Eric Goldstein, Directeur adjoint HRW-MENA Les Echos : C'est le deuxième rapport que HRW publie, en quelques mois, sur le Maroc... Eric Goldstein : Ce deuxième rapport est plutôt global. Il concerne tous les pays, avec un chapitre qui fait la synthèse des événements de l'année 2009 au Maroc. Le rapport revient également sur la situation des droits de l'homme en Algérie, en Israël, dans les territoires occupés, etc. Plusieurs observateurs affirment que votre ONG ne prend en compte que la version des activistes pro-Polisario au Sahara. Est-ce vrai ? Human Rights Watch soutient le droit à l'expression de tous les Marocains, y compris ceux qui soutiennent la thèse du référendum. Si un Marocain, quelles que soient ses convictions politiques, est par exemple interdit de voyager hors du territoire, alors nous dénonçons cet acte qui viole le droit à la libre circulation. Nous n'avons pas de parti pris pour les uns ou pour les autres. Plusieurs ONG marocaines ont critiqué la pertinence du rapport de HRW sur la liberté d'association au Maroc... Il existe effectivement des associations qui s'activent au Sahara, on ne peut nier cette réalité, mais dès qu'il s'agit d'une association proche des thèses indépendantistes, elle est interdite ou harcelée. Ce qui, encore une fois, ne veut pas dire que toutes les associations sont interdites, ce n'est pas la vérité. D'ailleurs, et comme pour les autres pays, notre bilan de la situation des droits de l'homme est établi sur la base des droits des minorités à exprimer librement leurs positions. Pourtant, les activistes pro-Polisario font un amalgame entre droits de l'homme et action politique. Ils sont aussi accusés d'être financés de l'extérieur... Personnellement, je ne fais pas ce genre de jugement, tant que leurs activités restent pacifiques. Nous ne défendons pas les personnes qui jettent des pierres ou des cocktails Molotov sur la police. Il y a des débordements et des actes de violence et on ne le dément pas. Nous les avons d'ailleurs et à maintes reprises dénoncés dans nos rapports. Quelle est votre position sur l'affaire des sept activistes pro-Polisario qui vont être jugés à Rabat ? Ce qui nous préoccupe, c'est qu'ils sont des civils qui ont été déférés devant un tribunal militaire d'exception. C'est un signe de mauvais augure. Nous allons suivre ce procès de très près et on réagira selon les données qui vont se présenter lors du procès. Pourquoi avoir réservé une partie de votre rapport à l'affaire Chakib El Khayari, le président de l'Association Rif pour les droits de l'homme ? Nous considérons que la condamnation de Chakib El Khayari est injuste. Le Maroc pénalise encore l'expression d'une opinion par des lois répressives. Pour nous, El Khayari n'a fait que dénoncer certains responsables qu'il considérait comme complices dans le trafic de drogue. Ça ne mérite aucunement une condamnation de trois ans de prison et on ne cessera pas de demander sa libération. Human Rights Watch pour la zone Moyen-Orient et Afrique du Nord.