A la folie. La folie furieuse. Chaque année, je me promets que, quoi qu'il arrive, qu'il pleuve, qu'il grêle, qu'il neige, je n'en parlerai jamais dans mes billets. Je ne suis pas M. Météo, moi! Je ne vais quand même pas, moi aussi, me mettre à parler de la pluie et du beau temps comme une vieille concierge, un retraité de 70 ans d'âge ou un jeune DVD tire-au-flanc ! Mais, à chaque fois, dès les premières gouttes, je ne peux m'empêcher, avec ou sans parapluie, d'y foncer tête baissée. Après tout, un billettiste, même fantaisiste, doit aussi se mouiller. Vraiment, dans ce bled, aussitôt qu'il pleut, si ce n'est pas la catastrophe, on la frôle de peu. Et cette fois encore, comme la dernière fois, dès la première fois qu'il a plu, moi, je n'en pouvais déjà plus. Franchement, j'en ai marre. En vérité, je n'en veux pas forcément à toute cette flotte qui tombe du ciel sans crier gare car, après tout, elle ne fait que son boulot. Et même quand elle tombe amoureuse de notre sol et de nos dalles et s'y installe jusqu'à ce que mare s'en suive, je me dis, au fond, ce n'est pas de sa faute, c'est un problème d'égout. Mais ne me dites surtout pas que l'égout ne se discute pas, parce que ça me met en colère. Et, franchement, je n'ai pas que ça à faire. Donc, vous racontais-je, quand il pleut, je n'en peux plus, et, du coup – pardon si c'est un blasphème - je n'en veux plus. Mais, blasphème ou pas, j'ai l'impression que plus je n'en peux plus et plus il pleut. La pluie me nargue et me raille. Et souvent, malgré mon sang froid légendaire et mon self-control héréditaire, je déraille. En fait, quand je réfléchis bien, la pluie, la pauvre, et quel que soit son débit, n'est qu'un alibi. On lui met tout sur le dos, alors qu'au fond, elle, elle ne nous veut souvent que du bien: nourrir la terre, alimenter les rivières, laver les parterres, remplir les barrages, embellir les bocages et faire pousser les pâturages pour donner à brouter aux moutons et aux vaches et avoir de bonnes côtelettes, du bon lait et du bon fromage. Mais, hélas, la pluie ne fait pas que nous inonder de ses bienfaits. Voulant probablement toujours mieux faire, la maladroite se mêle parfois les pinceaux et se lance à l'assaut de nous autres les Terriens comme une furie en chaleur en pleuvant à seaux. Et là, si jamais elle vous surprend au moment où vous vous baladez nonchalamment crâne décapotable ou cheveux au vent, et que vous n'avez pas de refuge à portée de main, croyez-moi, vous allez vous les geler. Et même si, trempés jusqu‘aux os, le nez qui coule et les nerfs en boule, vous arrivez à vous en sortir, vous avez 9 chances sur 10 d'attraper une cochonnerie. Oui, c'est marche ou crève! Mais, à mon avis, la plus terrible des épreuves et le pire des calvaires, c'est quand, à la fin d'une longue journée, éreinté mais heureux, vous vous mettez au volant pour rentrer chez vous, rejoindre votre cher conjoint, ou bien, si vous avez été un peu volage ou que vous en avez encore l'âge, pour courir vers un rendez-vous galant, et que, c'est à ce moment-là que Dame Pluie sur un arrosoir perchée vous attend au tournant et vous bloque le passage pour un bon bout de temps. Pour être honnête, ce n'est pas elle, réellement, qui fout en l'air la paix des ménages ou qui est l'empêcheuse de draguer en rond. Les vrais responsables, ce sont tous ces imbéciles, mâles ou femelles, qui perdent les pédales et commencent à se conduire comme des voyous et – travestissons le mot - comme des voyelles. Excusez-moi, Madame La Pluie, je me suis trempé.