Les exportateurs sont séduits par le marché sénégalais où la demande en oignon, un produit quasi indispensable dans les principaux mets du pays, explose. Toutefois, alors que la pénurie mondiale se confirme, le stock national s'amenuise. La saison des oignons a débuté cette année sur les chapeaux de roue avec une demande mondiale plus forte que d'habitude. Le rythme est tel qu'aujourd'hui certains analystes n'hésitent plus à parler de pénurie sur certains marchés. Bien entendu, c'est une bonne nouvelle pour les fournisseurs dont certains ont eu du mal à satisfaire la demande de leurs clients habituels. Au Maroc, le marché national demeure pour l'instant serein. Les producteurs sont avares en chiffres, mais vu le niveau actuel des prix sur les étals, entre 3 et 3,50 DH, selon les différents régions et quartiers dans les grandes villes, on est tenté de croire que les stocks sont bien garnis, du moins jusqu'en septembre. Dans les mois à venir, il n'est pas exclu que les prix de l'oignon connaissent une hausse importante au Maroc, prévient une source à la Fédération interprofessionnelle marocaine de production et d'exportation des fruits et légumes. Une forte demande au Sénégal Des sources plus alarmistes tablent sur un mois de disponibilité du stock d'oignons sur le marché national. Pendant ce temps, d'autres marchés où la pénurie est devenue une réalité, comptent sur le Maroc pour s'approvisionner. C'est le cas du Sénégal où le prix de l'oignon a connu une hausse vertigineuse. En l'espace de quelques mois, il a été multiplié par cinq, notamment dans la grande ville de Touba où un évènement religieux, devant recevoir quelques trois millions de personnes, aura lieu dans quelques jours, alors que le produit en question est quasiment indispensable dans les principaux plats au pays de la Teranga. Une véritable aubaine pour les exportateurs marocains qui y voient une belle opportunité. Alors que le prix de l'oignon est presque 11 fois plus élevé dans le pays de la Teranga que dans le Royaume, les envois marocains trouvent facilement preneurs. «J'ai récemment reçu deux commandes. Ce sont des clients sénégalais qui sont venus vers moi. Ils ont payé cash», explique Nazir Hassani Alami, un exportateur marocain basé à Fès. «Pour le moment les envois sont modestes, avec seulement deux conteneurs de 20 pieds, mais nous espérons que cette nouvelle aventure sera fructueuse», ajoute l'opérateur pour qui nombreux sont les producteurs marocains qui s'intéressent au marché sénégalais au vu de la demande. C'est d'autant plus intéressant que la Hollande, principal fournisseur du Sénégal, est aujourd'hui confrontée à une vague de chaleur extrême qui impacte ses capacités de livraison. Le pays européen qui peine à honorer ses engagements à l'export, notamment sur le marché sénégalais, fait également face aux coûts exorbitants de la logistique maritime. Ce qui laisse un gros avantage aux explorateurs marocains qui, outre le marché sénégalais, font aussi des envois vers d'autres destinations ouest-africaines. «Nous avons un autre avantage. La qualité de l'oignon marocain demeure très compétitif avec un prix qui reste abordable pour les importateurs du reste du continent», souligne Nazir Hassani Alami précisant que les Sénégalais sont friands de l'oignon rouge, une des spécialités des producteurs marocains. Reste que le Royaume n'est pas épargné par les vagues de chaleur et les prix vont certainement connaître des hausses, selon les prévisions des spécialistes dans ce contexte de pénurie mondiale d'oignon alors que les autorités sénégalaises multiplient les actions pour réguler les prix. De grosses saisies ont eu lieu, la semaine dernière, dans la ville de Touba où les prix ont grimpé jusqu'à 40 DH le kilo. Aujourd'hui, l'Etat veut amener les commerçants à maintenir le prix du kilogramme d'oignon à 12 DH. Ce serait certes une aubaine pour les consommateurs, mais pour les vendeurs les marges seront considérablement amoindries. De quoi décourager les importations dont la fenêtre de tir est extrêmement réduite. Récemment, les consuméristes sont montés au créneau pour inviter l'agence de régulation du marché à veiller à ce que ce dernier soit bien approvisionné et que l'oignon local et l'oignon importé cohabitent pendant un mois. «Je pense que, la recommandation et la leçon à retenir pour toujours, c'est qu'il faut autoriser la cohabiotation entre l'oignon local et l'oignon importé d'au moins un mois. Si on avait observé cette durée-là, l'oignon ne se vendrait pas à plus de 12 000 FCFA ou 13 000 FCFA», soulignait le vice-président de l'Association des consommateurs du Sénégal qui s'exprimait sur les ondes de la radio privée Sud FM. Khadim Mbaye / Les Inspirations ECO