Michel Hascoët, PDG d'Axa Assurance Maroc. Les Echos quotidien : Quel bilan dressez-vous de l'activité d'AXA pour la première partie de cette année ? Michel Hascoët : Sur 2012, la bonne santé du secteur de l'assurance et du groupe AXA en particulier se confirme. En effet, la croissance de notre activité devrait, sur le premier semestre de cette année, être supérieure à 9%, soit bien plus que celle du PIB national. Dans le détail, elle est de l'ordre de 6,8% en dommages (automobiles, industries, entreprises...) et de 18% sur la vie. Certes AXA détient un portefeuille important, mais reste tout de même moins fourni que d'autres opérateurs beaucoup plus présents sur le segment Vie. Une situation assez confortable qui fait que nous réalisons assez facilement une croissance à deux chiffres. Néanmoins, c'est dans ce sens que nous avons investi dans nos propres équipes en assurant des formations aux agents généraux à l'assurance vie (protection, épargne, assurance santé...). En outre, le marché vie représente uniquement le tiers des primes du marché et dispose d'un potentiel significatif de croissance. Toutefois, pour disposer d'une croissance durable sur le long terme, il faut notamment tirer fortement le marché de l'épargne retraite assurantiel, qui devra être pris en compte dans toute réforme nouvelle de la retraite. Sur nos positions traditionnelles, à savoir le marché des entreprises, AXA garde sa position de numéro 1 au Maroc. Contrairement à d'autres compagnies d'assurance qui bénéficient de leur situation d'adossement à de grands groupes bancaires, AXA profite pleinement de sa propre image, de son expertise, de celle de sa maison mère et également de sa grande capacité de souscription, largement supérieure à celle du marché. Nous respectons nos concurrents sur le marché et sincèrement, nous n'avons pas l'intention de devenir n°1 au Maroc. Cependant, l'objectif à terme est de devenir un solide n°2 et de garder notre position sur le segment entreprises. Cette page d'avant et après l'opération stratégique est révolue ? Oui totalement. Nous nous félicitons pour la manière avec laquelle cela s'est passé. D'ailleurs, AXA Assurance Maroc continue d'opérer normalement sur le marché. Notons que la compagnie avait perdu environ 30% de son chiffre d'affaires «entreprises», et cela sans licencier personne. Actuellement, nous sommes repartis dans une logique de développement et aujourd'hui nous réalisons un CA bien supérieur à celui réalisé à l'époque. Quels sont les priorités d'AXA Assurance Maroc sur le moyen terme? Dans un premier temps, il nous faut renforcer la taille du réseau et établir une confiance entre la compagnie et les 170 agents généraux. L'objectif est de doubler cet effectif. Ensuite, il est important de continuer à renforcer les liens avec les courtiers, en gros, cela revient à élargir la distribution. Notons également parmi les priorités, le renforcement du segment entreprises. Le marché entreprises connaît une belle dynamique et reste encore largement sous équipé, notamment au niveau des PME/PMI. AXA Assurance Maroc dispose déjà d'une position de leader sur le marché des entreprises et dispose d'atouts réels sur ce domaine : des compétences techniques, une offre large et de fortes capacités de souscription, y compris sur des risques importants, sur lesquels nous pouvons nous appuyer sur l'expertise et la solidité du groupe AXA, des relations de qualité avec le courtage, l'expertise de certains agents généraux... Avec la mise en place des premières mesures du contrat-programme en RC entreprises (responsabilité civile), ce marché pourrait connaître une croissance à deux chiffres au cours des prochaines années. Dans le pipe également, le renforcement du professionnalisme de l'ensemble de nos intermédiaires. Aujourd'hui notre réseau est mono-produit. Nous essayerons de former les collaborateurs (agents généraux, courtiers...) afin de leur permettre de se pencher davantage sur d'autres segments d'assurance, notamment celui de la vie. C'est justement les courtiers qui réalisent ce genre de contrats. Les réseaux sont donc en train de se mettre en place, ce qui nous amène à investir en formation. L'assurance maladie fait également partie des axes prioritaires de notre business. Aujourd'hui, nous sommes un acteur majeur sur ce segment, notamment sur l'AMO. Nous nous préparons au transfert progressif de cette dernière, vers la CNSS et cela passe par le développement de l'assurance maladie complémentaire. Enfin, AXA Assurance Maroc compte consolider sa position sur le marché des particuliers en s'appuyant sur sa filiale dédiée au crédit à la consommation, AXA Crédit. Ainsi, de plus en plus, AXA Crédit sera au cœur de nos dispositifs et donnera des atouts supplémentaires à nos agents généraux pour l'assurance auto, celle du bâtiment et progressivement au crédit immobilier. AXA Assurance Maroc mise beaucoup sur l'innovation. Comment cette politique se matérialise-t-elle ? Tout d'abord, notons l'innovation des produits et celle des process. Pour la première, il faut savoir qu'en matière d'assurance, l'innovation sur les produits n'existe pas. Par exemple, à peine imagine-t-on une nouvelle garantie, qu'elle est copiée systématiquement tout en sachant que la notion de brevet n'existe pas dans ce domaine. Cela dit, AXA assure en permanence un travail de recherche, d'adaptation et d'anticipation des besoins futurs de ses clients. En revanche, sur les process, l'innovation repose davantage sur l'accessibilité des services d'assurance. Toujours en matière d'innovation, qu'en est-il de l'assurance islamique dite alternative ? Différentes expériences et modèles existent déjà dans le monde concernant l'assurance islamique «Takaful» : le modèle Moudaraba en Arabie-Saoudite (commission = pourcentage bénéfices technico-financiers), Wakala (commission fixe) dans certains pays du Moyen-Orient, ou des modèles hybrides comme en Malaisie. Aujourd'hui, seule la Malaisie est un exemple de fort développement du Takaful, qui a pris une part de marché importante dans le domaine de l'assurance. Toutefois, avant de considérer l'assurance islamique, un pré-requis concerne déjà le développement de la finance islamique, qui permettrait ensuite de proposer des fonds takaful au niveau des placements. Le groupe AXA est déjà présent dans différents pays où existent l'assurance islamique - notamment dans les pays du Golfe. AXA Assurance Maroc s'est déjà appuyé sur des études et des expériences au sein du groupe, mais il est prématuré d'envisager aujourd'hui une offre en l'absence de cadre et de calendrier clair au niveau législatif. Le cadre de l'exercice n'est donc pas défini et nous allons attendre qu'il le soit, mais cela ne va pas tarder. Au Maroc, Takaful représente uniquement de l'assurance vie. C'est une branche à part entière. Toutefois, nous n'allons pas nous précipiter sur l'assurance islamique. En revanche, nous répondrons présent si nous y sommes invités. Quel est l'impact de la morosité du marché boursier sur le rendement des placements d'AXA Assurance ? L'exposition d'AXA Assurance Maroc aux marchés boursiers a été réduite progressivement depuis plusieurs années. Les trois quarts de nos placements sont sur d'autres classes d'actifs et de ce point de vue, AXA Assurance Maroc ne figure pas parmi les acteurs les plus exposés, même si naturellement nous subissons également les effets d'une plus faible croissance ou d'une réduction des dividendes servis, ainsi qu'une baisse des plus-values potentielles. Toutefois, cela n'a pas d'incidence significative, ni sur notre solvabilité qui ne dépend pas des plus-values (nos fonds propres couvrant 5 fois le minimum réglementaire), ni sur les taux servis à nos assurés en capitalisation / retraite, qui restent très attractifs (plus de 4,5 à 5,2% sur l'ensemble de nos clients pour 2011), tout en préservant leurs richesses pour des distributions futures. Quel constat dressez-vous concernant le coût moyen de sinistralité chez AXA et dans le secteur en général ? De manière globale, la sinistralité dans le secteur reste correcte et l'ensemble des acteurs ont fait des efforts pour garantir une certaine maîtrise technique, même si toutefois, certains peuvent adopter des pratiques agressives à court terme, qui semblent difficiles à tenir techniquement. Au niveau d'AXA, nos objectifs ont toujours été de conserver une marge technique positive, sans avoir à attendre des résultats financiers pour dégager des bénéfices. Etant donné la baisse constatée des produits financiers, qui devrait se poursuivre, la maîtrise de la sinistralité et des fondamentaux techniques, devrait être plus que jamais la préoccupation de l'ensemble des acteurs. Quelle est la place qu'occupe AXA Assurance Maroc dans le groupe AXA dans le monde ? En Afrique subsaharienne, AXA Assurance Maroc fait partie des principaux pays en termes de croissance et de contribution au résultat, avec une présence historique de plusieurs décennies et se situe par exemple à un niveau proche d'entités comme le Golfe ou la Turquie.