S'il y a une chose à reconvertir dans l'agriculture marocaine, c'est inéluctablement le parc des abris serres des tomates. C'est en tout cas l'avis des professionnels du secteur. En effet, les structures actuelles sont dépassées et posent énormément de contraintes techniques, tant au niveau du volet environnemental qu'à celui de la protection contre les infections du sol. Forte pluviométrie, chergui ou simple chaleur estivale, l'impact du changement climatique sur la production agricole a démontré des retombées négatives sur la filière des tomates. Preuve en est, la baisse des superficies sous serres durant la campagne agricole 2009-2010 en raison des intempéries, la régression de la production destinée à l'export (367.000t en 2008-2009 par rapport à 293.000t en 2009-2010) et la flambée des prix au niveau du marché local. De nouveaux modèles de serres s'imposent ainsi pour sauvegarder les parts des marchés des produits marocains et améliorer la performance technique de la filière. En tant que troisième exportateur mondial de tomates, le Maroc a exporté cette année vers l'Union européenne, et rien qu'à fin février dernier, 242.000 tonnes contre 222.000 en 2009-2010, soit une augmentation significative de 9%. De l'avis de Mohamed Zahid, fondateur de l'agence Green smile, «l'Europe est gagnante puisque la balance est déficitaire en sa faveur. On importe plus qu'on exporte, heureusement, la tomate est l'un des produits qui arrivent à compenser cette balance, qui est grosso modo de l'ordre de 95%». La tomate marocaine plaît de plus en plus En lien, les producteurs des produits maraîchers marocains sont appelés à diversifier leurs produits en se positionnant sur d'autres créneaux. À ce propos et en dehors des tomates sous abri qui constituent la majorité des produits exportés vers l'Europe, les producteurs marocains sont appelés également à renforcer l'exportation des autres variétés, à savoir la tomate cerise, cocktail, la krappe et le beef qui disposent d'une forte valeur ajoutée dans les marchés étrangers. De surcroît, les tomates marocaines ont commencé à prendre de l'ampleur et à acquérir d'autres parts de marchés surtout avec les exportations vers le marché russe et toute la logistique y afférente. Il est à noter également que les marchés nord-européens sont de plus en plus intéressés par la tomate du Maroc. Signalons par ailleurs que la 2e édition de la conférence internationale sur la tomate, qui sera tenue aujourd'hui, jeudi 24 mars, au chef lieu du Souss sur le thème : «Nouveaux types de serres et techniques de production adaptées au Maroc», mettra en exergue les nouveaux types de serres, les films plastiques, la culture hors-sol, le contrôle climatique et la gestion des maladies et des ravageurs. L'événement est initié par l'agence de consulting en agriculture «Green-smile», avec le support officiel de l'association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (APEFEL). Y.S «La culture hors sol est la meilleure alternative» : Mohamed Zahid, Fondateur de l'agence consulting en agriculture «Green smile» Les Echos quotidien : Pour quelles raisons la culture des tomates sous serre au Maroc est-elle appelée à moderniser ses structures en plastique ? Mohamed Zahid : Actuellement, le parc des abris serres au Maroc est dépassé, il est obsolète et la majorité des abris serres sont rudimentaires. Les structures actuelles ne garantissent pas une protection contre les aléas climatiques, notamment la pluie abondante ayant provoqué pendant la campagne 2009-2010 des problèmes phytosanitaires et une baisse en matière de qualité de production, ce qui a constitué des handicaps pour les marchés extérieur et local. Ce secteur est appelé ainsi à se reconvertir vers des abris serres plus modernes, plus étanches et plus hermétiques, qui protègent les plantes et qui permettent aussi de contrôler le climat pour assurer à la fois la qualité, la régularité de la récolte et le rendement. Etant donné qu'on est le 1er approvisionneur de tomate en dehors de l'Europe, on a des concurrents à l'intérieur de ce continent, en particulier les Espagnols. Notre calendrier de production est semblable, ils ont déjà entamé la phase de reconversion, ce qui constitue une avancée. Nous devons donc fournir l'effort nécessaire pour transformer nos abris serres avant que nos concurrents ibériques nous dépassent. En parlant de la conversion des abris serres, vous faites allusion au type canarien ? Exactement, il faut passer à d'autres serres, plus perfectionnées qu'on maîtrise mieux pour pallier à la contrainte climatique. En parallèle à cet aspect, d'autres techniques de production sont appelées à également se développer, notamment la culture hors sol. Actuellement, on n'a plus la possibilité de contrôler les maladies du sol surtout avec l'élimination du bromure de méthyle, d'où la recherche d'autres alternatives plus utiles. Justement, est-ce que la culture hors sol est une réelle alternative ? Elle est la meilleure. Elle permet de dépasser le problème de désinfection et d'améliorer la production. Le hors sol est pratiquement généralisé en Europe, notamment dans une partie de la production espagnole. Cette technique nécessite une maîtrise de fertilisation, les erreurs peuvent être fatales si les producteurs ne maîtrisent pas la technicité, un seul égarement peut provoquer un degré de salinité élevé et une incidence sur la plante. Au Maroc, au moins 500 hectares sont conduits en culture hors sol, c'est une alternative qui doit être généralisée malgré les difficultés liées à sa mise en œuvre. C'est pourquoi il faut former les ressources humaines et mettre à disposition, le contrôle de tout ce qui est chimique. Quelle importance revêt le secteur des tomates dans le Souss en particulier et au Maroc en général sur le plan de la balance commerciale ? La tomate dans le Souss couvre près de 6.000 hectares, c'est un parc productif extrêmement important. La production globale est de l'ordre de 800.000 tonnes. Le Souss approvisionne le marché local d'environ 400.000 tonnes et l'autre moitié s'exporte selon la quantité produite chaque année vers l'Union européenne et la Russie. On essaie de trouver d'autres marchés alternatifs et pallier à la concurrence espagnole, surtout le bassin d'Almeria, du fait qu'on a un calendrier semblable de production. S'agissant de la balance commerciale, on s'aperçoit que l'Europe est gagnante, on est déficitaire en faveur de l'Europe en matière agricole, on importe les céréales et d'autres produits. La tomate est l'un des produits qui arrivent justement à compenser ou à améliorer cette balance, qui est grosso modo de l'ordre de 95%.