Les travailleurs frontaliers ont appelé les autorités marocaines à autoriser leur passage. Une ouverture respectant un protocole rigoureux est envisagée pour que ces travailleurs puissent rejoindre leur poste de travail. La tension commence à monter chez les travailleurs frontaliers de la région de Nador. Dimanche, le Syndicat national méditerranéen des professionnel libérales (SNMPT) a appelé à l'organisation d'un sit-in de protestation à Nador pour braquer les projecteurs sur la situation des travailleurs frontaliers marocains, affectés par la fermeture des frontières avec l'enclave orientale. Une manifestation non-autorisée par les autorités locales pour des raisons liées à la situation sanitaire, bien entendu. Dès vendredi dernier, la presse de Melilia faisait écho de l'interdiction de cette manifestation, profitant de l'occasion pour descendre en flamme les décisions des autorités marocaines relatives à cette frontière. Selon cette organisation syndicale, environ 7.500 travailleurs, dont 3.200 titulaires d'un contrat de travail, sont affectés par cette décision décrétée le 13 mars dernier suite à l'annonce de l'état d'urgence sanitaire. Il s'agit de femmes employées comme personnel domestique, ainsi que les conducteurs qui s'affairent entre les deux régions et le personnel du secteur des services. Outre les travailleurs, ajoute cette organisation syndicale, la mesure affecte les retraités marocains qui doivent se déplacer chaque mois pour percevoir leur pension et se faire prodiguer des soins dans les centres médicaux de l'enclave. De fait, six mois se sont écoulés et les concernés sont sur des charbons ardents dans l'attente d'une décision qui tarde à venir. De l'autre côté de la frontière, les déclarations des gestionnaires de la ville n'apaisent guère le climat tendu qui plane sur cette région. Edouardo Castro, le président du gouvernement local, avait qualifié le maintien de la fermeture des passages frontaliers de stratégie marocaine pour «asphyxier» l'enclave! Outre les travailleurs transfrontaliers de Melilia, ceux de Sebta ont été les premiers à attirer l'attention sur leur situation. Ces derniers ont organisé un sit-in improvisé fin août pour demander une dérogation, afin qu'ils puissent rejoindre leur poste de travail et subvenir aux besoins de leurs familles. «Cela fait six mois que les frontières terrestres sont fermées. J'ai trois salariés coincés au Maroc. J'étais dans l'obligation de me passer de leur service et faire appel à un seul travailleur local, puisque l'économie de toute évidence tourne au ralenti au sein de l'enclave», confie cet opérateur de Sebta. Ce n'est certes pas par altruisme que les opérateurs des deux enclaves prennent la défense des travailleurs marocains contre le gouvernement marocain, mais par pur intérêt personnel. Le coût de la main-d'œuvre a connu une hausse importante depuis la fermeture des frontières. Etant donné que les résidents ne se bousculent pas au portillon pour s'acquitter des tâches assurées auparavant par les travailleurs marocains, les employeurs sont obligés de revoir à la hausse les prestations salariales. Cependant, cette fermeture des passages frontaliers terrestres est-elle fondée ? Selon le docteur marocain, Youness Smani, chercheur au prestigieux hôpital universitaire sévillan Virgen Del Rocio, la situation épidémiologique ne justifie pas à elle seule cette décision. Le scientifique marocain, spécialiste des maladies infectieuses, estime que cette mesure relève davantage du registre politique que sanitaire. «Dès que le pays accepte d'ouvrir, même partiellement, ses frontières et tolère la présence des touristes, fermer un passage frontalier où les flux humains sont contrôlés ne peut être attribué à des raisons liées à la situation épidémiologique», croit-il savoir. Selon lui, il s'agirait de mettre en place un dispositif de contrôle avec un protocole, incluant des caméras thermiques, pour veiller à une gestion des flux et éviter les mouvements de foule. De plus, ajoute cet expert, la situation épidémiologique est contrôlée dans les présides, étant donné qu'il s'agit de territoires enclavés, à l'abri des grands mouvements et déplacements interurbains. «En somme, chaque déconfinement nécessite un protocole pour éviter les réouvertures hâtives, dont les résultats sont lourds de conséquences, comme nous le voyons à présent au Maroc, qui a bâclé l'étape post-confinement», conclut-il. Un responsable andalou appelle Sebta à soigner ses relations avec le Maroc Dans un entretien publié dans le pure-player sebti, ceutaactualidad.com, Juan Bravo, le conseiller en charge du trésor public au sein du gouvernement andalou a lancé un appel en faveur d'une amélioration des relations bilatérales entre le Maroc et Sebta. Pour cet ex-député sebti, l'Exécutif local devrait s'atteler à cette mission, dès la réouverture des frontières, et contribuer à tisser des liens d'amitié avec le Maroc, bénéfiques pour les deux parties. Selon le responsable andalou, Sebta tirerait profit de cette proximité avec le royaume, «un pays préférentiel pour l'Europe» a-t-il relevé. Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Eco