (60% et 30% respectivement). Pour l'Etat, ces deux zones sont «sous-exploitées» et «c'est tout à fait normal que les intérêts des opérateurs soient concentrés sur la zone C», fait remarquer Zakia Driouich. Les autres zones (Atlantique nord et Méditerranée) ont, elles, été surexploitées et la ressource y est très rare. D'où la décision du ministère d'affecter des bateaux pour chaque zone. En effet, chaque navire sera sommé de ne pêcher que dans la zone où il sera affecté. Mais comment va-t-on contrôler le respect de ces dispositions ? Un décret verra le jour prochainement pour obliger les bateaux à installer des appareils de «tracking satellitaire». Toutes ces dispositions devraient permettre de générer 8 milliards de DH de chiffre d'affaires, toujours grâce au stock C. Le congelé à bord interdit dans 4 ans L'objectif du ministère est de faire débarquer l'ensemble des pêcheries dans les ports marocains. Le port de Boujdour, opérationnel fin 2010, serait l'un des points de débarquement les plus importants dans la région. Interpellé sur la récente polémique enclenchée par les pêcheurs de Dakhla, Zakia Driouich a tenu à mettre les points sur les i. Rappelons qu'il y a deux semaines, l'Association des industriels et armateurs de Dakhla (Assiap) et l'Association des industriels des produits de la mer de Oued Eddahab se sont fendues d'un communiqué commun où elles fustigent le plan d'aménagement des petits pélagiques. Pour les deux associations, ce plan «ne contribue pas au développement de la région et ne tient pas compte du développement économique de la région». Pour le ministère, le contrat qui lie l'Etat avec les 29 unités de Dakhla porte sur quatre ans, pour leur permettre de congeler à bord des navires (et exporter directement). «Il y a eu reconversion de cet accord à cause de la crise et de l'endettement de ces unités. Leurs quotas en pêcherie poulpière ont ainsi été reconvertis en quotas pour le petit pélagique», explique la directrice des industries de la pêche. Selon elle, congeler à bord des bateaux et exporter directement n'ont aucun impact économique réel sur le Maroc. «Notre ambition est de tout débarquer au Maroc, dans un état frais pour valoriser les pêcheries», poursuit-elle. Quant aux pêcheries crevettières, le département indique qu'un premier diagnostic de cette filière a été établi par l'Institut national des recherches halieutiques (INRH). «Le plan d'aménagement des pêcheries crevettières est programmé. Il sera rendu public courant 2010», annonce-t-on. De moins en moins de crevettes dans nos assiettes La crevette coûte cher au Maroc. Et son prix va doubler dans les prochaines années. En cause, l'absence d'un politique claire et définie pour la gestion de cette ressource. La crevette marocaine est en effet en train de disparaître, à cause surtout de la surexploitation. Pour les professionnels, le ministère de tutelle, via sa nouvelle stratégie, préfère se concentrer sur les pêcheries abondantes. D'où le lancement du plan d'aménagement des petits pélagiques, assimilé à un plan pour «l'exploitation et non la gestion de la sardine marocaine», ironise cet armateur. «Si les plans d'aménagement des autres pêcheries tardent à être mis en place, ce sont tout simplement les activités relatives à ces pêcheries qui cesseraient d'exister», prévient Abderrahmane El Yazidi, secrétaire général du syndicat des officiers et marins pêcheurs de haute mer. En effet, en cinq ans, les captures de crevettes roses ont chuté de 50%, passant de 8.100 tonnes en 2004 à 3.800 tonnes en 2008, selon les estimations des professionnels. En cause, la surpêche et les bateaux crevettiers qui pullulent, malgré le gel des investissements dans les outils de pêche en 1992. «Il n'existe aucun plan de repos biologique pour la crevette et aucune enquête n'a été déclenchée pour connaître les vraies raisons de cette chute», explique cet armateur de la pêche hauturière. Le département de la Pêche promet un plan courant 2010. Les professionnels n'ont qu'à prendre leur mal en patience et...attendre.