Les femmes du monde arabe pourront bientôt crier victoire. Beaucoup de leurs revendications deviennent désormais réalité. C'est en tout cas, sur le plan social, le constat global qui ressort du séminaire organisé samedi dernier par l'association ESPOD en présence de plusieurs grandes militantes de la cause féminine dont Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité, Simone Susskind, présidente de Actions In the Mediterranean et Leyla Khaiat, sénateur et présidente honoraire de l'association mondiale des Femmes chefs d'entreprise (FCEM)... Lors des discussions, différentes preuves ont été avancées pour démontrer que les changements sociaux qui seront occasionnés par le vent de révolution dans le monde arabe vont impérativement de pair avec une évolution irréversible de la condition féminine. «Ceci d'une part, parce que ces mouvements sociaux sont avant tout le fruit d'un ultime sursaut des jeunes et des femmes et d'autre part, parce qu'il ne peut y avoir de démocratie et de justice sociale sans égalité des genres», explique Malika Benouda, professeur de droit à l'université Saad Dahlab (Algérie). Pour atteindre cet objectif, «partout les femmes sont aujourd'hui à pied d'œuvre» a également signalé Simone Susskind, présidente de Actions in the Mediterranean (AIM). En Tunisie et en Egypte, on s'attend à une implication profonde des femmes dans le cadre des nouvelles reformes et la construction de la nouvelle démocratie. En Algérie, les protestations grondant toujours, les réseaux féminins s'activent, et souvent à défaut d'autres moyens d'expression, les femmes deviennent des bloggeuses. Au Maroc aussi, selon Nouzha Skalli, c'est une nouvelle ère qui s'ouvre en matière d'égalité des genres. «Il y a quelques jours, le Conseil de gouvernement a adopté l'agenda gouvernemental de l'égalité 2011-2015, sur lequel nous avons travaillé pendant deux ans. Cet agenda touche neuf domaines prioritaires, avec 25 plans d'action», a expliqué la ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité. La révision constitutionnelle en cours introduira le système de quotas pour les femmes, lequel permettra de tendre vers la parité. Selon la plupart des intervenantes, s'il est indéniable que les combats féminins commencent à remporter de belles victoires, les femmes ne doivent pas pour autant dormir sur leurs lauriers. «Ce ne sont pas les décrets qui changent les sociétés», commente la journaliste Farida Moha. Une analyse également partagée par Nouzha Skalli, qui explique que le Maroc a certes enregistré des avancées significatives en matière d'institutionnalisation de certaines causes féminines, dont l'accès des femmes aux cercles de pouvoir et la lutte contre la violence à leur égard, mais il n'empêche qu'elles continuent à rencontrer d'énormes obstacles. À titre d'exemple, cite la ministre, «Dans les communes (qui étaient un cercle de pouvoir exclusivement masculin) on est passé de 0,5% à 12, 38% de femmes élues au Maroc, mais les résistances des hommes se manifestent encore de manière incroyable. Avec ce taux de 12%, les hommes s'estiment envahs par la gent féminine». Face à ces résistances, les militantes féministes envisagent donc désormais de passer de la protestation à la construction des nouvelles sociétés démocratiques maghrébines, avec un seul mot d'ordre : donner l'exemple à travers l'engagement économique et politique. S.S.M