La reprise économique peine à se concrétiser dans le secteur du tourisme. Face aux difficultés, les acteurs du secteur sollicitent le renouvellement des mesures de soutien, arguant que le secteur a besoin de reconstituer les routes aériennes, accélérer sa digitalisation pour gagner en compétitivité, et être à l'écoute des marchés, tout en maintenant des contacts permanents avec les prescripteurs. Traversant l'une de ses pires crises, le secteur du tourisme subit, de plein fouet, les conséquences des fermetures dues à la pandémie et aux dernières mesures restrictives. Alors que le contrat-programme du tourisme tablait sur une reprise progressive de l'activité, la situation actuelle et les récentes mesures restrictives semblent éloigner, jour après jour, les opérateurs du secteur de ces objectifs. «Le contrat-programme, relatif au soutien du secteur du tourisme, signé le 6 août 2020, et son avenant, prévoient des mesures de contingence et des objectifs conçus dans le cadre d'une reprise de l'activité touristique à partir du 2e trimestre 2021. Or, la reprise n'a pas été au rendez-vous au 2e trimestre, et encore moins au 3e, alors que les évolutions récentes de la situation sanitaire au Maroc, et dans le monde, laissent présager un risque social grandissant pour l'industrie touristique du pays, pour le reste de cette année 2021, voire pour le premier semestre 2022», explique Hamid Bentahar, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT). Pour sauver les meubles, les professionnels du secteur montent au créneau. Un courrier a été adressé, dans ce sens, au ministère de tutelle pour le sensibiliser sur la nécessité de prolonger les mesures d'accompagnement jusqu'à fin 2021. «Il est indispensable que nous obtenions le prolongement des mesures de soutien à l'emploi et aux entreprises touristiques jusqu'à fin décembre 2021», souligne Hamid Bentahar. Les perspectives ne sont pas fameuses Après plus de 16 mois de ballottement entre arrêts et reprises, aucune filière du secteur ne s'est vue épargnée. Tous, voyagistes, guides, hôteliers, restaurateurs, transporteurs touristiques... subissent les effets massifs de la crise. Au vu des tendances observées sur le marché, les perspectives ne sont guère réjouissantes. En effet, avec les décisions restrictives adoptées par plusieurs marchés émetteurs, il est probable que l'économie mondiale soit désormais rythmée par des fermetures régulières des frontières, alternées avec des ouvertures épisodiques, sur les 12 prochains mois, ce qui n'est pas de bon augure pour le secteur. Mais le dirigeant de la CNT rassure sur la solidité des fondamentaux du métier. «Le secteur est à genoux, mais il n'est pas mort. L'envie de voyager sera toujours là, toutes les études menées, tant au niveau national qu'international, le prouvent». Stratégie de relance Pour Hamid Bentahar, le secteur a besoin d'une stratégie de relance forte et dotée de moyens suffisants, une volonté affichée des pouvoirs publics et une mobilisation de tous les acteurs. L'enjeu étant de permettre à l'industrie touristique marocaine de survivre, renouer avec la croissance, et retrouver sa place dans l'économie nationale, dans un horizon de 24 mois. «Une stratégie qui devrait mettre tout en œuvre pour aider l'ensemble des acteurs, et les entreprises de toutes tailles, à se relever de cette crise et, au-delà, se projeter dans l'avenir». Les réflexions, déjà menées au niveau des corporations professionnelles du tourisme, prévoient, à très court terme, trois mesures urgentes pour le soutien des entreprises et la préservation des emplois. D'abord, des mesures sociales, comme le maintien du dispositif CNSS, du contrat-programme et son extension au 31 décembre 2021, la révision des échéanciers pour les paiements des charges sociales reportées et dues sur 2020 et 2021, à partir de 2022, avec étalement sur 24 mois. Pour les mesures bancaires, un reprofilage, avec le GPBM, de l'échéancier bancaire à long terme, et enfin le renforcement de l'intervention de la CCG. Pour les entreprises du secteur du transport, il est demandé le report des crédits leasing ainsi que celui du remboursement des crédits contractés par les employés du secteur. La 3e mesure concerne la fiscalité et un moratoire au titre de 2020 et 2021, pour les taxes locales, notamment la taxe professionnelle, au 1er janvier 2022, avec étalement sur 24 mois, sans frais ni pénalités. Nidal Lahlou Président délégué de la Fédération nationale de l'industrie hôtelière «L'état d'urgence est aussi valable pour nos métiers» Les mesures qui viennent d'être prises sont destinées à contenir la propagation du virus. Nous sommes conscients, qu'en plus du vaccin, ce sont les seules armes disponibles, actuellement, pour faire face à ce virus. Bien évidemment, nous aurions souhaité davantage de fermeté concernant l'application des mesures de distanciation, port du masque, jauge, etc. Cela aurait pu, peut-être, nous éviter des mesures aussi radicales. Maintenant, il devient évident que la Covid-19 est encore là, et qu'elle est la maîtresse des horloges. Elle nous imposera des fermetures et des réouvertures. La reprise sera donc longue et difficile, peut être même impossible pour certains établissements touristiques. La pertinence des mesures à mettre en place pour l'accompagnement des métiers, des postes de travail, des établissements touristiques et l'urgence de leurs mises en place seront, sans aucun doute, les clés de la réussite du sauvetage du monde du tourisme. L'essentiel de la réflexion a abouti, et notre référence reste le contrat-programme et les mesures qu'il contient. Nous souhaitons, évidemment, quelques aménagements, notamment l'inclusion de ce «stop and go» que nous impose la pandémie. Quant aux urgences, elles restent les mêmes. À commencer par la préservation des emplois, le prolongement de l'indemnité forfaitaire de 2.000 DH, des mesures fiscales moratoire et des facilités bancaires. En dernier lieu, il faut rappeler que, malgré les difficultés et les perspectives d'une reprise d'activité, sous contraintes sanitaires et limitée au tourisme interne et aux Marocains du monde, les opérateurs ont répondu présent, pour reconduire leurs employés et accompagner le retour de l'activité par des tarifs les privant de toutes marges. L'état d'urgence est aussi valable pour nos métiers, et des mesures urgentes sont à prendre. Modeste Kouamé / Les Inspirations ECO