S'il y a bien un secteur qui éprouve des difficultés pour se mettre sur les rails du développement, depuis le début de la mise en œuvre du plan Halieutis, ce serait celui de l'aquaculture. Il est pourtant censé venir très vite jouer un rôle de complémentarité à l'offre de la pêche maritime. Le potentiel est énorme - 8 MDH de chiffre d'affaires en 2010, pour un volume de production de 333 tonnes - mais la croissance limitée. Le poids de la production de la filière ne dépasse guerre la fraction d'un pour mille de la production halieutique totale. Les contraintes qui freinent ce développement de la filière, ce sont les responsables de l'Agence nationale de développement de l'aquaculture (ANDA) qui en parlent. «Les principaux obstacles relevés à cet égard portent particulièrement sur la disponibilité du foncier et le renchérissement de son prix», explique aux «Echos quotidien» Majida Maârouf, directrice de l'ANDA. Il faut savoir que la structure s'apprête d'ailleurs à lancer l'une de ses principales opérations, dans le cadre du programme de développement de l'aquaculture. Ce projet porte de fait, sur la création et l'exploitation d'une écloserie marine pour la production des alevins et des naissains, pour le compte des projets d'investissements en aquaculture à l'échelle nationale et ce, en vue de dynamiser et d'encourager l'investissement dans le secteur aquacole. Il faut savoir que la multiplication de ce type de fermes halieutiques, nécessite de grandes disponibilités foncières. Notons par ailleurs, que le royaume dispose de potentialités considérables du point de vue des sites pouvant abriter les activités aquacoles, constitués de lagunes, baies, pleine mer ou offshore et des zones basses en bordure de mer. Les entraves à l'essor de la filière ne se limitent toutefois pas à cela. Elles se caractérisent également par les limites du cadre légal, qui n'est pas encore adapté à ce secteur, ainsi qu'à la forte dépendance vis-à-vis du marché international. Selon Majida Maârouf, ce dernier aspect est surtout lié «aux politiques d'aides adoptées par certains pays au profit de leur filière interne», ainsi qu'aux «barrières douanières érigées par les pays importateurs et qui faussent significativement le jeu de la concurrence». La filière aquacole bénéficie pourtant des mêmes opportunités que celles de la filière de la pêche en ce qui concerne notamment la proximité des marchés demandeurs, les nouvelles perspectives offertes par l'ouverture économique et la demande, à la fois interne et étrangère de plus en plus accrue en produits de la mer. Outre ces contraintes, l'aquaculture est également généralement reconnue comme une activité fortement capitalistique. Elle nécessite en effet, à la fois, des investissements conséquents pour l'installation et des besoins en fonds de roulement importants. La DG de l'ANDA se veut très claire, et déclare que le potentiel de la filière locale aquacole ne pourra être libéré que lorsque toutes ces entraves, où une bonne partie d'entre elles, seront levées. «Nous avons réalisé un benchmark international de l'expérience des pays les plus avancés dans l'exercice de l'aquaculture. Il en ressort principalement que le développement du secteur aquacole dans notre pays, ne pourrait être assuré qu'à travers la mise en place de stratégies claires avec des objectifs précis, des moyens suffisants et un cadre légal et règlementaire adéquat», résume la patronne de la structure publique, dédiée à la promotion et au développement de la filière. Ambitions En effet, tout cela se retrouve aujourd'hui confiné dans une stratégie nationale. Objectifs : réduire la pression sur les ressources halieutiques, et pallier à la demande accrue de poissons et à la stagnation des captures de pêche pour la majorité des espèces. Il s'agit également de favoriser un développement socio-économique en permettant la création de nouveaux emplois et la diversification de l'offre en produits aquacoles, pour desservir le marché local mais également le marché à l'international. En termes de perspectives de croissance, la filière s'est fixé un objectif de production de 200.000 tonnes à l'horizon 2020. Cela devrait porter, à terme, la part de l'aquaculture à près de 11% dans le total de la production halieutique. «L'enjeu est de taille d'autant plus que le secteur de la pêche joue un rôle central dans le développement socio-économique du pays», pense la directrice de l'ANDA. «L'ANDA a fixé un plan d'action cohérent» : Majida Maârouf,Directrice de l'Agence nationale pour le développement de l'aquaculture Les Echos quotidien : Quel est le poids économique de la filière aquacole ? Majida Maârouf : Le secteur halieutique marocain est aujourd'hui essentiellement dominé par l'activité de la pêche. Celle-ci assure une production annuelle d'environ 1 million de tonnes par an, dont résultent 8,2 MMDH en termes de chiffre d'affaires. Quant à l'aquaculture, en 2010, la valeur de la production aquacole s'élevait à 8 MDH correspondant à un volume de production de 333 tonnes. L'aquaculture marocaine est centrée sur la production d'huîtres, qui représente 85% du total national. La deuxième espèce produite est la dorade avec un volume de production de 35 tonnes, soit 11% de la production nationale. Quelles sont les grandes lignes de la stratégie d'action de l'ANDA ? La création de l'Agence nationale pour le développement de l'aquaculture (ANDA) est une déclinaison de la stratégie Halieutis, lancée en septembre 2009. Elle constitue un des 16 projets phare de cette stratégie, ce qui témoigne d'une forte volonté politique en faveur du développement de la filière. L'ANDA a fixé un plan d'action cohérent comprenant l'élaboration du cadre juridique, de manière à renforcer le développement du secteur et donner plus de visibilité et de transparence aux investisseurs potentiels, ainsi que pour la mise en place d'un schéma directeur pour la planification du littoral à des fins aquacoles. De surcroît, l'ANDA prend part à l'élaboration de projets d'investissements aquacoles, afin de mettre à la disposition des investisseurs des projets «clef en main», sans passer par l'intégration de l'activité aquacole au niveau des espaces des villages de pêcheurs et des points de débarquement aménagés et enfin la recherche et le développement au niveau de la filière. En outre, l'ANDA se veut aussi un guichet unique qui offre l'accompagnement nécessaire à destination des professionnels, ainsi qu'une organisation simplifiée et structurée du secteur, le tout fortifié par une promotion de la filière à l'échelle nationale et internationale. Quels sont les objectifs principaux de cette politique ? Dès sa création en février 2011, l'ANDA s'est donnée pour principale mission la promotion et le développement du secteur de l'aquaculture au Maroc, à travers la mise en œuvre de la stratégie nationale en matière de développement de l'aquaculture et d'évaluation de son efficacité, la participation à la mise en place de la politique du gouvernement en matière d'aquaculture. À cela s'ajoute également la proposition de plans d'actions spécifiques en application des orientations données par la stratégie nationale du secteur halieutique, ainsi que la promotion des activités aquacoles avec le développement des échanges, tant à l'export que dans le marché national.