Les taux débiteurs appliqués par les banques de la place restent toujours élevés, malgré la double baisse appliquée au taux directeur en 2020. Un constat que le wali de Bank Al-Maghrib comprend et qu'il tient à éclaircir. Pour lui, les banques ne font que s'adapter aux conditions du marché, marquées par l'allongement des créances dues en partie aux moratoires de crédit… La reprise de l'activité économique, amorcée au troisième trimestre de 2020, devrait se poursuivre, soutenue notamment par l'avancement notable de la campagne de vaccination et l'assouplissement des restrictions sanitaires, selon Bank Al-Maghrib (BAM). Dans ce contexte, le taux interbancaire est resté stable à 1,50% depuis la décision du Conseil de la Banque centrale de réduire le taux directeur en juin 2020. Par ailleurs et malgré ce statu quo, l'évolution du taux directeur ne semble pas être transmise au niveau des taux bancaires. Le dernier rapport sur la politique monétaire de BAM, révèle qu'au cours du premier trimestre 2021 les conditions monétaires ont été marquées par une légère hausse des taux débiteurs. Un sujet que le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, a tenu à éclaircir durant le point de presse suivant le dernier conseil de la Banque centrale. «Le moratoire accordé par les banques s'est élevé à 118 MMDH. Pour l'heure, 67% de ce montant a déjà été régularisé, ce qui est un bon chiffre. Mais à côté, des rééchelonnements sur des périodes plus longues ont du être effectués. Ces créances à moyen terme ne profiteront donc pas des mêmes conditions des crédits à court terme. Les banques ne peuvent donc pas appliquer à ces créances les mêmes conditions que les crédits courts. Elles sont ainsi obligées d'augmenter le taux», commente le wali. Pour lui, la hausse du taux est mécanique et reste tributaire de la durée du financement. «Celui-ci augmente parce que la durée a été prolongée. La mobilisation de la liquidité par la banque augmente, renforçant par la même occasion le niveau du risque», explique Jouahri. Il poursuit «et quand on voit les augmentations réalisées, on trouve qu'il y eu 300 points de base de différence liés essentiellement à l'intermédiation bancaire. Ce n'est pas énorme ... Il ne faut pas oublier que le secteur bancaire a perdu la moitié de sa rentabilité en 2020, que ça soit sur le plan social ou sur le plan consolidé. Il a aussi perdu la moitié des rendements de ses actifs. Mais cela ne veut pas dire que je justifie le fait que les banques veuillent rattraper leurs pertes», tance-t-il. Avant de tempérer et rajouter que «ces banques essaient juste de réadapter les taux en fonction des conditions actuelles pour qu'elles les louent de nouveau à leur clientèle, entreprise ou ménage». A noter qu'une fois que les moratoires, les opérations Relance et toutes les décisions prises par le Comité de Veille économique (CVE) pour soutenir le secteur prendront fin, les banques devraient retrouver leur mode de fonctionnement initial. «Elles devront en même temps traiter les cas de déclassement, de provisionnement et les cas d'impayés en attendant qu'elles puissent reprendre le cours normal du paiement des échéances ... Il est donc très difficile de venir juger et de dire que les banques ont augmenté les conditions», soutient Jouahri qui rappelle que les augmentations de taux, en comparaison avec les chiffres 2018 et 2019, tournent autour de 30 à 40 points de base seulement. À noter que les résultats de l'enquête de Bank Al-Maghrib auprès des banques relatifs au premier trimestre 2021 indiquent une légère hausse trimestrielle de 3 points de base du taux moyen global à 4,45%. Par secteur institutionnel, les taux assortissant les prêts aux particuliers ont augmenté de 21 points, portés par des progressions de 38 points des taux appliqués aux comptes débiteurs et de 10 points de ceux aux crédits à la consommation, ainsi qu'une stabilité de ceux des prêts à l'habitat. À l'inverse, les taux appliqués aux prêts aux entreprises ont reculé de 5 points, traduisant une baisse de 24 points pour les prêts aux grandes entreprises et un accroissement de 40 points pour ceux aux TPME. «Au final, la banque n'a aucun intérêt à tuer son client. En le tuant, comment va-t-elle récupérer son du. Les choses doivent être bien étudiées dans le cadre de ce qu'apporte la banque en terme d'aménagements à sa clientèle et de l'autre côté, il faut que le coût du risque et l'appréciation de la prime de risque soient raisonnables», soutient Abdellatif Jouahri. Il ajoute «c'est nôtre rôle en tant que régulateur dans le cadre de la transmission de la politique monétaire, de voir que ces aménagements restent raisonnables, voire supportables par le client et qu'ils puissent répondre à une négociation équilibrée entre le client et la banque», conclut le wali de BAM. En termes de financement, les dernières données disponibles relatives au mois d'avril 2021 indiquent une hausse de 2,9% du crédit bancaire. Une hausse qui, semble-t-il, a été freinée particulièrement par une décélération du rythme des prêts destinés au secteur non financier à 2,9% recouvrant un ralentissement pour les prêts accordés aux entreprises et une amélioration pour les crédits aux ménages.En termes de perspectives, et tenant compte des prévisions de la croissance économique et des anticipations du système bancaire, le crédit bancaire au secteur non financier devrait s'accroitre de 3,5% 2021 et de 3,8% en 2022.