À la veille du verdict de la Cour européenne sur le recours présenté par les séparatistes pour exclure le Sahara marocain des accords préférentiels, la mobilisation bat son plein au sein de la filière espagnole agricole. Celle-ci cherche à asséner des coups à sa rivale marocaine pour dominer en maître sur ce marché. Et rebelote. Surfant sur cette vague de tension qui secoue les relations entre le Maroc et l'Espagne, le lobby agricole ibérique affûte ses armes dans l'espoir de déstabiliser les exportateurs nationaux des fruits et légumes. Dans cette perspective, le petit syndicat agricole ASAJA (association des jeunes agriculteurs) mène une importante campagne pour faire porter le chapeau de ses déboires aux exportations marocaines. Dans ce sens, l'organisation a évalué les supposées pertes que causent les expéditions agricoles marocaines de tomate dans la région d'Almeria, durant cette campagne agricole. Celles-ci s'élèvent à 25 millions d'euros. ASAJA a considéré que la concurrence déloyale en provenance du royaume est responsable de ce manque à gagner. Ces sorties s'expliquent par le fait que la Cour de justice européenne devrait statuer, sous peu, sur le recours présenté par le polisario à propos de l'intégration des produits en provenance du Sahara marocain dans l'accord agricole signé entre le Maroc et l'Union européenne. En faisant ce tapage, le lobby espagnol espère faire pencher la balance en faveur d'une exclusion des provinces du sud des avantages tarifaires stipulés dans le protocole. Une exclusion du Sahara de l'accord préférentiel en franchise de droits signifiera une rupture du traité de la part des autorités marocaines. Celles-ci n'accepteront nullement que cette partie du territoire marocain soit écartée. C'est le but d'ailleurs des puissants lobbyistes espagnols qui s'activent dans les coulisses du parlement européen et dans les commissions relevant des instances européennes. Les eurodéputés espagnols ont tenu plusieurs réunions au sein de l'hémicycle européen pour rallier des alliés européens à la cause des producteurs et exportateurs espagnols de fruits et légumes. Un rapport a été présenté aux membres de la commission euro parlementaire sur l'Agriculture où les lobbyistes espagnols ont insisté sur la nécessité de «durcir les contrôles aux frontières européennes», pour garantir le strict respect dudit protocole. Outre cette manœuvre, la filière espagnole multiplie les démarches. Ainsi, elle a adressé une lettre au vice-président de la Commission européenne ainsi qu'au commissaire européen en charge de la pêche, appelant à davantage de contrôles. Dans ce sens, le secrétaire général de la puissante organisation agricole COAG a mis en garde contre l'important essor que connaît le secteur agricole marocain. De fait, la prochaine construction de 5.000 hectares de serres pour la culture de la tomate à Dakhla donne des sueurs froides aux producteurs ibériques. Le secrétaire général de COAG, Andres Gongora a même qualifié cet ambitieux projet de politique marocaine pour «coloniser le Sahara», à travers l'agriculture. Connaissant l'intransigeance des autorités marocaines en ce qui concerne ce dossier, à présent le lobby espagnol pèse de tout son poids en espérant que la cour européenne se prononce en faveur d'une élimination des territoires marocains au Sahara, afin que le champ reste libre à la rivale espagnole. Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Eco