Dans le secteur du textile, la force du Maroc est sa réactivité et sa flexibilité. En plus clair, le Maroc a choisi un positionnement sur ce qu'on appelle communément dans le jargon technique du secteur, le circuit court et l'actualisation. Cela consiste à répondre à des commandes qui nécessitent un temps de réponse très réduit. «Certains donneurs d'ordres exigent parfois un délai de livraison de moins de 24 heures», précise Insaf Drissi Bacha, responsable commercial chez Lagrainitex, entreprise spécialisée en tricotage et confection de la grosse maille. «Nous réussissons très bien à répondre aux commandes tardives. C'est un atout que les opérateurs chinois ne possèdent pas», ajoute Drissi Bacha. En effet, ce segment n'intéresse guère les entreprises chinoises concurrentes, plutôt positionnées sur un segment où les commandes se font sur le long terme. Mieux encore, le Maroc subit moins de concurrence en ce qui concerne le marché européen, premier marché importateur du Maroc. Seuls quelques pays s'arrachent des parts de marché, à l'image de la Turquie et de certains pays européens. «Le Maroc a réellement développé cette capacité de répondre aux commandes des circuits courts et d'actualisation. C'est un positionnement qui a fait la force de plusieurs marques mondiales comme H&M ou Zara. C'est ce qu'on appelle la fast fashion», ajoute Mohamed Tazi, directeur général de l'Association marocaine des industries du textile et de l'habillement (AMITH). L'AMITH a, en effet, organisé, du 10 au 12 octobre, en collaboration avec Maroc Export, la 10e édition de Maroc In Mode et la 9e édition du Salon Maroc Sourcing. Le premier salon étant exclusivement dédié à l'offre d'habillement marocain spécialiste du circuit court et de l'actualisation. Le Maroc Sourcing offre, en revanche, toute «la diversité de l'amont textile de l'Euromed». C'est la deuxième fois que les organisateurs choisissent d'organiser les deux salons dans le même espace. Un nouveau ciblage a également caractérisé cette deuxième édition des deux salons réunis. Selon Tazi, le Maroc tente de se différencier en essayant de pénétrer un marché plus «haut de gamme» que le marché sur lequel se positionne la plupart des entreprises marocaines. Ce choix stratégique a orienté la sélection des exposants de l'édition 2012 des deux dalons réunis, qui a inclus pour la première fois un espace «tendance» où un défilé de mode a été organisé afin de présenter les tendances futures dans le secteur de la mode. «Cela permet aux visiteurs et surtout aux entreprises d'avoir une idée sur ce que sera la mode pendant les prochaines saisons et d'anticiper. C'est là une valeur ajoutée dont nous avons essayé de faire profiter nos exposants et nos visiteurs, laquelle n'était pas programmée par le passé», ajoute Tazi. Le même avis est partagé par Drissi Bacha qui pense que le «Maroc doit investir davantage dans la création et la mode». Pour les entreprises marocaines, il est pourtant difficile de maintenir leurs activités à cause de la crise. Mohamed Tazi, Directeur général de l'Association marocaine des industries du textile et de l'habillement. Les Echos quotidien : Qu'en est-il de Maroc In Mode et Maroc Sourcing cette année ? Mohamed Tazi : C'est la deuxième fois que nous choisissons de réunir les deux salons en un seul. Le Salon Maroc Sourcing représente l'offre matières premières (ndlr: accessoires et fournitures) qui sert à la fabrication du produit fini. Il est ouvert aux entreprises marocaines et étrangères. Ce salon permet de proposer aux fabricants les entreprises qui offrent des fournitures à portée de main. En ce qui concerne Maroc in Mode, ce salon est exclusivement réservé aux entreprises marocaines. Nous en avons décidé ainsi, afin d'encourager la production nationale. Comment se porte le secteur du textile actuellement ? Je mentirai si je disais que le marché va bien. Nous savons très bien que notre principal marché européen connaît de grandes difficultés. Il y a bien évidemment une baisse de la demande. Selon les chiffres officiels, qui prennent en compte les 9 premiers mois de 2012, le secteur a exporté l'équivalent de 22,6 MMDH. En chiffres, cela équivaut aux exportations des 9 premiers mois de 2011. Cela veut dire que malgré les difficultés que connaît le marché européen, nous avons quand même pu tirer notre épingle du jeu. Or, même si la grande majorité des entreprises marocaines ont une certaine visibilité sur l'avenir, le maintien du chiffre d'affaires ne veut pas dire que les entreprises se portent bien. Plusieurs entreprises ont maintenu leurs activités aux dépens du prix. L'objectif était de couvrir les charges fixes et de maintenir le niveau d'exploitation des entreprises. Pensez-vous qu'il soit judicieux de s'orienter vers d'autres marchés, autres que les marchés traditionnels ? Pour asseoir le développement du secteur, il faudrait consolider le marché intérieur. Le marché marocain est porteur. Notre force est la réactivité, la flexibilité et un très bon service dans des délais très courts. Nos entreprises peuvent réagir à des commandes en un temps record. Ce serait illusoire de chercher à développer le secteur en ciblant des marchés nouveaux, comme l'Australie, la Russie ou l'Amérique du Sud. Notre avenir réside dans le rayon Maroc, UMA et Europe. Or, nous n'avons que 3% du marché européen. Nous avons donc beaucoup d'espace à gagner, surtout qu'il nous reste des pays comme l'Italie et l'Allemagne à conquérir. Il y a encore des grandes opportunités, surtout que la Chine, un grand concurrent, se repositionne sur les marchés chinois et asiatique et délaisse petit à petit le marché européen.