Halieutis parle seulement d'un plan pour les petits pélagiques Les pêcheries crevettières ne disposent d'aucun plan et le poulpe est en stand-by La stratégie «Halieutis» pour le développement du secteur de la pêche devait en principe proposer des pistes pour la préservation de la ressource. En effet, partout dans le monde, tous les Etats font un suivi rigoureux de la ressource halieutique, parce que moins abondante. Officiellement, le ministère dit toujours vouloir couvrir l'ensemble des espèces par des quotas, organisés dans le cadre de «plans d'aménagement». Aujourd'hui à 5%, «Halieutis» entend le porter à 95%, toujours à l'horizon 2020. Une déception de plus dans le milieu. Car, durant les deux ans qu'a pris l'élaboration de la stratégie, les professionnels de la mer s'attendaient à ce qu'Akhannouch leur dévoile, lors du Conseil supérieur halieutique, les plans finalisés pour les autres pêcheries. «On ne peut présenter une stratégie sans plans d'aménagement. Taïeb Ghaffes a finalisé le plan pour le poulpe, Mohand Laenser (ndlr : deux ex-ministres de la Pêche) a mis en place celui du pélagique. On s'attendait à ce qu'on nous livre ceux de la crevette, du merlu et du thon», s'indigne ce professionnel de la pêche côtière d'Agadir. Pour investir dans le secteur de la pêche, les opérateurs ont besoin de visibilité. Et les plans d'aménagement servent justement de tableau de bord. Pas de plan pour la crevette Les ressources crevettières sont en train de disparaître. Le constat établi par les professionnels est alarmant. Pour eux, le ministère de tutelle, via sa nouvelle stratégie, préfère se concentrer sur les pêcheries abondantes. Quid de la crevette, du thon et du poulpe ? Leur plan d'aménagement est relégué aux calendes grecques. «Si les plans d'aménagement des autres pêcheries tardent à être mis en place, ce sont tout simplement les activités relatives à ces pêcheries qui cesseraient d'exister», prévient Abderrahmane El Yazidi, secrétaire général du syndicat des officiers et marins pêcheurs de haute mer. En effet, en cinq ans, les captures de crevettes roses ont chuté de 50%, passant de 8.100 tonnes en 2004 à 3.800 tonnes en 2008, selon les estimations des professionnels. En cause, la surpêche et les bateaux crevettiers qui pullulent, malgré le gel des investissements dans les outils en 1992. «Il n'existe aucun plan de repos biologique pour la crevette et aucune enquête n'a été enclenchée pour connaître les vraies raisons de cette chute», explique cet armateur de la pêche hauturière. La gestion des pêcheries poulpières en stand-by Contrairement à la crevette qui n'a pas de plan d'aménagement, le poulpe, lui, en dispose. Et il date des années 2000, suite à l'effondrement de la valeur et du volume de la pêcherie poulpière (-90%, de 120.000 tonnes de poulpe pêchées en 2001, les bateaux n'ont pu débarquer que 12.000 tonnes en 2003), l'Etat avait compris l'urgence de mettre en place des quotas pour les différentes pêcheries. Tout allait pour le mieux, sauf qu'une fois sur le terrain la réalité était tout autre. Braconnage, pêche illicite, manque de contrôle et corruption sont venus à bout des efforts du plan d'aménagement. 60 à 70% des opérateurs de la pêche hauturière sont en redressement judiciaire pour éviter la faillite. Qu'apporte la stratégie Halieutis aux pêcheries poulpières ? «Des généralités !», tonne ce vieux routier du secteur de la pêche. La stratégie maintient en effet le plan existant et n'aborde pas les mesures à mettre en place pour l'évaluer, renforcer les infrastructures et le contrôle. Il était une fois, le plan Laenser... Les stocks de petits pélagiques Nord, Centre A et Centre B ont été largement surexploités dans le passé. Dans une tentative de garantir l'exploitation durable de ces ressources et maximiser les retombées socioéconomiques des filières de valorisation de ces produits, un premier plan d'aménagement du pélagique a vu le jour sous la tutelle de l'ex-ministre de la Pêche, Taïeb Ghaffes. Mais c'est sous l'ère de Mohand Laenser que le plan sera dévoilé aux professionnels. Dans le détail, il s'agit d'un plan de gestion de la pêcherie des petits pélagiques de l'Atlantique Nord et Sud. Pour la partie Nord, ce plan prévoyait un TAC (Taux admissible des captures) à hauteur de 750.000 tonnes par an. Ce TAC était modulable en fonction des évaluations de stock entreprises par l'Institut national des ressources halieutiques (INRH). Le plan délimitait également les zones de pêche et encourageait la modernisation des équipements à bord des navires de pêche. Il a même arrêté le volume des captures destinées aux unités de fabrication de farine de poisson (300.000/an, qui devait passer à 220.000 tonnes en 2010). Le marché de la consommation local devait bénéficier de 300.000 tonnes additionnels. Quant à la partie Sud, le TAC défini était de 1 million de tonnes, tandis que les quotas des projets intégrés (conserves, filetage, fumage...) étaient de 18% du TAC global. Le marché local devait lui se voir accorder un taux de 10% du TAC global. Le plan d'aménagement des petits pélagiques concocté par Aziz Akhannouch va remplacer les mesures et dispositions actuellement en cours pour les captures de cette pêcherie.